I - PRÉAMBULE
Le cheval arabe en
Occident :
Les éleveurs occidentaux de chevaux arabes, de non jours, ne sont
pas hommes de terrain à de rares exceptions (1). Seul, un
certain
goût de
l'exotisme (2) les entraîne à élever le plus noble des chevaux hors de
son berceau, et sans tenir compte du mode d'élevage qui l'ont fait ce
qu'il fut ! ... lorsqu'il était
D.B.
:
desert bred
- formule anglaise
qui donne la mesure de l'ignorance, de ceux qui l'emploient quant au
monde arabe, et aux mœurs des Bédouins (3), ces
arabes errants de
la
badiya (4) ! La langue de Shakespeare ne supporte pas les idées
claires, ni les nuances essentielles - ce qui est bien utile en
diplomatie, mais pas en zoologie. Dans la langue de Molière, celle de
Voltaire, et précisément à partir du temps des
lumières, on écrit
avec modestie mais avec sérieux
né en Orient.
Les mœurs des
Européens :
Les occidentaux, on le sait (voyez
le principe de Peter),
ont des
mœurs particulières qui les poussent à la bureaucratie et à
l'impérialisme intellectuel. Le premier penchant les conduit
à
fabriquer le
stud book,
et à déclarer
: n'est cheval arabe que le produit qui
trace dans ce
livre. La seconde propension qui les anime, les a fait imposer au
pauvre
monde, le label, Stud-Book-Waho. Désormais, les techniciens des
pedigrees informatisés font la loi. Ils peuvent déclarer
arabe de
pauvres animaux qui ne supporteraient pas une selle, et en tout cas, ne
feraient pas 12 km au galop sous le cavalier, en course, comme
leurs
ancêtres
au temps du Prophète de l'Islam.
La réaction de la
base :
Quelques véritables éleveurs ont ressenti la perversion engendrée par
ces technologies. Perversion augmentée par des modes d'élevage
intensifs (occidentaux), qui multiplient les générations, éloignant les
chevaux de
show...
des origines ! Ceux-là cherchent une autre référence. Leur
critère est la plus
grande proximité de leurs
souches
avec les ascendants
nés
en
Orient dans le berceau de la race. L'anglomanie ayant jeté
son voile
de confusion sur ce petit monde, on parle maintenant
de
Chevaux du
désert. On sait ce qu'en vaut l'aune ! Nous en reparlerons.
Le dérapage du
langage :
La réaction des bons éleveurs de chevaux arabes est très saine et nous
devons l'applaudir ; mais le mal est dans l'homme avec la vanité,
exploitée par un journalisme de mauvais aloi. Dans
Cheval Pratique,
n° 12, Mars 1991, (page 96 passim), on apprend que le
désert a
atteint la banlieue du
CAIRE ! - Ce qui est
grave pour les écologistes
du monde entier. - En effet, on y apprend qu'un éleveur, qui dirige un
haras appelé - en bon français -
Egyptian désert Arabians
fait
remonter ses
origines
du désert à
EL ZAHARA qui se situe
- comme
chacun sait - à la périphérie du
CAIRE.
Cela nous renvoie à Alphonse
Daudet qui nous a raconté, pour nous rire l'histoire de Tartarin de
Tarascon (Tarascon, à moins de 50 Kms de Saint Hippolyte du Font,
site de E.D.A.). Tartarin qui partit à la chasse au lion du désert,
dans la banlieue d'Alger, vers Boufarik ! En 1872, Alphonse Daudet
avait de la culture et le sens de l'humour. Ce n'est pas le cas des
auteurs d'article dans
Cheval
Pratique en 1991 (5). Laissons là ces tartarinades et
reprenons en détail le sujet qui nous
intéresse.
II - LE DÉSERT DANS
L'IMAGINAIRE DES OCCIDENTAUX
Colonisés par les fantassins romains, qui ce sont bien gardés de
pénétrer dans les steppes et déserts, territoires des Cavaliers et des
Chameliers, les européens occidentaux ont, au fonds de leur mentalité,
un rapport de peur avec les grands espaces ! il en est résulté :
- Un respect
mythique pour ces au
delà du limes... où chevauchaient
les Parthes et les Scythes, les Massyles et les Garamantes.
- Une peur ancestrale de sédentaires, pour les Huns, cavaliers, et
autres Barbares.
- Une horreur, non dénuée d'attirance morbide, pour le désert des
Tartares.
Cette révérence est devenue ambigüe, lorsque les occidentaux ont hérité
de la mythologie juive, à travers la tradition chrétienne. Le
désert
devint le lieu où se retiraient les prophètes. Il devint cette région
aride et inhabitée, si différente de la plantureuse Égypte. Il devint
ce désert dans lequel le peuple souffrit durant
quarante ans,
regrettant son esclavage, bien nourri.
Dès lors, le désert est lié à la
traversée,
au
passage
! Et c'est
le lieu où se trouve, et se retrouve : la Pureté !
Les Protestants ont fait un grand usage de ce mythe. Ainsi, dans
les Cévennes (France), on ce réfugiait au
désert, au temps de
la
persécution des
DRAGONS de
LOUIS
XIV. Ce n'est donc pas, par hasard, si
les Anglo-Saxons (6), qui ont découvert tardivement le cheval arabe, en
tant que tel (7), ont idéalisé le
désert (Comme
la
nouvelle
frontière, mythe cousin germain !)
Avec l'influence culturelle déterminante de la
W.A.S.P.S.
(8), les
éleveurs des États-Unis et leurs clients, derniers venus sans aucun
doute parmi les éleveurs du Cheval Arabe, mais aussi les plus
puissants, on en est arrivé - par la structure de la
W.A.H.O.
(8) - à ce
que
Cheval du désert,
terminologie inepte, soit devenue... officielle
et consacrée par l'usage (
D.B.).
Les Arabes eux-mêmes, qui ont été, ainsi, dépossédés de leur cheval,
ont dû admettre cette terminologie fautive. De même qu'ils avaient dû
admettre depuis deux siècles le vocabulaire fantaisiste que les
occidentaux utilisent pour parler des descendants de : Zader Rakeb,
Al-Harun et Dahis, depuis la fin du XVIIIe siècle. (Atq - Akdich -
Kochlani - etc.. (9)
Les français dont la langue est précise, ont su faire la différence. Il
est vrai que - fait historique remarquable - ils ont conquis le plus
grand désert du Monde :
LE SAHARA, après la
conquête difficile des
steppes des hauts plateaux du Maghreb qui bordent ce désert au nord.
Pour ce faire, ils se sont mis à l'école des Cavaliers et des
Chameliers, arabes (Spahis du Maghreb et Compagnies Sahariennes au XIXe
et XXe Siècles - Spahis Tcherkesses (10) au Mashrek (Syrie) au XXe).
