Denis Bogros
(1927-2005)

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Des hommes, des chevaux, des équitations
Petite histoire des équitations pour aider à comprendre l'Équitation 
(1989)

 NOTES & COMMENTAIRES

NOTES DU CHAPITRE I

(1) Qu'est-ce qu'un peuple cavalier ? C'est une population qui a élevé ou élève des chevaux de selle à un niveau de production et de qualité suffisant (avec la maîtrise des techniques complémentaires) pour construire un système équestre fiable et performant, lui ayant permis ou lui permettant de vivre ! C'est le premier point. A cet égard, il est troublant de constater que les Arabes font remonter l'origine de leurs chevaux à l'étalon offert par Salomon aux Banu Azd de l'Oman. Ils l'appelèrent « Zad er Rakib » que Merder traduit par : « le viatique du cavalier » ; le cheval qui nourrit ses compagnons grâce à sa vitesse à la chasse. Le deuxième point qui caractérise les peuples cavaliers qui ont une place dans l'histoire est le suivant. A partir d'un tel système équestre, ces peuples (portés par l'esprit de corps, l'Ashabiya d'Ibn Khaldun) ont crée un système d'armes qui leur a permis des conquêtes ou des raids les plus étonnants. Ces peuples furent des pasteurs nomades ! Dans ce cadre, les Cosaques font partie des populations cavalières, ainsi que les Afrikaanders, ces fermiers Boers qui, harcelant la cavalerie et les troupes à cheval britanniques, sur leurs petits chevaux du pays, secs et endurants, leur infligèrent des pertes humiliantes. (326 000 chevaux morts sur 494 000 en moins de trois ans, de 1899 à 1902 : selon E.-H. Edwards, Horses, chez Willow Books, Londres 1987.) En tirant sur les mots, on peut sans doute y ajouter la population cosmopolite dites des « cow-boys » ! Quant aux gauchos, le Pr Cahuzac les qualifient de « paysans cavaliers » (colloque d'Avignon). Citation de R. Grousset, Bilan de l'histoire, Paris 1946. « Le nomade (-.) a possédé une avance (et) un avantage militaire, énormes. Il a été l’archer à cheval. Une cavalerie incroyablement mobile d'archers infaillibles... » qui ont assuré sa supériorité sur le sédentaire durant des siècles.
(2) Mennessier de La Lance. Bibliographie hippique. Paris 1915. - Lefebvre des Noëttes. L’Attelage, le Cheval de selle à travers les âges, Paris 1931. - P. Vigneron. Le Cheval dans l’Antiquité, Nancy 1965.
(3) Perron. Le Naceri, la perfection des deux arts, traduit de l’arabe, manuscrit d’Abou Bekr ibn Bedr, Paris 1852. - Daumas. Les Chevaux du Sahara, Paris 1858. - Mercier. La Parure des cavaliers, traduit de l'arabe. Manuscrit d'Ali ben Abderrahman ben Hodeil el Andalusy. Paris 1924.
(4) Gianoli. Le Cheval et l’homme, Paris 1969. - Saurel, Histoire de l’équitation, Paris 1971. - Tavard. L’Habit du cheval, Fribourg 1975.
(5) Decarpenty. Baucher et son école, Paris 1948. Les Maîtres écuyers du manège de Saumur, Paris 1954. - - Montheilhet. Les Maîtres de l'oeuvre équestre, Paris 1979.
(6) Chercheve. Le Cheval dans la vie médiévale, thèse, Paris SD.- Lagoutte. Idéologies, croyances et théories de l'équitation, thèse, Tours 1974.- Mulliez. Les Chevaux du Royaume, Paris 1983. - Grange. Le Cheval oublié, thèse, Grenoble 1981. - Meniel. Chasse et élevage chez les Gaulois, Paris 1987. - Aubin. L'Art du cheval en Mongolie, Mémoire, MSH, Paris 1986.
(7) Braudel. L'Identité de la France, les hommes et les choses, t. III, p. 79, Paris 1986.
(8) Des chevaux et des hommes, équitation et société, colloque d'Avignon, Caracole, Paris 1988.
(9) Dictionnaire d'art et d'histoire militaire, Paris 1988.
(10) Remonte: fourniture de chevaux à l'armée, 1680, encyelopédie Hachette.
(11) « Rapport du général Oudinot de juin/septembre 1847 », publié par le Spectateur militaire, Paris, 1848, XLVe volume. On sait qu'Oudinot fut l'organisateur de l'Ecole de cavalerie de Saumur.
(12) H = homme. Ch == cheval. h = harnachement. E = équitation (technique). S = système équestre. S = f(H x Ch x h x E) Cette formule amusante montre que, si un seul des facteurs tend vers zéro!... le système équestre n'est plus fiable. Elle explique aussi pourquoi, depuis d'Auvergne (1769) à Champsavin et d'Urbal (1918), les écuyers militaires français, s'accomodant de la mauvaise qualité des cavaliers et des chevaux, ont tenté de rendre le système fiable - quand même - en « améliorant l'équitation pour la guerre » !
(13) A ce sujet essentiel, nous avons ajouté dans la deuxième partie, des essais sur des questions fondamentales.
(14) Maxime Rodinson. La Fascination de l'Islam, paris 1980.

