Pierre Gringo(i)re
dit
Vaudemont
(1475?-1538?)
Le
Blazon des Hérétiques
(1524)
Extraict des
Registres de Parlement. Sur la requeste baillee par Phelippe Le Noir relieur iure en luniversite de Paris. Par laquelle il requeroit luy estre permys exposer en vente vng petit liure intitule le Blazon des Heretiques et que deffenses fussent faictes a tous libraires ïmprimeurs et aultres quil appartiendra de ne imprimer ne exposer en vente ledict liure jusques a deux ou troys ans sur certaines grosses paines et damende arbitraire. Veu par la Court ladicte requeste a laquelle ledict liure estoit attache. Et tout considere. Ladicte Court a permys et permect audict Le Noir suppliant de faire imprimer et exposer en vente ledict liure intitule comme dict est le Blazon des Heretiques jusques a vng an tant seullement. Pendant lequel temps icelle Court fait deffenses a tous imprimeurs libraires et aultres quil appartiendra de ne imprimer ne vendre icelluy liure sur paine de confiscation desdictz liures et damende arbitraire. Faict en Parlement le vingt vngiesme iour de decembre lan mil cinq cens vingt quatre. Collation
est faicte. Ainsi signe F. DU
TILLET. LA DESCRIPTION FIGVRE OU EFFIGIE DE LHERETICQVE. DE
tous estatz lhereticque veult estre Maistre et seigneur pour humains deceuoir Son effigie a tous peult apparoistre Difficile est et tresfort a congnoistre Voullant en mal apliquer son scauoir En gibeciere on luy voit ratz auoir Qui sont rongeans et serpens detestables En son giron faisant mords diffamables De son sain sort ung aspre feu vollant Qui cueur et corps et liures est bruslant Et fault noter ces trois choses dernieres Remunerer leur maistre coustumieres En la parfin selon leur naturel Soit temporel ou espirituel Apres que ont fait choses irregulieres Comme chacun le peult apparceuoir Lhereticque est subtil a deceuoir Les simples gens et sugect a debatre Contre les fors et puissans pour abatre Et esbahyr gens non clercz par ses dictz Oultrecuidez esmeuuent contredictz. ESPITRE adressant a tres illustre tres hault et tres redoubte prince Anthoine duc de Calabre Lorraine : et Bar Marchis Marquis de Pont presentee audict prince et seigneur par Pierre Gringoire dict Vaudemont son herault darmes compilateur dicelle. Ne tesbahys mon seigneur et mon maistre Si heresie en leglise vois mectre Par gens nommez lutheriens peruers Voullans la foy Iesus mettre a lenuers Car ce permect providence diuine Afin que les fidelles par doctrine Et vrays crestiens soient plus astus scauoir Les sainctz esperitz et faire leur deuoir De expulser hors heresie erronicque Pour obuier a sa faulce trafficque Qui ses seruans de grace Dieu desuoye Te aduertissant que la premiere voye Qui tent venir par sotte abusion A heresie est la presumption Du propre sens de lhomme qui pense estre Trop saige et cler de soy mesures et congnoistre Plus quil ne doit la diffinition De heresie est nommee erection Dhomme qui veult par subtille maniere Oppinion tenir particuliere En delaissant doctrine des recteurs De militaire esglise et sainctz docteurs Oultre le sens du sainct esperit entendre Comment aussi qui nourrist et engendre Ou ensuyt faulse et folle intencion Noualite destrange oppinion Pour son prouffit particulier ou gloire Plus que nul aultre est mys au repertoire Des pertinax nonobstant ses argus Le premier fut nommé Symon Magus Du temps Neron qui fist tres dure guerre Contre le bon et deuot pape Pierre Qui le banist dauec luy et mauldit Publicquement pour cause qui vendit Comme giez du sainct esperit la grace Dont scimonie a prins non et race Qui regne encore ses faitz sont trop congneuz Menandrians aussi sont souruenuz En soustenans par dictz a nous estranges Que les sainctz cieulx ont este par les anges Faictz et bastitz ce qui est incertain Car ung Dieu seul les a Faictz de sa main Lequel peult tout comme il veult humains guyde Vng hereticque appelle Basilide Dist que Iesus lequel se estoit offert Mourir pour nous nauoit en riens souffert Dessus sa croix. Mais de telle cautelle Fut convaincu peine endura mortelle Voullant purger le mal que fist Adam Vng Nicolas fut en Iherusalem Durant le temps du martir sainct Estienne Par mariage eust vne femme sienne Qui belle estoit mais il en ordonna Si laschement que a tous lhabandonna En soustenant que naturel ouuraige Doit commune estre a tous en mariage Sans espargner femme ou fille daultruy Ses aliez et consors auec luy Sont appellez et ditz nicolaistes Et condampnez de leurs erreurs mauldictes En leur prouuant que on ne