Ainsi, hommes de terrain, ils ont appris la différence entre (al Khla)
le Désert, et (al Badiya) la steppe, et (al Blad) la campagne, le pays,
la contrée. Et c'est la raison pour laquelle ils ont écrit dans leurs
livres généalogiques : "
né
Orient", ce qui est totalement acceptable,
contrairement, nous l'avons vu, à
Desert bred.
C
ARTÉSIENS, PASCALIENS, VOLTAIRIENS et
TEILHARDIENS,
les français ne
mélangent pas les faits de la physique avec la métaphysique (comme le
font les Angles, les Saxons et les Germains, etc..) Ainsi, il s' avère
que dire
élevé
au désert est une ânerie ;
né en Orient est la
formule juste (bien qu'imprécise).
Mais il faut bien vivre dans le monde tel qu'il est ! Aussi, nous
admettons que dans notre élevage français
les chevaux du désert
désignent ceux qui sont
nés
et élevés dans le berceau de la race
arabe, suivant le mode d'élevage bédouin. Par extension : on
considèrera que les produits qui ont beaucoup d'ascendants
nés en
Orient (
N. O.), aux générations
les plus proches, sont
chevaux
du
désert !!
Ceci est une approche moderne des racines (comme l'on dit
aujourd'hui) du cheval arabe élevé en Occident. Née d'un concept de la
culture franco (11) - romano - chrétienne (12), cette
approche intègre les générations passées aux présentes, et à
celles à venir,
dans un Espace-Temps qui suggère une communion entre
elles.
C'est
aussi une conception très arabe du temps. C'est pourquoi les
écrits
français sur le cheval arabe font toujours apparaitre - grâce à notre
Stud Book, pour cette race, qui est le plus ancien dans le monde (19) -
dans nos pedigrees : le rattachement de nos produits arabes... au
berceau de la race ! Cela... est une règle française.
Il n'en est pas de même, dans la culture
matérialiste anglo-saxo-presbytérienne à laquelle,
curieusement, pour des raisons
commerciales, et sans doute de matérialisme marxiste, s'est ralliée la
Pologne de l'après deuxième guerre mondiale. Pays qui fut le
fournisseur d'arabes des Anglo-américains, bien avant l'Égypte !
Dans ce système (13), l'exposition (comme aurait dit Abu Bekr ibn Bedr
= El Naceri) des liens familiaux est inversée ! On ne cite pas ou peu,
ou mal, les généalogies qui ramènent aux origines pures
(comme le veut le système arabe :
heariq memsub).
Non ! on part d'un
oriental : mâle ou femelle, acheté aux arabes - au mieux
en Arabie
!
On en fait un chef de lignée ; à partir de là - les Arabes
ayant été expropriés - on nationalise la lignée. Elle
est anglaise
ou polonaise (?)... Alors, elle se répand dans le monde
des nantis, où
l'on exporte toutes ses merveilles : les produits de ces arabes
occidentalisés (gros et gras). Tout est tourné vers le commerce - le
contraire de la mentalité des arabes bédouins. Il faut avouer que, pour
un amoureux du cheval arabe, fruit d'une civilisation, la lecture de
ces articles (13) sur les lignées anglaises et polonaises est
insupportable. C'est une manifestation typique de la mentalité et des
mœurs des
Occidentaux.
III - LE BERCEAU DE
LA RACE ARABE
A la fin du XIXe siècle, quand les
Blunt commençaient
seulement leur
carrière d'orientaliste (1873, premier voyage à Constantinople), qui
devait les conduire à devenir les découvreurs anglais du
Cheval
Arabe... les continentaux, et les français en particulier, le
connaissaient depuis un siècle déjà.
En effet,
NIEBUHR (14), le saxon, avait
fait connaitre - dès
1772 (Copenhague), et en français - (édité à Paxis) en 1779
(
Description de l'ARABIE)
- sa découverte en
MÉSOPOTAMIE
du Pur
sang arabe, sous son nom moderne, qu'il écrivait :
Kochlani, mais que
Bourgelat transcrivit en
Kehilan
(Le Kohelan). « Les Kochlani sont
principalement élevés par les bédouins, entre Basra (-) et la
Syrie... »
(citation de Niéburh, 1779)
En outre, tout le monde sait que Bonaparte avait apporté les
lumières
de la Grande Révolution, à l'Égypte et à la Palestine (avec
le colonialisme) en 1798 et 99. Il y avait découvert
le premier cheval
de sang.
Ainsi, l'Histoire a fait des français les plus compétents des
occidentaux en matière de race arabe. La preuve en est qu'ils furent et
restent les seuls à avoir, parfaitement, défini les berceaux de la
Race. C'était en 1884.
Le rapport Cormette (voir annexe 1) est à cet égard un document
fondamental qu'il faut étudier. Il affirme d'abord : « que le
cheval arabe est toujours l'expression de
la civilisation qui le produit (-). Au contraire (-) il s'altère par
(-) un mode d'élevage vicieux » (le mode pratiqué par les
sédentaires)
(voir les annexes 2 et 3).
Puis il désigne
les
berceaux de la race : La Syrie (qui comprend le
Liban), la Mésopotamie (qui comprend l'Irak) et le pays connu sous le
nom générique de
NEDJD. (L'Arabie). Tout
cela est d'une grande clarté
et conforme aux recherches historiques les plus sérieuses :
« ... La race Syrienne (-) que nourrissaient les pâturages (-)
steppique (s) (de la
Badiyat
- ach - Cham = la Syrie) s'étendit à
l'époque musulmane, vers le Nedjd, région des hauts pâturages de
l'Arabie centrale ». (citation de Maurice Lombard) (op. cit.)
On remarquera que l'Égypte n'est pas : « berceau de la
race » ; mais que les villes, qui se situent à la périphérie
de l'ensemble des berceaux, telles que Constantinople et Le Caire, ont
toujours été des lieux de transit des exportations. Stricto sensu, au
plan historique, l'arabe égyptien n'existe pas ! en tous cas, il n'est
pas
du désert,
qui signifie en vérité
du
Berceau !
De ce berceau, et inscrits dans les 28 premiers tomes du S.B.F., sous
la formule
né
en Orient, Madame de Blomac a recensé
: environ 500 étalons importés en France par 20 missions des
Haras Nationaux et 220 importés en
ALGERIE,
TUNISIE et
MAROC par le
Service de la
Remonte (militaire) de 1800 à 1925 pour les premiers et de
1884 à 1941 pour les seconds (15). Quel beau palmarès ! (
L' Arabe - premier chevet de sang
- op. cit. p.