NOTES DU CHAPITRE II

(1) Poséidon : Dieu de la mer. Les Grecs lui attribuaient la domestication du cheval. Ismaël : premier fils d'Abraham. L'ancêtre des sémites arabes, « le premier homme qui ait monté à cheval et l'ait domestiqué (-). Lorsqu'il devint adolescent, Dieu fit sortir pour lui cent chevaux de la mer... », citation de Hicham ibn Kelbi (mort au IXe siècle en 206 de l'hégire) dans son ouvrage Al Kitab Nasab Al Khil.
(2) L. Guillot. Le Cheval dans l'art, op. cit., 1927.
(3) Le char de combat est apparu à la même époque historique (Antiquité) en Chine.
(4) Lecture des cahiers du capitaine Coignet, Hachette, Paris 1968, p. 144.
(5) Abu Abdallah ibn Batoutah (1304-1377). Géographe marocain. Carnets de voyage, voir chap. VI.
(6) « C'est l'admirable cheval de la steppe, figuré sur l'amphore d'argent du tumulus de Tchertomlik », citation de R. Grousset. L'Empire des steppes, Payot 1976, p. 36. Selon P. Meniel, op. cit. , c'est ce cheval que les Romains importèrent en masse à partir de la Grèce pour en « tirer » le « cheval militaire », représenté par les sculpteurs.
(7) P. Vigneron. op. cit., p. 73 évoque cette question.
(8) M. de Nestier. Maître français du XVIIIe siècle (1684-1754).
(9) P. Vigneron. op. cit., p. 264.
(10) Theodor Mommsen. Histoire de Rome, extraits, Rombaldi. Collection Prix Nobel, 1963, p. 142. « Il (Jules César) remédia autant qu'il put au manque de cavalerie et d'infanterie légère, en adjoignant à son armée, peu à peu, des mercenaires germains, qui échangèrent leurs petits chevaux contre ceux d'Espagne et d'Italie qu'on acheta ou qu'on requit des officiers. »
(11) Coupe sassanide datée du VIIe siècle apr. J.-C. Rappelons la règle constante qui veut que l'iconographie soit toujours en retard sur la réalité. En fait, la selle à étriers est apparue deux ou trois siècles plus tôt selon les auteurs. Il est évident qu'un tel progrès technique s'est fait sur une « longue durée », et sans synchronisme dans l'espace. Il s'est transmis par les guerres entre peuples cavaliers. C'est ainsi que les Perses l'ont transmis aux Arabes.
(12) N'ayant pas trouvé de représentations « authentiques » des cavaliers Huns, nous les citons pour mémoire. En effet, ils ont laissé des souvenirs légendaires qui pèsent encore dans notre mémoire collective. Au plan des techniques équestres, leur apport est nul, ou tout au moins insaisissable.