doit faire ainsi Vindrent apres gens nommez goustici Eulx disant estre expers par excellence Plus que nul aultre en parfaicte science Ont voulu prendre et auoir vng tel nom Pour augmenter et croistre leur renom En alleguant contre saincte escripture Et soustenant lame estre vne nature En Dieu faignant que le mal et le bien Est tout en Dieu mais leur subtil moyen Fut trouue faulx plain de venin et raige Et que fol est qui cuyde estre trop saige Gens moderez sont repetez sciens Aultres nommez les carpocraciens Dirent Iesus filz de la vierge Marie Seullement homme et ne dhomme et femme En denyant ses diuines vertus Vng aultre fut appelle Cherintus Cherisiens ses consors dictz estoient Qui en publicque et segrect obseruoient A leur pouoir la circonscision Disans que apres la resurrection Nous serions en volupte charnelle Encore mille ans la verite nest telle Du sainct esperit ne sont praticiens Nazarei et ses nazariens Le filz de Dieu dirent et confesserent Mais de la loy crist de tous pointz delaisserent En obseruant et gardant seullement Pour leur plaisir lancien testament Et nostre foy nouuelle denyerent Aulcuns apres offites sappellerent Pour vng serpent que on nommoit ainsi En ladorant et luy criant mercy Voullant prouuer par leur inscipience Que le serpent de vertus congnoissance En paradis a mise il nen en est rien Sur rang se mist le fol Valencien En lan de crist cent et quarante quatre Delibere de nostre foy abatre En soustenant quant crist se transporta Du ciel ca bas que son corps aporta Faict et forme en la maniere comme On le voit naturel et pur homme Et que cestoit com par fustulle ou canal Passe dedans le ventre virginal De lhumble vierge et tees saincte pucelle Sans auoir prins substance et chair en elle Mais le meschant en erreur obstine Fut conuaincu et par droict condampne Et repute fol inepte hereticdue Par Yginus grec pape catholicque Qui de lerreur fut prudent correcteur Aulcuns aussi dirent le créateur Auoir este vng ange laudatoire Denyant crist filz de Dieu estre en gloire Telles gens ont de appellites le nom Incontinent se esleua Marcion Grant philosophe et les marcionistes Ses aliez qui contre loix escriptes Ont soutenu deux dieux en leur sermon Lung seullement iuste estre et lautre bon Cest assauoir que lung estoit propice A vng chascun faisoit iuste iustice Et lautre doulx piteulx misericords Qui pardonnoit tous debatz distords Mais il fut dit que touchant cest affaire Correction y estoit nécessaire Pour abolir leur erronicque mal Nouatus prestre a Romme desloyal Fut conuoiteux de soy faire congnoistre Pape de Romme et quant ne le peult estre Son hérésie il voulut reueiller En soustenant que on deuoit mesler Choses qui sont diuines et certaines Couuertement auecques les humaines Parquoy fut dit lhereticque prescheur. Apres voulut soustenir que vng pécheur Quelque bien faict quil feist ou pénitence Ne fut receu soubz papalle puissance A obtenir quelque grace ou mercy Pape Felix premier regnoit aussi Se fut du temps Gordian prudent homme Imperateur premier chrestien a Romme : Ce Nouatus rommain tres obstine Fut par soixante euesques condampne Comme erronicque et de vie coulpable Aultre erreur fut folle et irraisonnable Que vng ygnorant et barbare esleua Lequel feist tant que douze hommes trouua Ses aliez et disciples pour dire Et tesmoigner quil estoit crist : Contredire Voulut a ce ledit Felix : Parquoy De plus en plus augmenta nostre loy. Cest hereticque emply derreur diuerse Estoyt partout nomme Manes de Perse Puis Manichee et ses manicheaulx Remply derreur comme subtilz et caulx Dirent aulx clercs qui a eulx disputoient Que sans doubter deux principes estoient Lors furent dictz menteurs prophetizans Furent aussi cathafriges disans Pour mieulx couurir leur erreur et falace Que auoient receu du sainct esperit la grace Et non les sainctz apostres de Iesus Mais en la fin par clercs furent confuz En approuuant leur oppinion sotte Tesanus fut homme prudent tres docte Et clerc expert en grec et en latin Tandis quil tint loppinion Iustin Et florissant en la saincte escripture Apres enfle de sa literature Vne nouuelle heresie il mist sus Que augmenta lors vng nomme Seuerus Ses sectateurs seueriens se doyeunt Ainsi nommer qui iamais vin ne boyuent Abhorrans chair manger pareillement Et non croyans lancien testament Voullant nyer resurrection dhomme Ce fut du temps que pape Pie a Romme Premier de nom regna tres uertueux Anthoine aussi empereur dict piteux En lan deux cens quarante quatre furent Rommains sugectz