184-185)
LE
RAPPORT MADRON
Pour clore ce chapitre, il faut citer la dernière mission envoyée par
les Haras Nationaux en
ORIENT. C'était en
1925 ! elle était dirigée
par l'Inspecteur Général Rieu de Madron, qui en a fait le récit dans un
remarquable document. Il faut le lire pour comprendre ce qu'est l'
ARABE
du
désert,
c'est à dire
né
en Orient !
Page 51
: « J'ai (-) parcouru de vastes pays pour ne récolter
que douze
animaux, la fatalité ayant permis que nous perdions en route le plus
beau de notre lot Syrien ». Madron importa donc onze arabes :
deux
juments, neuf étalons.
Juments - 1 - Chagra
Msiela de la plaine d'Alep, - 2 Soueida du djebel
Druse
Étalons - 1 Deir
Hafix du sud d'Alep. « Les étalons, à l'exception
d'un
seul (Deir Hafir ci-dessus) sont tous dues Anezeh, dont cinq viennent
de la grande tribu des Sbaa et trois de la tribu si renommée des
Feïdhan ». - 2 - Azem, tribu Sbaa, - 3 - Soukné, tribu Sbaa, 4
- Deïr ez
zor, tribu Feidham, perfomer, - 5 - Nahr Betik, tribu Sbaa, perfomer, 6
- Hamdani Rose, tribu Feidham (a couru à Beyrouth et
en Égypte), - 7 -
Dain, tribu Feidhan (a couru en Égypte), - 8 - El Sbaa, tribu
Sbaa (a
couru en Égypte), 9 - Selimieh, tribu Sbaa.
Page 46, Madron
explique comment il a acheté les performers dans les
écuries d'entraînement, en Égypte ; mais, tous, chevaux nés et
élévés au désert
en Syrie ! C'est pourquoi il est fautif d'écrire que la
mission Madron a ramené des arabes d'Égypte (Ils n'y étaient qu'en
transit).
Page 1, Madron écrit
- rejoignant Cormette - « La race
chevaline Arabe .. (-) Son berceau se trouve dans la partie
septentrionale de l'Arabie, au Nord du Djebel Chammar ». C'est
à dire, au Nord du parallèle AKABA KOWEIT :
C'est la Grande
Syrie : Palestine - Jordanie - Irak -Syrie - Liban - Nord
Royaume Saoudien.
IV - L'ILLUSION
ÉGYPTIENNE
Comme nous venons de le voir l'Égypte (16) n'est pas dans le berceau de
la race arabe. Ce pays n'est même pas une région naturelle d'élevage du
cheval. De ce fait, les arabes Égyptiens - qui, par, ailleurs, ont un
beau profil – ne peuvent, en aucun cas, être classés « du
désert », selon la formule douteuse, mais consacrée par
l'usage.
Deux ouvrages font autorité sur, l'élevage du cheval arabe en Égypte :
1 - Le Naceri -
Traité complet d'Hippologie et d'Hippiatrie arabes,
d'Abou Bekr Ibn Bedr (8e siècle de l'hégire, c'est à dire début XIVe
A.C.) traduit de l'arabe par le
Docteur PERRON - (ancien directeur de
l'école de médecine du Caire) - Paris 1852.
2 - The Royal Agricultural Society (devenue après la révolution de 1952
: The Egyptian Society (17) - Founded 1898 – History of R.A.S.'s Stud
of authentic Arabian Horses par le Docteur Abd el Alim Ashoub -
Directeur de la Section de l'élevage. Ed. Le Caire 1948.
Ces livres nous renseignent sur la véritable histoire du Cheval arabe
en Égypte. La voici :
Au XIVe siècle, le sultan Mohamed El Nacer, ibn Kalaoun, auquel est
dédié le premier ouvrage, d'où son nom, était le deuxième roi d'Égypte
de la première dynastie Mamelouke. Il monta sur le trône à 25 ans et
régna 40 ans. Il mourut en 1341. Citons (traduit par Perron op. cit.
Tome 1) le manuscrit arabe de la B.N. N° 673 : « Description
du Caire et de l'Égypte », de Makhrizi (fin XIVe - début XVe
siècle) - citation : « El Nacer (-) aima de passion les
chevaux arabes. Il s'en faisait fournir pan la tribu des arabes Beni
Mouhanna, par celle des arabes Beni Fadl, et autres, toutes tribus
Syriennes ». (Burkhardt classe les Beni Mouhanna dans la
confédération des Anazeh). Le Docteur Perron, qui fut
« cairote » fait le commentaire suivant, en 1852 :
« Ce fut El Nacer qui (-) introduisit sur les bords du Nil le
cheval arabe (-). Malheureusement (1852), il n'en reste plus que le
cheval égyptien actuel, pauvre résultat... »
C'est aussi l'avis du Docteur Ashoub (op. cit.), un siècle plus tard
(1948) : « ... aucun de ces chevaux (du Roi El Nacer) n'ont
donné de descendance valable. Ce n'est qu'au commencement du XIXe
siècle que, heureusement pour l'Égypte, Mehemet Ali le Grand,
recommença l'importation en Égypte des plus pures et authentiques
familles de chevaux d'Arabie » (18). Ces importations en
Égypte furent poursuivies par ses fils : Ibrahim Pacha - Le prince
Toussun - et par son petit-fils Abbas Pacha I. Mais, en 1897, les
responsables égyptiens (sous colonisation anglaise !) ont dû constater
qu'il ne restait : « que peu de choses des quelques centaines
d'étalons et jument achetés et élevés durant le XIXe siècle »
(op. cit.)
C'est pourquoi fut fondée en 1898 : The Breeding Section of the Royal
Agricultural Society. Il était urgent de prendre en main l'élevage du
pur sang arabe dans une structure quasi étatique, puisque, en Égypte il
n'y a pas de population cavalière nomade élevant ce cheval. Il n'y en a
jamais eu, comme le prouve l'Histoire des grands Rois musulmans de
l'Égypte que nous venons d'étudier : au XIVe siècle, le, Sultan El
Nacer ; au XIXe, le Khedive Mehemet Ali.
En ce début du XXe siècle, il n'existait pas de Stud book Égyptien
(19). Les Anglais, les Colonisateurs, n'avaient une Arab horse Society
que depuis 1918 ; elle édita un
S.B. Arabe
en 1919 seulement. Seuls
quelques notables conservaient des chevaux arabes, nés en Syrie, dans
leurs écuries. Les Livres d'écuries étant plus ou moins bien tenus, on
cite les écuries de : Abbas Pacha I, du Prince Toussum et bien plus
tard du Prince Saïd et du Roi Fouad I.
Cette situation précaire nécessitait une nouvelle initiative. Ce fut en
1928 la création du Haras d'élevage (20) de la Royal Agricultural
Society. Il fut installé à
KAFR Farouk, à
20 Km du Caire ! avec un Stud
Book (le premier en Égypte). Son but : renouveler l'élevage du
P.S.