NOTES DU CHAPITRE III

(1) R. Grousset. Histoire de l'Asie, PUF, 1944. « Au cours de ces guerres, la charrerie chinoise se doubla, à partir de 300 av. J.-C., d'une cavalerie véritable (?), imitée de la cavalerie des Huns. » (Voir note 7, chap. V et note 2, chap. IX.)
(2) Lefebvre des Noëttes. op. cit. « Au VIe siècle, le cavalier chinois ne connaissait encore que la selle sans étriers... » « ... c'est au VIIe siècle, sur les documents figurés d'époque Tang... que cet organe essentiel du harnachement de la selle apparaît pour la première fois en Chine ».
(3) R. Grousset. L'Empire des steppes, Pavot, 1976, p. 643. « ... vers 300 av. J.-C., les Chinois, pour lutter à armes égales contre les Huns de l'Ordos et du Soueï-Yuan, doublèrent leur charrerie d'une cavalerie. »
(4) E. Saurel. Histoire de l'équitation, Stock 1971.
(5) E. Delebecque. Xénophon, De l'art équestre, Paris 1950, p. 9. Ce texte du Pr Delebecque est troublant. Il expose, en termes militaires de notre époque, des actions de cavalerie décrites par Xénophon il y a plus de deux mille ans ! Or, peu ou pas de cavaleries européennes occidentales ne surent exécuter ces types d'actions dans les temps modernes et contemporains. Remarquons aussi, que, le nom du premier marchand de chevaux connu, suggère que c'était un Juif de la diaspora dans le monde grec.
(6) Aristote ! qui fut précepteur d'Alexandre le Grand.
(7) « La poursuite et la fuite ! » Formule intéressante de Xénophon. On la retrouvera intégralement dans la bouche du prophète de l'Islam, qui enseigna ce mode de combat à sa cavalerie (D. Bogros, l'Arabe, Crépin Leblond, 1978, p. 9).
(8) Choiseul (duc de). Ministre de Louis XV. Rénovateur et réformateur de la cavalerie française après la défaite de Rossbach...
(9) Sauf exception, et à un niveau peu significatif. Voir Paul Vigneron. Op. cit., pp. 254 passim, p. 261: « La cavalerie romaine ne s'est ralliée à la tactique du harcèlement qu'à contrecœur... La grande force d'Hannibal résidait dans sa cavalerie. Selon les habitudes militaires africaines, elle tendait des embuscades, battait la campagne (sic), obligeait l'adversaire à se disperser. »

NOTES DU CHAPITRE IV

(1) Voir chapitre II.
(2) A propos de la ferrure (suite au chap. VI. note 1). a) Perron. Le Naceri, op. cit., t. III, 2e partie, 1ere division, 3e exposition, cite un manuscrit égyptien du XIIIe siècle : Kitab al Akoual : « Le Kesra Barwiz (le Cosroes Pércose-590-628, c'est-à-dire avant l'hégire) eut un cheval du nom de Cherbrizlaque ter, il avait huit clous. » b) Tasset et Carel. Traité pratique de maréchalerie, Paris 1926. Nous donnent deux informations : - page 15. « Les Arabes ferraient déjà les chevaux au VIIe siècle », ils citent une tradition qui rapporte que « l'ouvrage de fer qui terminait l'étendard d'Hossein (-) avait été fait par ordre de Fatima, fille de Mahomet, avec un fer à cheval appartenant à Abbas, oncle du Prophète. » - Ils citent par ailleurs la sourate cent du Coran: « Au nom de Dieu clément et miséricordieux :

- J'en jure par les coursiers haletants,
- Par les coursiers qui font jaillir le feu sous les coups de leurs fers... »