a Deciam que esleurent Imperateur tres fier fut et cruel Et des crestiens grant ennemy mortel Lequel commist choses irregulieres Durant ce temps de martirs deux manieres On pouuoit veoir asprement se eschauffer Tant de Iesus que de dyables denfer Or est ainsi que martirs de crist furent Les papes sainctz et prelatz qui peine eurent De soustenir la foy iusques a la mort Et les martirs du dyable par effort Voullans auoir la pompe et les delices Du monde auec richesses auarices Luxure orgueil se sont euertuez Lung contre lautre et par ire tuez Mais chascun scait que en royaulme et empire Au temps present on fait encore pire Aussi martirs du dyable nous voyons Pour le iourdhui et plus parler noyons Des sainctz martirs de Iesus qui bataillent Contre heresie et en son lieu lassaillent Durant lempire au paruers Deciam Apres la mort du pape Fabien Que Claudius fut empereur bellicque Contre les Gotz il fut vng hereticque Subtil en mal nomme Sabellius Lors pape grec fut Dionysius Ce hereticque et dyable voulut dire Que Iesuchrist nostre maistre et sire Nestoit le filz de Dieu le createur Qui fut trouue execrable menteur Et son erreur de tous poinctz consommes Lors Constantin de grande renommes Apres que on leust imperateur esleu De tous chrestiens se trouua bien voullu Car franchement en paix les laissa estre Or en son temps estoit pape Siluestre Qui mains decretz saigement ordonna Toute heresie et erreur condempna Et luy sembla Siluestre vng homme ydoine Pour de sainct Pierre auoir le patrimoine Ce Constantin imperateur rommain Luy donna Romme et le mist en sa main Et Ytallie ainsi que debonnaire Leglise a de passe fait a faire Comme lisons par vng temps a este Deuotemement viuant en pourete La dignite saincte et spirituelle Ne eust pour ce temps que soubz la charge telle De souffrir mort tant que Siluestre tint Le bien mondain toutesfoys il le print. Comme les clercs en sont bien aduertiz Soubz Constantin qui luy donna gratiz A celle fin que eglise militante Prescher la foy Iesus fut plus ardante Durant ce temps lhereticque Ariam Faulx ypocrite aymant bien terrien La trinite croyoit especialle Mais lunite nyoit essencialle Qui affligea leglise en telle sorte Que faicte fut moins que elle nestoit forte Car Constantin Constans aussi Constant Qui furent filz de Constantin le grant Non comme feist leur pere donnerent Mais leur empire en troys pars deuiserent Et firent tant de guerres et assaulx Denormes faictz et execrables maulx Que Constantin et Constant demeurerent En la bataille ou tout honneur laisserent Ainsi Constans empereur fut tout seul Les arriens le firent a leur vueil Parquoy voulut la chrestiente submettre A leur plaisir qui a mort firent mettre Plusieurs crestiens. Lors vng consille fut A Nytia de compte faict y eust Troys cens dix huit euesques gens notables Saincts glorieux prudens et charitables Dont sainct Siluestre auoit faict vng amas Qui larien rendirent contumax En sa presence auec son heresie Comme erronicque et plain de frenaisie Et firent lors les euesques preditz Le sainct symbole ou credo que en beaulx dictz Chantent prelatz et prestres a la messe Puis Donatus par cautelle et finesse Cuydant venir de sa follye a chef Fist baptizer les crestiens de rechief Et soustenoit ce mauldict hereticque Quil ny auoit eglise que Affirique Voullant tenir crestiens en son lien Apres suruint vng nomme Iulien Qui fust crestien puis moyne plain de vice Aymant erreur et mondaine auarice Lequel deuint erronicque enchanteur Et apostat apres imperateur Auguste dict en se efforssant de nuyre A crestiente et du tout la destruire Et nonobstant quil y mist paine et cure Fut corrige par le martir Mercure Qui le pugnist voire diuinement Otempereant.au sainct commandement De lhumble Vierge et mere Dieu Marie Par le voulloir de trine seigneurie Ce fut du temps pape Liberius Lors se mist sus lheresie Ermonius Lache de cueur ord et lepreux en ame Voullant donner au non de Iesus blasme Lequel fut ne de Vierge humainement Dist quel nestoit semblable aulcunement A Dieu le pere en nature et en face Mais seullement son filz ayme par grace Qui fut confuz de ce quil soustenoit Macedonius hereticque nyoit Le sainct esperit dire estre egal du pere Du filz aussi pour telle vitupere. Que lhereticque aux cueurs humains entoit Qui contre droict et verite mentoit Condempne fut par raison legitime Durant ce temps fut le deuxiesme scisme Car le predict Liberius moyens Voullant trouuer supporter Arrians Dont fut chasse ainsi comme hereticque En le expulsant