Arabe dans ce pays, où il avait plusieurs fois dégénéré, dans
l'Histoire Moderne et contemporaine (21).
Vingt ans après, en 1948, le Docteur Ashoub, directeur de cet
établissement, écrivait, sans modestie, l'histoire de ce haras (op.
cit.) : « Le Haras de la Société Royale d'Agriculture peut
défier n'importe quel haras du monde pour le type et la
qualité » Bravo ! on peut l'admettre, comme on le
fait pour d'autres établissements d'élevage de l'arabe, en
Pologne, en Russie, ... etc... 42 ans plus tard, ce jeune haras a de
bons clients de chevaux de « shows » en occident !
La vérité est la suivante : il n'est pas possible de classer les
produits de l'Egyptian Agricultural Society (17) parmi les
« Arabes du Désert ». Les Egyptiens, qui sont
intelligents, sinon modestes, qualifient leurs chevaux non pas de :
« Desert bred arabian horses », mais de
« Authentic Arabian Horses » (cf. page 25).
Nous reparlerons du berceau d'où viennent les véritables chevaux du
désert, terme impropre, mais admis. Pour lors, arrêtons nous sur
quelques souches françaises, qui, elles, sont très proches du désert !
V - LES CHEVAUX DU
DÉSERT EN FRANCE EN 1991
En France, quelques éleveurs ont rejeté les modes d'approche du cheval
arabe de l'idéologie (22) anglo-américaine et de leurs clients de l'est
et du nord du Rhin. Une minorité d'éleveurs français - the happy few
(23) (de Stendhal) - suivant le chemin tracé par le regretté Robert
Mauvy (24) ont recueilli le magnifique héritage des missions qui de
1779 à 1945 sont allées chercher les
P.S.
arabes dans le Berceau. Des
éleveurs qui ont fait naître et prospérer les produits de ces géniteurs
dans le sud de la France et au Maghreb, pays où la race se conserve le
mieux.
Ainsi, notre ami Jean Deleau, élève, dans ces pays, des chevaux arabes
depuis 1964. Ses juments de base proviennent toutes des chevaux achetés
par ces misions françaises - militaires ou civiles - au Moyen Orient.
Ces juments ont été saillies par des étalons de la même origine : celle
dite « du désert » ! De la même façon, chez nos amis
Koch et Beillard, on trouve de nombreuses origines d'orient.
Leurs « papiers » sont remplis des noms des
étalons venant directement du berceau, ou après un transit dans les
villes de sa périphérie, déjà signalées dans Le rapport Cormette
(Annexe 1). De Venture (1895) à Ghalbane (1945), de Ghazi (1901) et
Ibech (1902) à Bango (1923) en passant par Tamerlan, Latif, Meenak,
Kouri... et bien d'autres. (25)
Il faut comparer (voir les annexes (4 - I.2.3.4.) les pedigrees types
de ces élevages arabes, avec le pedigree de l'arabe né en Pologne en
1953 et proclamé « le plus fameux... ». Il s'agit de
Comet.
On note des différences révélatrices :
- Chez Le
« Polonais » : du berceau de race (
N.B.
=
né dans le berceau), on trouve seulement 1/ père (
N.B.)
à la 3e
génération - 2/ (
N.B.) à La 4e, et 3/ (
N.B.)
à la 5e génération (dont
Chérine qui a conçu Guenina, mère de Bad, arrière grand-mère de Comet,
à Tiaret - dans la steppe des hauts plateaux d'Algérie ! - Au total 6
N.B. ! (19)
- Chez les arabes « français », faisons les comptes :
- RIHYA,
appartenant à M. Deleau, né 15 ans après Comet, nous comptons
dans les 5 premières générations 8 N.B.
- BAROUD, appartenant à Mme Koch, né 16 ans
après Comet : 8 N.B. Dans
les 5 premières générations.
- MOULOUKI, appartenant à M. Beillard, né
la même année que Baroud,
nous comptons 13 N.B. Sur les 4e et 5e
générations ; sans compter bien
sûr, Ibn Fayda qui est égyptien.
Que le lecteur juge la différence (au passage notons que le papier
d'
ALHABAC né en 1956 en Espagne, importé en
France en 1969, ne comporte
que 5
N.B. Sur 5 générations !
VI - LE RETOUR AUX
SOURCES
L'émigration des chevaux arabes hors du berceau, et leur élevage, selon
des modes totalement différents de celui pratiqué traditionnellement
par les Bédouins, est cause de la dégénérescence actuelle du sujets
inscrits dans les stud-books occidentaux (sauf exception). Il faut
revenir aux sources :
1.- Au mode
d'élevage bédouin - C'est, sans contredit, une première
façon d'entreprendre la régénération de la race. A cet égard, nous
sommes tous en faute, au Sud comme au Nord, dès lors que nous élevons
le plus noble des chevaux, en gros effectifs, dans des boxes, et sans
amour personnalisé ! Sur ce sujet, il faut lire le compte rendu d'un
voyage d'étude en Tunisie (1989), que nous donnons (extraits) en annexe
3 (grâce à l'obligeance de MM. Rajot et
Beauduin).
2.- Il faut revenir, et c'est urgent, au véritable berceau de la race
(défini en annexe 1 depuis 1884). Actuellement, dans ce berceau, seule
La Syrie a fait un travail de mise à jour du gisement des P.S. Arabes
bédouins (voir l'annexe 2). Cette nouvelle nous a été transmise en
Avril de cette année par le Docteur Catahier - Qu'il en soit remercié.
A cette occasion, mon vieil ami Jean Deleau me téléphonait :
« La création du Stud Book Syrien et sa reconnaissance par la
W.A.H.O... Depuis 25 ans c'est la
meilleure nouvelle pour la race arabe
dans le monde ». Il a raison ! Il y a encore des arabes
bédouins qui élèvent le plus parfaits des chevaux (Saffinat ij jiyyad)
dans le sanctuaire oriental. Telle est la bonne nouvelle. Là-bas sont
les véritables arabes (dits) du « désert ». Dans les
badiyat ach cham où ils sont préservés de toutes les impuretés
engendrées par : LES MOEURS DES OCCIDENTAUX.
3.- Enfin, il faut revenir aux Courses !!! Comme c'est le cas en
Algérie où les courses prés du Grand Désert sont développées (voir
annexe 5) ; c'est l'avenir de la race pure qui est en jeu !
NOTES
:
(1)
Lady Blunt, il y a plus d'un siècle, était une exception -
voir ses récits de voyages en Syrie (Euphrate) et dans le
Nedjd
(1879-1881).
(2) Certains, spécialement les Anglo-saxons et
leurs imitateurs, poussent le mauvais goût jusqu'à se déguiser
en
orientaux pour présenter leurs occidentaux ! (Le mal a atteint la
France en 1991).