D'autres traductions ne parlent pas de fer mais toutes parlent du feu qui jaillit sous les pieds des chevaux ! Enfin, grâce à un document de 560 apr. J.-C., traduit par Jean Maspéro, papyrus adressé au duc Athanase qui gouvernait la Thébaïde pour l'empereur de Byzance : « Un plaignant réclame seize juments ferrées. »
- Page 7. Tasset et Carel citent Diodore de Sicile et Appien Marcellin qui « signalent simplement l'usure des sabots des chevaux comme une entrave aux opérations militaires, pouvant même arrêter la marche des armées ».
- En 1957, l'auteur a renouvelé cette expérience, bien malgré lui, dans les steppes semi-arides du Maghreb. Après trois semaines d'opérations, un peloton de cavalerie - aux chevaux non ferrés - dut être retiré du service - chevaux boiteux. Après pousse de la corne et ferrage, il fut à nouveau disponible.
- En 1987, le loueur d'ânes du parc de l'Allier dans la ville thermale de Vichy en fit à nouveau l'expérience. Louant des ânes pour les enfants, il augmenta son effectif d'équidés en mettant en service trois poneys ! Comme ses ânes, il ne les ferrent pas ! Après un mois de marche dans les allées du parc, à raison de six après-midi par semaine (pleine saison), il doit les arrêter : boiteux ! En 1988, il reprend son commerce saisonnier. Tous ses poneys sont ferrés ! - CQFD.
(3) D'après Kamal ed din ad Damiri : Kitab hayyat al hayyawan, XIIe siècle, Égypte.
(4) P.K. Hitti. Histoty of the Arabs, USA, 1961.
(5) Caussïn de Perceval. Essai sur l'histoire des Arabes avant l'islamisme, Paris 1848.
(6) Le transfert se fit par le royaume arabe de Hira, allié de la Perse sassanide contre l'empire de Byzance.
(7) Traité traduit par Louis Mercier, édité à Paris en 1924. Par ses références, Al Andalusy nous montre que ses travaux s'inscrivent à la suite de ceux des écuyers arabes du VIIe siècle.
  (8) Traité traduit de l'arabe par le Dr Perron, Paris 1852. II faut savoir que cette traduction a été commandée, sur la demande du général Oudinot, dans son rapport de 1847 au Ministre de la Guerre sur la situation de l'élevage du cheval en Algérie. Le général avait consulté le manuscrit arabe à la B.N. Après la Révolution de 1848, c'est le ministère de l'Agriculture qui prit l'affaire à son compte.
(9) Zenk ? N'est-ce pas le Tride? Qui selon La Guérinière exprime les « mouvements prompts, courts et unis que font les chevaux avec les hanches, en les rabattant promptement sous eux » ?
(10) Montaigne. Journal de voyage (1580-1583) « Les Italiens disent qu'à la bataille de Fornoue (1495), le cheval du roy le déchargea, à ruades et coups de pieds, des ennemis qui le pressaient et qu'il était perdu sans cela. Ce fut un grand coup du hasard, s'il est vrai »
(11) L'armement ? Dès le VIIe siècle, les cavaliers arabes sont représentés chassant avec l'arc. Au XIe siècle, avec une lance (Djerid) à piquer et à darder (non à renverser) et une épée de « taille ». L'iconographie fait apparaître le sabre cimeterre au XIVe siècle. On sait, qu'en règle générale, l'iconographie est en retard sur la pratique! On sait aussi que les auteurs arabes écrivent que ces armes : l'arc, la lance, le sabre étaient déjà en service à l'époque du Prophète de l'Islam (voir l'Andalusy, op. cit., chap. XV-XVI-XVII).
(12) Tactique (stratégie). Celle que nous décrivons ici est fondamentale, mais élémentaire. Au cours des siècles, les (Arabes) musulmans eurent de grands capitaines (Tarik, Saladin, Tougouz, Baïbars...) qui, par des stratégies élaborées, remportèrent des victoires décisives sur la chevalerie européenne: Hattin, 1197, en Palestine ; et sur la cavalerie mongole des successeurs de Gengis Khān : Aïn Djallut (la fontaine de Goliath), en 1260, en Palestine aussi. La campagne de Hattin est remarquablement décrite par Amin Maalouf. (Les Croisades vues par les Arabes, Lattès 1983.) Celle d'Aïn Djallut par James Chambers. (Les Cavaliers du diable, Payot 1988.)
(13) Sur l'élevage des chevaux des Arabes : on consultera Denis Bogros. L'Arabe, premier cheval de sang, premier livre ; Crépin Leblond, 1978. « Le Cheval Barbe », premier livre. Caracole, Paris 1987. Sur l'équitation arabe, du même auteur, Actes du colloque d'Avignon, 1988. Le discours français sur l'équitation arabe, Caracole ; Paris 1988 (Des chevaux et des hommes).
(14) E.-J. Roux. Le Cheval Barbe. Maisonneuve ; Paris 1987, p. 62.