du siege apostolicque Et par prelatz et docteurs recuse Comme hereticque Arian abuse Ainsi acquist par erronicque blasme Le premier nom de pape a Romme infame Durant lempire au temps Archadius Que a Romme fut pape Anastasius Pelagius Celestin hereticque Et Iulien euesque malleficque Cuydant chrestiens hors de la foy bannir Publicquement voulurent soustenir Que lhomme peult bien meriter sans grace Et que baptesme ou priere quon face Dedans leglise on ne doit estimer Ce heresie a voulu fort blasmer Sainct Augustin docteur de renommee Pelagienne en son nom est nommee Laquelle fut du temps Honorius Par le decret pape Innocencius Et le clerge ainsi que en erreur nee Par sainctz prelatz et docteurs condempnee Et mesmement tous les erarsiarges Sans estandars guydons escuz ni targes Car par science ilz en vindrent a bout Par le vouloir de Iesus qui peult tout Or aduint que durant Boniface Timoteus pour couurir sa fallace Disoit Iesus en toute place et lieu Estre vray homme et le seul filz de Dieu Mais adioutoit vne faulte maline En soustenant que nature diuine Fut conuertie en nostre humanite Eraclites contre diuinite Vne heresie esleua tres mauuaise Par le parler de sa bouche punaise En soustenant que tous les hommes nez Lesquelz estans en mal predestinez Ne prouifitoit vertueusement viure Mais il ne fault vn tel presaige ensuyure Car en Carthage en veit en appareil Deux cens dix huyt bons peres en conseil Ou le docteur Augustin plain de grave Fut triumphant encontre la fallace Pelagius et si bien le vainquist Que en ses erreurs depuis honneur ne acquist Nestorius qui Constantinoble eust Pour euesche faulx hereticque fut Car il disoit et soustenoit en somme Que Iesuchrist seullement fut pur homme Mais le mauldict de lerreur inuenteur Fut conuaincu comme lache menteur Et aboly son art et malefice Aultre hereticdue en nom nomme Eutice Constantinoble eust en possession Ainsi que abbe pour resollucion Fort abuse en sa clericature Disant que vne mesme nature Diuinite aussi lhumanite De Iesuchrist contre la verite Au temps Felix quatriesme les Vendailles Comme Arrians ont faict des choses malles Contre chrestiens les voullant molester Et lesloquence a leur pouoir oster En decouppant et detrenchant leurs langues Mais non obstant faisoient leurs harengues En louant Dieu sans perdre le parler Pour ses beaulx sainetz en publicque reueller Et que aultre dieu nest requis que on adore. Vng hereticdue appelle Theodore Ayant en soy diabolicque esperit Dist vng vray dieu estre aultre Iesuchrist Et que Marie humble Vierge pucelle Ne fut de Dieu mere pure et ancelle Mais fut la mere a Iesus seullement Dont fut confus il mentoit faulcement En ame et corps est aux saintz cieulx en gloire Le bon prelat de Yspalanie Ysidore Desprisa tant fort en faictz et que dictz Les pertinax hereticdues mauldictz Son deuoir fist Machomet faire prendre Qui en Espaigne auoit voullu entendre Faire vne loy plaine dabusion Fugitif fut par persuasion De lennemy lignominieux dyable Sathan esprit dampne abhominable Car pour son maistre auoir le desira Arabiens a sa loy attyra Disant auoir puissance tres parfaicte Et quil estoit sainct iuste et vray prophete Transmis de Dieu. Sergius deuisa Auecques luy qui sa loy composa Ou toute erreur et infamye habonde Machomet fut vng deceueur du monde Prophete faulx de Satham messaigier Et president de antecrist mensongier Fier et peruers hereticque en couraige De maufuaistie final monstrant sa raige Comme enchanteur et prince des larrons Qui en distord mist princes et barons Par le moyen de son maistre Satham Fut vng second peruers Iheroboam Qui la pluspart ousta de sa franchise La grant maison de Dauid cest leglise Ce Machomet print plaisirs et delictz Aymer les gens de vertus abolis Leur commandant de viure en conuoitise Guerre debatz execrable faintise Larcins cabatz fraudez charnalite Ayant amour paix et honnestete A saincte foy ayant controuersie Sans tesmoignaige aulcun de prophesie Et en sa foy ont tenuz sotz mortelz Signes ne a faictz sainctz supernaturelz Mais pour enseigne doctrines folles fables En promettant aux gens irraisonnables Lords ignorans de viure en volupte A leur plaisir faisant leur volunte Liberaulx francs et laisser labouraige Qui tire a soy commun peuple peu saige Parquoy le Dieu qui tout scait et entent Nous a montre que son ire dessend Sur Machomet et sur ces machomistes Non voullans croire aux sainctz euangelistes Ne aux vrays docteurs et saiges zelateurs Des sainctz esperitz certains expositeurs Qui par