(3) Bédouin = habitant nomade de la Badiya
(4)
Badiya : steppe qui s'étend, du désert, où toute vie pérenne est
exclue, à la campagne cultivée. C'est dans les paturages d'hiver
du
Badiyat
achcham que la race syrienne est née dès l'époque romaine
(d'après Lombard :
L'Islam
dans sa première grandeur
- Paris 1970). C'est dans les paturages d'été de la Mésopotamie
(Djeziret al arab) de Bassorah à Alep que Niebuhr a decouvert le
Kohelan (l'Arabe pur sang) à l'époque des
Lumières.
(5)
Dans un article paru dans la même revue, numéro 16, livraison de
juillet 1991, le même auteur confond le chevat barbe et le cheval arabe
(?). C'est dire le niveau de culture hippique de cette
publication. Le Secrétaire Général de l'Onganisation Mondiale du Cheval
Barbe a d'ailleurs adressé une protestation au
Directeur de
Cheval
Pratique (Lettre n° 27/SG - OMCB - datée d'Alger
le 18.7.91).
(6) A l'exception d'un seul : Niebuhr, qui était saxon.
(7)
En effet Darley, Bierley, Godolphin n'étaient pour eux que
des géniteurs orientaux (Arabe (?), Turc (?), Barbe
(?) ).
Ils ne se préoccupèrent pas sérieusement de leurs origines...
mais
cela c'est l'Histoire du cheval de course anglais ! A ce propos,
tout homme de de cheval doit lire le dernier ouvrage de Madame
de
Blomac :
La
gloire et le jeu - Fayard, 1991. La première
édition du
S.B. Arabe Anglais date de 1919.
Avant on avait ouvert en 1877 une section arabe pour les
chevaux des
UPTON et des
BLUNT
dans le
General Stud
Book, de Weatherby.
(8) W. A. S. P.S. = White Angto Saxon Presbyterian Society. -
W.A.H.O. = World Arabian Horse Organisation .
(9) Voir
L'Arabe,
premier cheval de sang.- Crépin-Leblond, Paris, 1978. -
Page 15.
(10) Le
Régiment des Tcherkesses du Colonel Collet fut un des premiers à
rejoîndre les Forces de la France Libre du Général de Gaulle en 1942.
(11)
FRANC
- Faut-il rappeler à des éleveurs d'arabes, qui sont censés connaître
la civilisation arabe, que celle-ci, au temps de sa grandeur, a
toujours appelé les occidentaux européens :
Les Francs (les
européens occidentaux orientaux, grecs et autres, ont été appellés :
Roums).
(12) Faut-il rappeler que le christianisme s'est enraciné
autours de la Méditerranée, dans et par l'Empire Romain ?
(13) Voir
les publications polonaises sur la production de l'arabe en Pologne :
Société Animex, import et export de chevaux. Voir
The Arabian Horse
par Summerhay, ex président de l'Arabian Horse Society, publié en 1969
et
The Crabbet Arabian
Stud par R. Archer, 1978.
(14)
Mon ami, le Docteur Catahier, français né à Alep, dans le berceau de
la race du Premier cheval noble du monde, me signale : que c'est un
français, Le Chevalier d' Anxieux, qui a découvert l'arabe
dans les
temps modernes, ayant publié en 1665 une description du
P.S.
Arabe !
(15) Dès
1842, le Service de la Remonte militaire, créé en 1831 au
Ministère
de la Guerre, envoyait une mission en Orient dirigée par le
colonel Reyau. Elle ramena 12 étalons arabe. Bugeaud était
alors gouverneur de l'Algérie depuis fin 1840. En 1844, il
faisait
créer,
par décisions ministérielles, les 3 premiers dépots d'étalons (au
Maghreb) du Service de la Remonte : Mostaganem (Oran),
Bouffarik (Alger), Lallélik (Bône).
(16) Sauf le désert du Sinaï où le
prophète Moussa reçut le décalogue.
(17) La
R.A.S. est devenue l'
E.A.S.
en 1952 - Puis l'
E.A.S. est devenue l'
E.A.O.,
Egyptian Agricultural Organisation (décennie 70).
(18) Arabie,
pour un arabisant - ce qu'est le Docteur Ashoub - signifie : toute la
région qui s'étend de la Mer Rouge au Golfe des Arabes
(Persique pour les européens) et au Tigre. C'est à dire le berceau
défini par la 3° République française !! Cette citation,
d'un égyptien de culture anglaise, laisse entendre que Napoléon
Bonaparte n'avait pas trouvé de véritables arabes en 1798-99....
polémique ! question ?
(19) La France possède
un Stud Book dans lequel sont inscrits les arabes nés en Orient (
N.O.)
depuis 1833. Il a édité 28 tomes de 1833 à
1945, dans lesquels sont inscrits les arabes ramenés d'Égypte et
Palestine, par le corps expéditionnaire français en Égypte depuis 1800
(cf Blomac op. cit. p. 184-185). Alors que le Stud Book arabe anglais
date de 1919 ; alors que le
S.B.
polonais, édité pa
la Société d'élevage du chevat arabe fondée en 1926
date de 1932 !
(20) Ce haras de la
R.A.S. qui
deviendra la l'
E.A.S.
(puis
E.A.O.), situé dans
la banlieue du Caire, est donc
moins ancien que ceux de
TIARET -1874 en
Algérie, de
SIDI THABET –
1883 en Tunisie, de
MEKNES - 1925 au Maroc,
succédant à la Jumenterie de
TEMARA, créée
en 1912) .
(21) En
effet, fin XIXe, il ne restait que peu de chose en Égypte
(Blomac
- op. cit. p. 239) « Vers la fin de 1871, MM. Lagrange-Labaudie et de
Grany (-) partirent pour l'Orient (-). La mission passez par
l'Égypte oà elle ne trouva rien, que des chevaux venant d'Europe ! Elle
s'installa en Syrie... »
(22) Idéologie = système de pensées... (nous l'entendons à la manière
de Dumézil).
(23) Il y en a quelques autres que ceux que je cite. Ils me
pardonneront de
ne pas le faire. En effet, je ne possède pas le pedigree type de
leurs souches !
(24)
Mon ami Robert Mauvy me disait en 1969 : « Aller au Nond pour
chercher des chevaux arabes est une aberration (c.a.d. une déviation du
bon sens). Tout te monde devrait savoir que
le berceau de la race est en Orient; au bout de la
Méditerranée. »
(C'était à Saumur un vendredi matin, après la reprise des Écuyers, à
laquelle il avait assisté.)
(25) Ces décomptes de
N.B. (né dans le
berceau) sont faits sous ma responsabilité, et sauf erreurs.... qui ne
peuvent être que négligeables. Attention : je compte sur 5 générations
- Celle du produit étant comptée :
ZÉRO !