NOTES DU CHAPITRE V

(1) L. Gianoli. Op. cit.
(2) E. Saurel. Op. cit.
(3) J. Lagoutte. Op. cit.
(4) P. Vigneron. Op. cit., p. 73.
(5) P. Meniel. Chasse et élevage chez les Gaulois, Errance 1987 ; p. 32 passim.
(6) L. Guillot. Le Cheval clans l'art, Paris 1927.
(7) Cavalerie. Troupe à cheval en mesure de se déplacer sur de longues distances, de manoeuvrer et de combattre à cheval. Il faut noter que ce mot, venant de l'italien, n'apparaîtra dans notre langue qu'à la fin du Moyen Âge. Les partis gaulois, romains, numides, se déplaçant à cheval et combattant à pied, étaient des troupes légères ou des dragons avant la lettre. Ce n'étaient pas des cavaleries !!
(8) G. Castellan. Histoire de l'armée, PUF, Paris 1948, p. 39.
(9) Lynn White. Technologie médiévale et transformations sociales, Paris 1969.
(10) L. Champion. Les Chevaux et les cavaliers de la Tapisserie de Bayeux, Caen 1907.
(11) F. Braudel. Op. cit., t. 11, p. 75 : « l'Élevage ancien ».
(12) Abbé Tollemer. Un sire de Gouberville, gentilhomme campagnard dit Cotentin de 1553 à 1562, Paris 1873, p. 380 passim.
(13) G. Guillotel. Les Haras nationaux, Paris 1985, p. 23 passim.
(14) Ce qui n'est pas notre thèse! On a voulu accréditer l'idée qu'auraient existé, au Moyen Âge, de nombreux établissements d'élevage du cheval de selle chez les clercs et les nobles qui auraient assuré une production suffisante... En fait, G. Guillotel (Op. cit., p. 37) n'en a trouvé trace que d'un petit nombre et qui n'étaient pas des haras au sens moderne. Notons tout de suite cette confusion entretenue entre haras signifiant troupeau de chevaux, sens des XIIIe. XIVe et XVe siècles d'après Le Robert, et, haras signifiant établissement d'élevage de chevaux sélectionnés, qui est le sens moderne. Cette confusion a été néfaste à la recherche. D'ailleurs, F. Braudel juge insuffisante l'explication avancée par F. Chercheve et reprise par J. Mulliez : « d'un bel élevage de chevaux de selle durant le Moyen Âge, qui aurait été détruit par la politique de Richelieu tendant à briser la féodalité. » (Op. cit., t. II, p. 91 : l'Histoire curieuse du cheval en France, s'explique-t-elle ?)
(15) Cité par d'Humières (Gal.) « Le Cheval d'armes », in Prestige du cheval. Paris 1951, p. 233.
(16) Henry Lee. Historique des courses de chevaux, Paris 1914, p. 18. Henri VII interdit d'employer à la reproduction des chevaux d'une taille inférieure à 1 m 27 (Preuve que c'était l'habitude). Henri VIII, par un acte du Parlement, fixa la taille des étalons à 1 m 52, et par un second billet ordonna de « tuer, avant la Saint-Michel, tous les chevaux n'ayant pas la taille voulue ».
(17) Tollemer. Op. cit., p. 383. « Au matin, je mande Pierre Quentin... et allasme à la forest pour prendre du "haras"... » c'est-à-dire : pour attraper des chevaux du troupeau sauvage (1553-62).
(18) Cette aide animale, par le cheval de traction, était rendue possible par l'invention du collier d'épaules et des traits, invention que Lefebvre des Noëttes (op. cit., p. 92) situe vers le Xe siècle et B. Lizet bien avant ! (op. cit.)
(19) Morris (gal). L'Extérieur du cheval, Paris Éditions 1890 (3e), désigne la première des races régionales de trait dont on ait fait état: « la Cauchoise », p. 89. La première édition date de 1835, Morris ignorait donc les travaux de Tollemer (op. cit.) qui furent publiés en 1873. Or, celui-ci confirme, qu'à l'époque de Gouberville (1550), on utilisait dans le Cotentin des étalons du pays de Caux pour améliorer la population chevaline de la Basse-Normandie (p. 386).