grace ont saine pensee ague Et si ne veult que sa loy on argue Car il fist sa constitucion Sans argumens ne disputation Disans que par puissance et faictz darmes Pour soustenir ses assaulx et alarmes Que hardy vaillant bellicateur Transmis de Dieu du peuple protecteur Et non venu pour monstre sa doctrine Spirituelle et saincte medecine Mais auoir gens par cens et millions Pour donner ce que affiert a lyons Et aux larrons et tirans plains de raiges Et non a gens qui ont deuotz couraiges Spirituelz et porteurs de la loy Car par constraincte on ne peult auoir foy Ainsy voit on que Machomet follatre Et non saichant voulut la loy abatre De Iesuchrist et nulle reputer Apres faillut saigement disputer Contre vng mauldict hereticque larron Qui se appelloit Monechelitarum Disant que crist nostre seigneur et maistre Comme il voulloit le donner a congnoistre A vng chascun pour resolution Ne auoir en soy que vne opperation Et mesmement riens que vne voulente Mais luy estant de lennemy tempte En soustenant ses dictz et vituperes Par quatre vingtz et dix neuf sainctz peres Fut mis au renc des hommes non saichans Philippe fut au nombre des meschans Imperateurs qui hereticques furent Durant son temps les catholiques eurent Beaucoup de peine et excessifz trauaulx Car il vouloit comme hereticque faulx Que on ostast ymages de leglise En les boutant pour en faire a sa guyse Comme en la foy des rigle dissolust Et a Gregoire aussi Leon voulust Expressement commander telz oultrages Quil fist destruire ou brusler les ymages Sans en laisser en lesglise ou palays Gregoire dist sont les liures de lays Et simples gens nont la congnoissance Des sainctz esperitz resistant par puissance Contre Leon commandant lopposite Lors le pouoir de lempire introduicte En heresie on abatit alors Par vrays crestiens qui firent leurs effortz A resister contre leurs heresies Faisant cesser mauluaises fantasies Car a bout vint de son intention Contre heresie et veneration De ymages est comme du passe faicte Par icelluy dhereticques la secte Fut en consille a Romme condampnee Auec Leon et excommuniee Et luy ostant rentes imperiales Ledit Gringoire appella le roy Charles Pour acheuer sa louable entreprinse Par son moyen preserua saincte esglise A qui lempire auoit eu maintz distords Les Millannoys ont fait maulx griefz et tortz Contre raison a lesglise rommaine En retenant ses biens et son domaine Eulx rebellans et desobeissans Durant lespace et temps de deux cens ans Mais Federic a tout bien adonne Qui de Lorraine estoit nacionne Fut pape esleu et par son bon renom Estienne dict neufiesme de ce nom Incontinent que eut papalle puissance Aux Millannoys fist faire obeissance A la rommaine esglise comme au chef De toutes les aultres et de rechef Il increpa ainsi que magnanime A lempereur Henry troyziesme crime Destre hereticque et telle soustenoit La cause fut car il diuinoit Lautre priuillege et franchise Que auoit la militante esglise Sans voulloir faire honneur a ses consors Vne heresie et erreur fut alors Que Adriam pape en gloire temporelle Estoit regnant lheresie estoit telle Que Iesuchrist dirent filz adoptif De Dieu le pere et mys sur ce estrif Felice ayant la voulente mauldicte Felicienne a depuis este dicte Que les clers ont condampnee et de faict Soustindrent crist vray filz de Dieu parfaict Egal au pere en gloire et en puissance Dutemps que Alebart voulu subiuguer France Souk Boniface huytiesme grefuement Furent templiers destruictz soubdainement Dont les plus grans tous esmerueillez furent Que telz seigneurs si soudaine mort eurent Et que leur maistre en leur ordre a Paris Fut lors brusle eulx aussï tous peris La cause fut pource quilz confesserent Que sur la croix tressaincte tous cracherent Le desprisant comme en erreur confis Obprobre ayans du benoist crucifix La Nouarie hercsie esleuee Par Dulcius son prince fut trouuee Nyant que crist notre saluation Fut Dieu et homme apres lasumption Mais il ne sceut tenir si grande audace Que on ne congneust sa folie et fallace Sa femme aussi Marguerite y estoit Qui telle erreur a tous magnifestoit En soustenant ses erreurs et malefices Leurs aliez adherens et complices Auecques eulx en grant nombre nombrez Furent tous vifz trenchez et desmembrez Et puis bruslez sans que nul en eschappe Lors regnoit Iehan vingt deuxiesme pape A Lyon fut vng fort riche bourgeoys Que par son nom on appelloit Vauldoys Voulloit laisser biens mondains et praticque Pour pourete mener euangelicdue Les poures gens eurent de luy appuy Vng tresgrant