ANNEXES
1 - Rapport de H.
de Cormette et Arrêté – 5.7.1884 - « Les berceaux de la
race pure arabe »
2 - L'élevage Bédouin du Pur Sang Arabe, en Syrie
3 - L'élevage Bédouin du Pur Sang Arabe, en Tunisie
4 -
PEDIGREES :
1 - RIHYA
à M. DELEAU
2 - BAROUD III à Mme KOCH
3 - MOULOUKI à M. BEILLARD
4 - COMET ... (polonais)
5 - L'élevage du Pur Sang
ARABE en Algérie
6 - Nomenclature des noms des chevaux arabes des Bédouins
ANNEXE 1
Paris, 5 juillet 1884
Rapport à Monsieur
le Ministre de l'Agriculture
Monsieur le Ministre,
J'ai l'honneur de vous demander, en ce
qui concerne les conditions d'inscription des étalons, juments ou
produits arabes au registre-matricule de la race pure une modification
aux dispositions arrêtées par le Ministre du Commerce, sur la
proposition de la Commission de ce registre, pour l'exécution de
l'ordonnance de 1833.
Depuis cette époque, les rapports plus
fréquents avec l'Orient, les renseignements plus précis fournis par les
voyageurs, les différentes missions envoyées depuis cinquante ans par
les gouvernements, européens, ont fait mieux connaître la population
chevaline de ces contrées. De plus, l'expérience acquise par les essais
suivis dans les principaux haras d'Europe et notamment dans celui de
Pompadour, ont appris toute l'importance qu'on devait attacher à
l'emploi exclusif d'étalons et de juments de race pure, aussi bien pour
la reproduction de la race en elle-même que pour son
application à
l'amélioration des
espèces
métisses.
Afin d'atteindre ce but, il est nécessaire de désigner les pays où
peuvent se trouver encore des reproducteurs ayant conservé la pureté du
sang, Des éléments nouveaux introduits par la civilisation sont venus
en effet
entacher
lentement mais sensiblement de
bâtardise des variétés primitivement pures, comme nous
l'avons vu notamment pour
les
familles turque,
Barbe
et persane,
aujourd'hui
en complète décadence par suite des innombrables croisements auxquels
elles ont été livrées.
Les
voyages de Niebuhr, de Burkardt, de Pulgrave et de Lebon, les rapports
des agents des haras envoyés en mission en Orient, s'accordent à
reconnaître que le cheval arabe est toujours l'expression de la
civilisation qui le produit. Il est la propriété des
tribus belliqueuses et nomades du désert qui s'en servent pour
leurs migrations et leurs razzias, ce cheval est encore de haute valeur
et de grande race.
Au contraire, s'il appartient à des
populations sédentaires, plus ou moins attachées au sol, il n'est plus
guère qu'un objet de commerce et, dès lors, il s'altère par des
accouplements incorrects et un mode d élevage vicieux.
Aujourd'hui,
les berceaux de la race pure arabe sont compris entré la chaîne du
Taurus et la Méditerranée, au nord ; le canal de Suez et la mer Rouge,
à l'ouest ; le golfe d'Aden et la mer d'Oman, au sud ; le
golfe
Persique et le Tigre, à l'est et se composent de la Syrie, de
l'Al-Djezireh ou Mésopotamie et de l'Arabie qui se divise en cinq
grandes provinces : l'Irak, le Hauran, l'Hedjaz, l'Yemen et
l'Hadramaout, patrie du cheval arabe, plus vulgairement connue sous le
nom générique de Nedjd.
Mais, si l'on ne doit admettre comme
appartenant à la race pure que les individus originaires de ces
contrées, il ne s'ensuit pas qu'on ne doive pas les acheter partout où
on les trouve, à condilion d'établir clairement leur provenance. On
rencontre, en effet, assez fréquemment dans les grandes villes d'Orient
comme Alexandrie, le Caire, Smyrne et Constantinople, dont aucune n'est
en pays arabe, des chevaux de pur sang très authentiques que ramènent,
soit les pachas rappelés des vilayets où ils ont commandé, soit les
voyageurs, les solliciteurs et surtout les pélerins à leur retour de La
Mecque.
On devra, exiger à l'avance le certificat d'origine
constatant comme d'habitude, le nom de la famille dont le cheval est
issu (Saklaoui, Hamdani, Abou-Arkoub, etc.).
Les
certificats, dont le style pompeux et imagé nous surprend et
dont
l'authenticité semble parfois contestable, offrent, en réalité, de
sérieuses garanties. Un Arabe du désert, un cheik de vie aventureuse ne
voudrait pour rien au monde se parjurer sur l'origine d'un cheval,
parce que, d'après ses idées religieuses, c'est lui-même qu'il
frapperait. Quand un Arabe écrit : tel cheval est de telle
lainille, est né dans telle tribu, et que, sous cet écrit, il appose le
cachet portant son nom, on peut le croire ; son attestation vaut celle
que donne M. Weatherby pour la race de pur sang anglais.
Telles sont les considérations qui ont engagé unanimement
la Commission du Stud-Book à
exprimer le vœu d'une modification aux dispositions adoptées en 1833.
Je m'empresse de m'y associer en vous proposant de prendre l'arrêté
ci-annexé.
Agréez, Monsieur le Ministre, l'hommage de mon respectueux dévouement.
Le Directeur des Haras,
H. DE CORMETTE.
Paris, 5 juillet
1884.
Ministère de l'Agriculture
Arrêté
Le Ministre de l'Agriculture,
Vu
les dispositions arrêtées par le ministre du Commerce, sur la
proposition de la Commission du registre-matricule pour l'exécution de
l'ordonnance du 3 mars 1833 ;
Vu les conclusions
prises à l'unanimité par la Commission du Stud-Book, le 4 juin 1884
;
Sur le rapport du directeur des haras,
ARTICLE
PREMIER
Les étalons, juments et produits arabes importés en France ne pourront
être tracés désormais au
Stud-Book
Français
que s'ils proviennent des pays d'origine compris dans les limites
suivantes : la chaîne du Taurus et la Méditerranée, au nord ; le canal
de Suez et la mer Rouge, à l'ouest ; le golfe d'Aden et la mer d'Oman,
au sud ; le golfe Persique et le Tigre, à l'est ; c'est-à-dire dans la
Syrie, l'Al-Djezireh ou Mésopotamie et dans l'Arabie, composée de cinq
provinces : l'Irak, le Hauran, l'Hedjaz, l'Yemen et l'Hadramaout.
ART. 2
La Commission du
Stud
Book ne pourra opérer cette inscription que sur le vu des
Hudjes ou
certificats d'origine indiquant le nom de la famille dont le cheval est
issu et le nom de la tribu où il est né.