(20) Il est bien entendu que les nobles et les clercs en leurs tours ou abbayes avec fermes en exploitations directes ont aussi élevé des chevaux dans ce système. Philippe le Hardi (XIIIe siècle) le leur ordonnera d'ailleurs ! (voir note 27.)
(21) Littré. « Il n'en perdra ni runcin ni sommier », chanson de Roland, XIIe siècle. Runcin signifie « cheval... entre deux tailles (sic) ». Sommier signifie bête de somme, âne, mulet, éventuellement cheval. Notons que sur la Tapisserie de Bayeux, on voit la première représentation d'un roncin tirant la herse avec collier d'épaules et traits. On voit aussi un mulet, c'est un sommier tirant la charrue araire.
(22) G. Duby. Guillaume le maréchal ou le meilleur chevalier du monde, Fayard, Paris 1984, p. 111.
(23) Comptes des dépenses de la chevalerie, de Robert, comte d'Artois, à Compiègne, juin 1237. Par Peigné- Delacourt, Amiens 1855. Voir aussi les prix des roussins de luxe pour hauts personnages dans les Comptes d'Alphonse de Poitiers, juin 1241 à la bibliothèque de l'École des Chartes.
(24) G. Duby. Op. cit., p. 158.
(25) Lefebvre des Noëttes. Op. cit., p. 246.
(26) Cet élevage du véritable cheval de selle de cour et de guerre sera reconnu par le document le plus important concernant l'élevage du cheval en France: l'Arrest du Conseil d'Éstat pour rétablir (sic) les haras dans le Royaume (du 17 octobre 1665). Les provinces d'Aunis, Xaintonge, Poitou et Auvergne (cette province comprenant tout l'ouest du Massif central dont le Limousin, bien sûr !) sont désignées pour qu'y soient élevés des chevaux de selle, produits d'étalons Barbes. Au XIXe siècle, les Anglais les appelleront « les barbes du Limousin » (Sidney, le Livre du cheval, Paris 1892).
(27) Pour en terminer avec l'élevage du cheval en France au Moven Age, il faut retenir deux idées remarquablement établies par F. Chercheve (op. cit.) : D'abord. L'élevage du cheval de selle fut toujours déficitaire ! Ce qui entraîna de nombreuses mesures de la part des rois : - Interdiction d'exporter. Incitations à l'élevage. Mesures fiscales sur les champs de foires (Tonlieu). Le roi ordonne que « .., Li comte, li duc et li baron et li abbé et tout li autre grant homme qui ont pasture suffisant, tiegnent haraz de jumenz de six ou quatre au (moins)... », ordonnance de Philippe Le Hardi (XIIIe siècle). Bibliothèque de l'École des Chartes.
Ensuite. Qu'il y a durant une longue période identité entre cheval de selle et de trait ; car il n'y avait pas de roulage (transport par voie de terre sur roues à longues distances), les routes et pistes ne le permettaient pas. Le transport se faisait par portage, par bât, par somme, par charge. (Le cheval de guerre anglais s'appelle « charger ».)
Enfin, il faut ajouter à cela, qu'il y eut aussi identité entre le cheval de bataille et le cheval de travail, spécialité labour ! - Dans ces trois remarques, nous tenons les clés de toute la problématique de l'élevage du cheval de selle de guerre de troupe en ce pays. L'élevage national n'a jamais produit les chevaux de selle nécessaires à l'armée. Ceci est tellement vrai qu'il fallut, en 1898 (c.-à-d. à la fin de la cavalerie), fonder la Société d'encouragement à l'élevage du cheval de guerre français. Trop tard