nombre auoit auecques luy Escripre fist aulcuns liures de Bible Vulgairement en faisant le possible De les vouloir au contraire exposer Comme est requis prudemment les gloser Car en ce cas fut imbecille et vice Soy pourforcant a vsurper loffice Des apostres sainctz princes et veritez Escripre fist plusieurs auctoritez Des sainctz docteurs qui ne scauoit entendre Et les vouloit publicquement apprendre A vng chascun et prescher en publicque En deceuant simple peuple layque Luy ses consors en erreur infectez Par saiges clercz furent admonnestez Laisser lerreur ausquelz ilz contredirent A leur pouoir : car ilz leur respondirent Que on deuoit mieulx obeyr et seruyr A vng seul Dieu que aux hommes se asseruir En mesprisant de toute leur puissance Prelatz et clercz comme plains dignorance En eulx disans et nommans plusieurs fois La tierce rigle au pere sainct Francoys Et soustenans disans leurs patenostres Que Iesuchrist mesmement ses apostres Qui ont vescu endure chault et froit Ne eurent rien propre en commun ne en aulcun droit Du sainct esperit le droit leur attribue Et mainte erreur par prelatz et clercz veue Parquoy chassez ilz furent du pays Et des prelatz et du clerge hays Puis au conseil hereticques dictz furent Ars et bruslez dont plusieurs pytie eurent En leur voyant endurer si fort Vng Symon fut vray conte de Montfort Qui triumpha contre les herecticques Auec prelatz et deuotz catholicques Si fermement soustint la foy, leurs Quil desconfist cent mille hommes et plus Et si nauoit auecques luy que huyt mille Disant lerreur de hereticques utille De tous crestiens ce fut enuiron lan Que fut tenu le consille a Latran Ou mille troys cens quinze prelatz furent Qui les haulx faitz de Iesuchrist congneurent Ausquelz par droit tous nous humilion Pour lheresie aux poures de Lyon Plusieurs Picquars souk vmbre de bien faire Firent des maulx on congnust leur affaire Dedans Paris pour leur erreur et mal Furent bruslez aussi le general Des myneurs fut auecques ses complices Dict hereticdue et expert en malice Vng liseur fut excellent par renom Fort estime qui de Parule auoit nom Ayant en soy sy folle resuerie Qui soustenoit que la Vierge Marie Ne auoit este en ce monde mortel Conceue sans peche originel Mais en preschant telz motz a haulte alaine Il tresbucha dune mort tres villaine Comme de Dieu et sa mere mauldit Maistre Henry de Hassia le dit Et que plusieurs des clercs qui escriuoient De la matiere espouentez estoient Narrant qui nest si saïge ne discret Qui soit capable enquerir du secret Du createur de toutes creatures Precongnoissant toutes futures Vne peruerse heresie, se esleua Que Iehan Vuyclef hereticque trouua En Angleterre et Iehan Hus dedans Boesme Qui par long temps fist vue peine extresme A saincte esglise et ses deuotz enfans Et fut regnante enuiron quarante ans Cestuy Iehan Hus auoit pour compaignie Auecques luy Iherosme de Pragnie Qui comme caulx subtilz malicieux Leur heresie ont seme en maintz lieux Et demonstre ferocite lupine Rempliz derreurs et de fraulde vulpine Cherchant au monde auoir leur alibis Dessoubz labit daygneaux ou de brebis Eulx pretendans pour leur papellardise De subuertir lestat de saincte esglise Mais a Constance vng concille se fist Mille quatre cens et seize au grant prouffit De saincte esglise estant fort abolie Par telle erreur et foy quasi faillie Auquel concille a este fort reprins Ledit Iean Hus et Iherosme et puis prins Aprehendez et bruslez par iustice Tantost apres vint vng homme plain de vice Faulx hereticque et de la foy larron Quon appelloit lors Adamitarum En Boesme estoit son heresie empraincte Mais on la vit incontinent estaincte Car villains cas furent en eulx congnus Parmy les champs et les villes tous nudz Pour leur plaisir et voulente alloient Publicquement et la luxurioient Mais Sigismond puissant imperateur De leurs erreurs fut hastif correcteur Boesme gasta et fut habandonnee A feu et sang et la croisee donnee Encontre tous herectiques peruers Ou boesmyens eurent assaulx diuers Or fault noter que hereticques sur terre Se sont esmeuz durant que regnoit guerre Et font encore tu le voys de present Dont peuple nest de pourete exempt Mais vit en dueil en trauail et en peine Soubz faulx distord et bataille inhumaine Et cela vient ainsi comme ientendz Par fier orgueil car il y a trois temps Fort different que les humains poursuyuent Lesduelz tousiours lung apres lautre suyuent Que declairer ie veulx par bons moyens Le premier est a habondance de biens Car ceulx qui sont habondans en