ART. 3
Les
chevaux, juments et produits arabes issus d'ascendants déjà inscrits,
continueront d'être tracés sur la déclaration signée des propriétaires
indiquant la filiation, déclaration visée par le directeur des haras ou
du dépôt d'étalons de la circonscription.
ART. 4
Toutes dispositions contraires à celles qui précèdent sont abrogées.
J. M
ÉLINE
Fait à Paris, le 5
juillet 1884.
ANNEXE
2
PUR SANG ARABE
Le
Dr Catahier a fait parvenir à Denis Bogros une volumineuse et
intéressante documentation sur le Pur Sang Arabe en Syrie de nos jours.
Notre Vice-Président en a tiré le résumé suivant, qui contient les
données essentielles susceptibles d'intéresser nos lecteurs. Que Mr
Catahier soit remercié de sa collaboration.
L'élevage bédouin
du Pur Sang Arabe en Syrie
Par
le Docteur Serge Salmane Catahier, né à Alep (Syrie) en 1930, Docteur
en Médecine de l'Université de Paris, Professeur agrégé de la Faculté
de Médecine d'Alep. Citoyen français depuis 1981, le Dr Catahier a
conservé de nombreux contacts avec les éleveurs syriens. Auteur
d'ouvrages sur la médecine, les arts et le théâtre arabes, il est
membre de l'Asil Club et de Cheval Libre.
La Syrie a une superficie de 185.000 km
2.
Elle est entourée par la Turquie au nord, à l'est par un désert qui la
sépare de l'Irak, au sud par la Jordanie et la Palestine, par le Liban
et la mer à l'ouest. Son désert fait partie du grand désert de la
Péninsule Arabique (qui va du golfe d'Aden à Diyarbakir, zone de
peuplement des fils d'Abraham par Ismaël). Dans ces vastes étendues les
frontières n'existaient pas pour les bédouins - « Al bedwiyin » ou « Al
areb », nomades des « badiyat », c'est à dire les campagnes
pré-désertiques ou steppes du sud semi-arides (le désert total ou «
khla » qui doit se prononcer avec la rota : rla, étant traversé mais
jamais habité par définition).
Cependant, selon la coutume
européenne, on appelle « désert » cette steppe dans laquelle a été
sélectionné le plus beaux des chevaux : l'Arabe. Ce « désert » syrien
est bordé au nord-est par la Mésopotamie (le pays « entre les fleuves
», le Tigre et l'Euphrate), région assez fertile qui possède des
pâturages quasi pérennes. C'est pourquoi, dans le passé, les bédouins y
venaient chaque année faire paître leurs troupeaux. De nombreuses
tribus se sont fixées en ces lieux. Pour mémoire : les Shammar, Tay, al
Jabr, et la célèbre confédération des Anazé, avec les tribus des
Ruella, des Feddane, etc...
Rappelons que c'est dans cette
région, de Bassorah à Alep, en passant par « l'île d'Ibn Omar » (la
Mésopotamie), que le saxon Niebuhr découvrit le Kohelan en 1766
(Description de l'Arabie - 1772). Après lui, le Polonais Rzewuski
(1817), les français de Portes et Damoiseau (1820), les anglais Blunt
(1877), (Ier voyage), le français Madron (1924), l'allemand, Raswan
(1927)... et bien d'autres, ont repris le chemin de la Syrie pour y
chercher les véritables chevaux Arabes dits du « désert ».
De
nos jours les bédouins de Syrie élèvent encore leurs chevaux selon le
mode des nomades, et gardent jalousement leurs meilleurs produits. Bien
sûr, sous l'effet du modernisme, une partie des bédouins s'est fixée
près des bourgades. Mais, s'ils habitent des maisons, ils gardent leurs
tentes dressées à proximité, avec attachées devant elles leurs juments
qui frémissent dans le vent de la steppe...
En Syrie, la région que a gardé ces traditions et qui possède les
meilleurs chevaux
P-S.
Arabes, est celle qui a pour chef-lieu Hama. Ville très ancienne, sur
la rivière Oronte, elle est divisée en une cité : Al Hadhar, et un
marché : Al Souk. Ce souk est immense, car il est occupé dès le
printemps par les tentes des bédouins venus du « désert » limitrophe.
Ils viennent vendre leurs produits : lait, beurre, laine, tapis,
moutons, dromadaires et bien entendu...des chevaux !
MAIS
ces derniers ne sont pas là !!
Si
donc on veut acheter un cheval, il faut d'abord trouver l'intermédiaire
(le guide), en général un commerçant. Il vous conduira vers le bédouin,
son correspondant. Alors il faudra partir, après la fin du marché, au «
désert » où se trouve le campement de la tribu. Là on trouvera
les
chevaux.
Nous avons signalé qu'il existe quelques éleveurs citàdins. Mais un
puriste préférera, n'en doutons pas, aller dans la steppe !
En 1983, un comité fut créé pour examiner la situation du
P.S.
Arabe en Syrie. Grâce à l'impulsion de la
W.A.H.O.,
une commission commença à établir un stud-book, officiel en 1986.
Elle
s'est heurtée à la résistance des éleveurs qui selon la véritable
tradition arabe gardent précieusement leurs chevaux - presque en secret
!
En 1988, les opérations de recensement étant terminées, 400 chevaux
P.S.
Arabes furent inscrits au Stud-Book.
Aux
dernières nouvelles (89 et 90), un élevage étatique de type européen
était en projet. S'il en est ainsi, c'est une bien mauvaise nouvelle.
Nous savons tous qu'il est mille plus souhaitable de laisser les
bédouins continuer leur élevage selon leurs méthodes traditionnelles...
Malheureusement,
les occidentaux et leurs imitateurs élèvent d'une façon telle, que le
Pur Sang Arabe, le vrai, va peut-être disparaître... pour être remplacé
par cet « arabe occidental » : ventru, lymphatique, énorme et
paresseux, que l'on traîne dans les championnats de beauté au bout
d'une longe !
Dr S. CATAHIER
N.D.L.R. : avec l'auteur de ces
lignes,
Cheval Libre
ne peut que regretter une telle évolution, et souhaite pouvoir
participer activement à la sauvegarde de l'élevage nomade.
Dernière
minute : Un récent recensement en Syrie fait état de 569
pur-sang
arabes - 100 foals ont été enregistrés en 1989. 2 chevaux ont été
importés. Aucune exportation n'a eu lieu car c'est interdit. On
continue à élever le type désertique de ce cheval, et soigneusement.
Bientôt l'exportation sera autorisée. Ainsi la Syrie sera une source de
pur-sang arabe du
désert
tel qu'il a toujours été. (Serge Catahier) -
Cheval libre, n°
7
AVRIL 91.)
ANNEXE 3
L'ÉLEVAGE BÉDOUIN
DU PUR SANG ARABE EN TUNISIE
par M.