(28) Mot de Lucien Poirier (gal). Les Voix de la stratégie, Paris 1985. Cugnac (gal de). Revue historique de l'armée, août 1957 écrit, p. 26 : ordonnances du 13/1/1373 et du 6/12/1373, en p. 17: « La cavalerie française, entre 1870 et 1914, s'est trompée comme la chevalerie jadis », stigmatisant les méfaits du conservatisme archaïque (voir note 10 du chap. IX).
(29) Lucien Clare. Les deux façons de monter à cheval en Espagne au siècle d'or. Actes du colloque d'Avignon. Des chevaux et des hommes, Caracole 1988.
(30) Froissard. XIVe siècle, « Ginet Ligier et bien courant à merveille », Littré.
(31) M. Dugué-mac-Carthy. La Cavalerie française et son harnachement, Maloine 1985, p. 78.
(32) D'Aure. Cours d'équitation, Paris 1853, p. 256.
(33) Jusqu'au jour où les Anglais mirent pied à terre, et ce fut Crécy 1346.
(34) Analyse du discours français sur l'équitation arabe. Op. cit.
(35) Perron. Le Naceri. op. cit., t. II, chap. XII. « Dressage et éducation des chevaux ».
(36a) Cet exposé critique, qui prétend analyser la société féodale au plan hippique, ne doit pas faire oublier - ni ses progrès économiques, - ni ses forces d'expansion. Ainsi, les Croisés se sont maintenus deux siècles au Proche-Orient au milieu des principautés arabo-turques ; les chevaliers teutoniques ont colonisé les rives de la mer Baltique. La « Reconquista », la croisade espagnole, fut finalement victorieuse, après sept siècles ! La prise de Grenade, en 1492, marque précisément la fin du Moyen Âge.
(36b) La mauvaise qualité du cheval européen ? - Ephraim Houel, inspecteur général des haras nationaux, rapporte cette citation de l'Anglais, John Lawrence: « Le trot est l'allure des chevaux du Nord, comme le galop est celle des chevaux du Midi. » (Histoire et origine du cheval dans toutes les variétés, John Lawrence, 1809.)
(37) L'élevage du cheval de selle en France. La France qui est le « berceau de race » de plusieurs chevaux lourds de trait, de réputation universelle, n'a jamais été un pays d'élevage du cheval de selle ! Nous venons de le voir pour le Moyen Age ! - Au moment de terminer cet ouvrage, nous recevons le n° 163 de Plaisirs équestres. (Janvier-février 1989, paru avant Noël 1988). Page 42, on peut lire une déclaration de Fernand Leredde (57 ans), éleveur-propriétaire. Haras des Rouges, près de Saint-Lô, (Manche-Normandie) : « (Bien que) l'élevage du cheval de selle (-) (ait) toujours été considéré comme parent pauvre parmi la diversité des productions agricoles. (-) Il fut longtemps complètement ignoré dans le système agricole. » Ce jugement, libre et grave d'un éleveur-expert, de la fin du XXe siècle, résume la question de l'élevage du cheval de selle en ce pays depuis un millénaire. Résultat équivalent à zéro malgré l'intervention de la puissance publique sous tous les régimes politiques, à toutes les époques ! Cela nous interpelle ! Car, ce jugement d'une extrême importance, qui détruit définitivement les affabulations patriotiques qui baignent notre imaginaire, avait déjà été proclamé par Napoléon Ier, en 1806, et par le vice-président du Conseil dans les débats célèbres de la « Loi sur les haras et remontes », de 1874 : 1806. Napoléon Ier « Je fis faire une enquête... Il n'y avait pas en France cent étalons de selle... » (cité p. 114, in l'arabe, op. cit., 2e livre par N. de Blomac) ; 1874. Le vice-président du Conseil : Il faut « ... des étalons capables de faire des chevaux de selle, ce qui nous manque par-dessus tout. » (Nombreuses marques d'approbation.) (In les Annales de l'Assemblée nationale, p. 164, séance du jeudi 28 mai 1874.)