richesse Veullent monstrer leur puissance et prouesse Et lors se esmeut vng merueilleux discord Lung contre lautre a qui sera plus fort Lung ne permect a lautre faire place Iusques a ce que la guerre se face Et peu a peu en maisons et hostelz Villes et champs biens sont rauiz oustez De toutes parts par tailles et pillaiges Exces larcins et merueilleux oultraiges Ainsi telz gens mutillez et greuez On ne voit plus en orgueil esleuez Humiliez sont par guerre mortelle Qui dessus eulx et sur leur bien martelle Cest le premier des troys temps. Le second Est quant, humains tresgrande deffaulte ont De biens mondains voyans leur indigence Et pourete ilz prennent patience Et sont prudens pour la crudelite De la famine et la mortalite Ou de guerre, en craignant de commettre Aucuns pechez. Lors se veullent submectre A la raison viuans tempereement En labourant actuellement Et non ainsi comme ilz. le pensent faire Pour suruenir a leur petit affaire Car par les champs et manoirs sont paoureux De remonstrer aucuns aduantureux Quant le tiers temps tempere de rechef Vient aux humains apres leur grief meschef Cueurs gros enflez commencerent a rendre Deliberez du discord entreprendre Comme deuant et se peult bien vanter Richesse auoir puissance danfanter Inimitie qui garde ne a duel faille Dung peruers fruit enfanter cest bataille Et puis bataille a tousiours enfante Necessite malheur et pourete Ainsy tu veoys que au miserable monde Après richesses et biens guerre y habonde Et pourete par la guerre a son cours Parquoy conuient auoir vers Dieu recours Considerant guerre et choses herites Venir au monde et noz demerites Au temps present veons Martin Luther Contre lesglise et la foy christ luter Colecteur est dheresies passees Que saiges clercz ont du passe cassees Et en a faict volumes plus que assez Pour plaisir par maintz lieux dispersez A son discorder les esglises unies Et de priuer sainctes cerimonies Pareillement les doctrines et dictz Des bieneurez estans en paradis Irreuerant a louer les loix saines Que nous disons diuines et humaines A la iacture et la destruction De tous prelatz et diminution De la noblesse y mettant contredit Car ce quil a allegue presche et dit Est declaire en concilies publicques De nul effect et ses dictz erronicques Et ses consors de grace de Dieu priuez Par trop cuyder plusieurs sont sotz trouuez Ainsi Luther auecques ses complices Expers et durtz en subtilles malices Le populaire ont si fort saborne Que en leur erreur sest tire et tourne En mariant prestres curez chanoynes Abbez prieurs mendiens et les moynes Auec nonnains rompans religion Et infecte quasi la region De Germanie en leur faulse heresie Que a corriger nest vne chose aisie Car nonobstant que clercz ont fait escripre De lhumble Vierge et mere a Iesuchrist Ilz ont presche comme plains de cautelle Qui nest requis de supplier ycelle Et que enuers Dieu nulle puissance ne a Faisant cesser le Salue Regina Cest le salut que luy font gens honnestes Pareillement ses veilles et ses festes Qui est contraire aux anciens docteurs Et sainctz de Dieu certains predicateurs Qui de la Vierge ont tousiours faict memoire Sont ilz plus clercs que ne fut sainct Gregoire Ou sainct Iherosme Ambroise et Augustin Qui lont loue en vulgaire et latin Et sainct Bernard qui fut tant debonnaire Ignasce aussi son prudent secretaire A qui le cueur de son corps on tira La fut trouue Iesus et Maria Dedans emprainct en tres belle escripture De lettre dor en faisant la couppure Dicelluy cueur de platz et de trauers Et ses gourmans lutheriens peruers En disent mal comme pillars incestes Ce que ne font patriarches prophetes Sibilles roys qui ont diuinement Prophetise que virginallement Naistroit le Christ dune Vierge pucelle Octouien aux sainctz cieulx la veit telle Tenant son filz en vng luysant soleil Qui ladora comme le nompareil En se rendant dessoubz sa main seruille Mais que en a dict le poete Virgille Lequel estoit payen et Symeon Qui repute fut tressainct iuste et bon Scait on pas bien que Iesus choses grosses Pour sa mere a faictes en vnes nopces De Galilee ou fut Architriclin A sa priere elle mua leau en vin Il se voulut a icelle apparoistre Apres sa mort et aussi luy transmettre Le sainct esperit et son corps glorieux Il fist monter lassus es diuins cieulx Ou impascible est en gloire assouuie Ce vueille ou non lutherienne enuye Qui en karesme a permis chair menger Et soustenu quil ny a nul danger Vie mener bestialle et gourmande Aux quatre temps mengeant chair et viande Et sans