J. CL. RAJOT - Éleveur - TOURNUS
- 71 - qui en 1989 a fait une étude sur le terrain.
En
Tunisie, dans le sud du pays, zone des steppes, à la limite du
désert, la tradition, l''amour ancestral que les populations vouent au
cheval, les conditions d' élevage, le climat, le terrain, font que les
chevaux mènent une vie très proche de celle du berceau d'origine.
Chaque propriétaire possède une jument, voire deux ou
trois au maximum, pour les plus aisés.
Les
sujets ont conservé les caractéristiques de la race : un format dense,
doté d'une grande étendue dans leurs rayons, un cachet de race évident
et surtout un influx nerveux et une trempe rares.
La ration
d'orge n'est donnée qu'une fois par jour, le soir ; ainsi que la
boisson. Les chevaux passent toute l'année dehors, entravés, ou plus
fréquemment attachés parc un collier de chanvre prolongé par une corde
de cinq à six mètres, à côté de l'habitation, de la tente, ou
dans
la cour. A notre grande surprise, les blessures d'entraves,
fréquentes ailleurs, n'existent pas. Ces populations vivant
intimement la vie de leurs chevaux prennent naturellement les
précautions indispensables.
La région de
MAKNASSY
(1) ... est celle où le nombre d'éleveurs est le plus important et où
les chevaux sont les plus prôches de par leur type
et
leurs qualités des pur-sang arabes orientaux.
La
nature du sol y est idéale, ferme et souple à la fois, l'air sec et
léger, fait que même après les galops les plus vifs, les chevaux ne
transpirent jamais, à peine sont-ils mouillés sous la selle.
Le
climat est à ce point tonifiant que les coursiers
claqués et
abimés qui y descendent (2) du nord y guérissent en des temps
records. Et puis l'espace a pour effet premier de griser les montures ;
aussitôt leurs cavaliers en selle, ces chevaux redressent la tête
pointent les oreilles et marchent indéfiniment, et à quelle allure.
C'est pour nous occidentaux, une sensation tout à fait originale.
Les éleveurs sont parfaitement conscients de l'originalité et de la
valeur de leurs productions... et en sont fiers.
NOTES :
(1) De Maknassy, dans la basse steppe, et de Feriana, dans la haute
steppe.
(2) A Tunis, sur l'hippodrome de Ksar Said plus de 200 épreuves de P.S.
arabes sont courues chaque année. C'est le plus grand centre de courses
arabes du monde.
ANNEXE 4
1 -
RIHYA à
M.
DELEAU
2 -
BAROUD III à Mme
KOCH
3 -
MOULOUKI à
M. BEILLARD
4 -
COMET ... (polonais)
ANNEXE 5
L'ÉLEVAGE DU PUR
SANG ARABE EN ALGÉRIE
La
Jumenterie de Tiaret, en Algérie (Hautes steppes) fondée en 1874, est
l'un des plus anciens Haras d'élevage du cheval arabe en Occident
(Maghreb) !
Citons quelques "sires" du "désert" qui ont tracé à Tiaret. Et d'abord :
-
Venture, importé du Liban qui fit merveille avec les fameuses
juments tête de famille : Olympe et Primevère (Mauvy
R. Le cheval de pur
sang arabe - Paris - 1964).
- Sidi Galber, né en Orient, importé en 1909
- El Nil, né en Orient, importé en 1909
- Ghazy, né en Orient, importé en 1909, presque toutes les
juments nées à Tiaret (en) descendent (Mauvy, op. cit.)
-
Chérine, né en Syrie en 1903, importé en 1914 : suait la race
avec
sa fort jolie tête, sculptée, concave (-) son port d'encolure et de
queue (ibidem op. cit.) - Chérine est le père de Guénina, née en 1924 à
Tiaret, exportée en Pologne. Elle devint l'une des
juments bases
du Stud book Polonais (Cheval
arabe en Pologne, Animez, Polska, SD,
1975). L'étalon Comet, né en 1953, et déclaré le plus fameux
étalon arabe né en Pologne (ibidem, op. cit.) possède dans son
pédigree, Guénina comme quatrième mère de la lignée paternelle
(annexe 4/4). Dans ce même ouvrage, on note que la XXVII
lignée du SB polonais descend de Chérifs -
ar.or -importée de Tiaret - Algérie (op. cit.)
Revenons aux étalons :
-
Safita - né en Syrie - importé en 1920 ... une encolure
exceptionnelle ... sa gorge arquée était d'une rare netteté ...
l'arrière main d'une puissance exceptionnelle ... ses crins ... d'une
très grande finesse ... (quant à ses allures) libre ou monté, il volait
! (Mauvy, op. cit.).
- Bango - né en Orient 1923 (SBFT.M)
de race Managhi Sbeïli de la tribu des Shammars - Importé en 1928 -
surnommé l'élégant, fut le cheval dominant de la mission en
Orient
de 1928. Tous les Bango galopaient dur ... avec un chic qu'on
disait tout à fait à la Bango (Mauvy op. cit.). Avec lui
émigrèrent d'Orient en Algérie (Tiaret) : El Managhi - né en Orient en
1923 Le Sérieux" El Obayan - né en Orient en 1924 - importé en
1928. En 1936 arrive à Tiaret : Temlak, né en 1930 son père est un
managhi-sbeïli, sa mère un obayan Akkar (SBF)
(op. cit.)
-
En 1938 on remarque à Tiaret la naissance de Beyrouth. Il a le pédigrée
le plus prestigieux : Par Bango et Primerose par El
Managhi (SBF op. cit.).
-
En 1945 la dernière mission dans le Berceau ramène à Tiaret : Ghalbane,
né en Orient en 1941, son père de race Sagiaoui Gedran, sa mère de race
Hamdani Samri (SBF op. cit.).
- Masbout, né en Orient en 1941, par père et mère de race Saglaoui
Gedran (SBF op. cit.).
Ces Sires
et ces Dames ont acclimaté en Algérie la race de l'Arabe pur
de
Syrie : le pays du berceau. Aujourd'hui, en 1993, on peut voir
galoper leurs descendants, toujours aussi purs, toutes les semaines de
la saison hippique, sur les champs de courses d'Algérie. L'auteur les a
vus avec enchantement le 24 Juin à Barika dans le Hodna, sous un vent
du Sahara. On peut aussi les admirer à Laghouat ... La porte
du
Grand Désert. Ainsi est réalisé le souhait fait en 1853 par J.
Mazoillier, ancien consul en Syrie (
Les
chevaux arabes de la Syrie
- Paris 1853) (op. cit.) : « Quel beau haras de chevaux arabes ne
pourrait-on faire en Algérie ? Quel meilleur père que le Sahara
pourrait-on trouver pour ces jeunes fils du désert ? ».
ANNEXE 6
[Texte non relu
après saisie - 14.XI.2010]