ieusner vendredis samedis Veilles de sainctz lutheriens telz dictz Veullent prescher qui sont plain de faintise Lubricite erreur et gourmandise Voullans greuer la trescrestienne loy Car les prelatz augmentateurs de foy Pour preseruer de mal le corps et lame Cheoir ou tumber en linfernalle flamme Du feu denfer ont voulu ordonner Faire abstinence et aulcun temps ieusner Car trop menger maladie au corps liure Et abstinence a deite faict viure Les hommes sainctz desperit en chascun lieu Et qui mieulx vault auoir grace de Dieu Et gourmandise est cause de luxure Qui aux humains en fin est aspre et seure Ainsi Luther ses consors et vassaulx Viuent ainsi que en vng toict les pourceaulx Blasmant lesglise et prestres venerables En esperant bons faire a eulx semblables Hayans raison prudence et verite Voullans commun viure en auctorite En desprisant prudens docteurs et saiges Qui desglise ont soustenu les vsaiges Et ont este en vertus si parfaictz Moyennant christ que miracles ont faitz Et lutheriens ne font pour abreger Miracles fors de yurongner et menger Hayans honneur paix amytie concorde Prenans plaisir prescher vne vie orde Car la plus part de leurs entendemens Est de priser sainctz deuotz sacremens Et les bailler a vng chascun sans faire Confession deuote et salutaire Sans en auoir crainte doubte ou merreur Ainsi concluz que la nouuelle erreur Qui ce met sus pour gaster les prouinces Pareillement distension des princes Comme de Turcs infidelles payens Qui font assaulx et la guerre aux chrestiens Et mesmement barbares et gens darmes Les boutefeux en leurs malices fermes Grandes caues peu de bledz et de vins Adiouster foy a sorciers a deuins Et croire trop en grande seigneurie Ieune conseil et aymer flaterie Parquoy les maulx que ay deuant recitez Lesquelz veons en villes champs citez Cloistres esglises manoirs forteresses Et abolir biens mondains et richesses Nos grands pechez en sont la cause aussi Remedier est requis sur cecy Et mettre ius cest erreur qui procede Du faulx Luther car du passe succede Comme est dessus redige par escript Des precusseurs enfens de lantechrist Qui leurs subiectz mainent a fin damnable Laissant chascun soit riche ou miserable A son plaisir viure comme il entend De mon escript te plaise estre contend Mettant ce dict et prouerbe en memoire Garder la foy cest chose meritoire. LACTEVR.
Gardons nous bien de corrumpre la loy Recongnoissons nostre Dieu qui la faicte Impossible est de luy plaire sans foy Nourrist nous peult cest le christ et vray roy Grant tout puissant veritable prophete Ostons erreur car ce nest que decepte Rememorant qui nen vient nul prouffit En disant foy pour nous sauluer suffit. Cy finist le Blazon des Hereticques. Nous nous estimons très-heureux d'avoir recouvré cette pièce rarissime, que nous nous empressons de publier sur un exemplaire parfaitement conservé qui est peut-être le seul existant en France. Il est composé de 14 feuillets donnant 28 pages, signaturés a, b, c, d, imprimés en caractères gothiques, ayant 7 pouces de hauteur et 5 pouces de largeur, non rogné, parfaitement conservé. Le frontispice est composé de la figure très-satyrique que nous reproduisons, portant au haut ces mots : Blazon des Heretiques, et ceux-ci au bas : De par la Court. Le privilége daté du 21 décembre 1524, est imprimé au verso de ce frontispice. Le recto du second feuillet contient la Description figure ou effigie de lhereticque en 21 vers. Ensuite Epistre a Anthoine duc de Calabre, etc., laquelle commence le texte du poème. Quant au frontispice, il est l'ouvrage d'un graveur ancien dont la marque ou le monogramme est un G surmonté d'une croix à double traverse dans le milieu duquel se trouve une S. Il est placé au bas de l'estampe, entre les deux pieds de la figure. La même marque se voit aussi sur la 13e gravure, fol. 66, des Heures de Notre-Dame, par Gringoire, imprimées en 1527. - Christ, en son Dict. des Monogrammes , pl. IV, présente la même marque, et p. 356, même n°, il l'attribue, d'après l'Abécédaire des Peintres, à Jean Schorel, ajoutant que l'on trouve entr'autres la même marque sur les Douze Travaux d'Hercule, estampes signalées aussi par Florent le Comte, qui n'a pu en découvrir l'auteur. La réimpression que nous donnons a été tirée à 66 exemplaires, savoir : 52 exemplaires sur papier vergé, 6 exemplaires sur papier vélin et 6 sur papier de couleur. H.[erisson] Achevé d'imprimer le 24 décembre 1832, par GARNIER fils, imprimeur demeurant à Chartres. (Texte non
relu après saisie, 14.VI.07) |