NOTES DU CHAPITRE VI

(1) A propos de la ferrure (suite de la note 2 du chap. IV). (Voir la fin de cette question au chap. XI, note 2.) Les découvertes archéologiques du champ de bataille d'Augsbourg (955) sont de la plus haute importance au plan de la question primordiale de la ferrure des chevaux. Nous ne parlons pas de l'origine du fer à cheval ! Question controversée sans intérêt ici. Nous parlons de l'usage du fer à cheval. Le fait à retenir est que les cavaliers nomades des « steppes-prairies » (opposées aux « steppes sèches ») par R. Grousset (Op. cit.) ou « semi-arides » selon la terminologie de Stuart Legg (le Coeur du monde. Fayard 1975), en l'occurrence les Magyars de Hongrie, ferraient leurs chevaux orientaux au Xe siècle. Ils étaient les héritiers en ligne directe des envahisseurs cavaliers asiatiques venus de Sibérie. Or, Mme B. Lizet dans son livre : le Cheval dans la vie quotidienne, Berger-Levrault 1982, signale, p. 43, que l'on a découvert des fers à cheval dans les tombes des cavaliers nomades de Sibérie, dans la région de Hénisseï et qu'on les date du IXe siècle pour les uns, du XIe siècle pour les autres. Or, que l'on nous pardonne d'anticiper. Les historiens des Mongols ne disent rien sur ce sujet. De sorte que certains « sous-traitants de l'histoire » soutiennent qu'au bas Moyen Âge, la cavalerie des Gengis khanides a « conquis le monde », à une rapidité surprenante : sans ferrer ses chevaux !!! de la Corée à la Pologne par l'Afghanistan et la Hongrie en passant des steppes-prairies aux steppes semi-arides, et en franchissant les monts du Pamir !... Cela est matériellement impossible. Il a été prouvé qu'une cavalerie ne peut faire des étapes longues et répétées, sans ferrure, dans les montagnes au sol rocailleux, et les steppes au sol abrasif. Elle serait en quelques semaines au niveau opérationnel zéro. Bien sûr, il n'est pas question de nier que les chevaux des nomades (aussi bien du Nord que du Sud d'ailleurs), marchant dans les « pâturages », au rythme des lentes transhumances « derrière l'herbe », n'étaient et ne sont pas ferrés. Mme F. Aubin dans son mémoire (op. cit.) sur le cheval en Mongolie aujourd'hui, nous indique que le ferrage des chevaux n'est pas pratiqué. Mais le contexte est différent de celui que nous étudions. Ne confondons pas le nomadisme pastoral et les guerres de conquêtes des cavaliers des mêmes peuples ! - Nous n'ignorons pas non plus que Marco Polo, dans son livre dicté, en 1298, a dit des chevaux de la Perse orientale : « Leurs sabots sont si durs qu'ils n'ont pas besoin d'être ferrés (-) on dit qu'il y a encore peu de temps, on trouvait parmi eux des descendants directs du fameux Bucéphale. » (Mais il précise que tous ces chevaux ont été tués), « de sorte que le monde perdit ce qui était sans doute la meilleure race équine qu'il n'eût jamais connue ». Lui-même ne 1es a jamais vus, et nous rapporte des « on-dit ». Ce que fait aussi L. Gianoli (op. cit. p. 83), auquel nous empruntons cette citation, dans un chapitre intitulé : « Les premières mentions du cheval mongol ». Et c'est ainsi que se propagent d'âge en âge, des erreurs de lecture qui sont la cause d'erreurs historiques. (Voir en annexe le manuscrit tibétain.) Ajoutons une dernière observation. A la fin de sa vie, René Grousset, le grand orientaliste, nous a appris le sens du véritable nom de Gengis Khān : Tamoudjin. Ce nom signifiait en dialecte mongol de son époque: « forgeron ». (L'Empire des steppes, op. cit., p. 639.) Or, cela a un sens chez les nomades cavaliers. Dans les tribus de nomades cavaliers des steppes du Sud, nous avons observé que le forgeron (heddad ou amezyl, selon le dialecte arabe ou berbère) était un artisan protégé. Car c'était lui qui fabriquait et posait les fers des chevaux, et réparait les armes. Ce nom de Tamoudjin, conquérant du monde, nous interpelle ! En conclusion, les chevaux choisis pour la remonte des cavaliers des peuples nomades « en campagnes de guerre », ne pouvaient pas ne pas être ferrés ! C'est ce que prouvent les découvertes archéologiques faites sur le champ de bataille d'Augsbourg ; bataille qui termina les invasions des cavaliers hongrois au Xe siècle. Deux cent cinquante ans avant celles des cavaliers mongols... sur les mêmes itinéraires pour une part.
(2) L'encyclopédie Hachette nous apprend que « hongre » signifie cheval châtré. Au XVe siècle, on disait hongre ou « hongrois », « l'usage de châtrer les chevaux étant venu de Hongrie ». Il est donc important de faire les remarques suivantes : a) les Hongrois, qui sont les plus occidentaux des peuples cavaliers des steppes du Nord ont transmis cet usage aux Européens sédentaires. Dès le XIIe siècle, ces derniers importaient des chevaux de Hongrie. La castration des chevaux est une pratique très ancienne dans les steppes du Nord de la Mongolie à la Hongrie ; b) les peuples nomades cavaliers des steppes du Sud n'ont jamais castré leurs chevaux !!
(3) Duhousset (commandant). Notice sur les chevaux orientaux, Saint-Germain 1862, p. 12.
(4) Ce mors était utilisé par les pères fondateurs de l'équitation française: La Broue et Pluvinel sous le nom de « génette ». Il l'était aussi par les hussards de Frédéric II le Grand.
(5) Grekov et Iakoubovski. La Horde d'Or et la Russie, Payot, Paris 1961.
(6) Grousset. L'Empire des steppes, op. cit., carte n°1 (repris par Braudel, Grammaire des civilisations, Arthaud 1988) a divisé l'Eurasie des nomades en zones : prairies-steppes, prairies sèches, déserts, montagnes, forêts, pâturages. Il est intéressant de continuer sa carte en Arabie et en Afrique avec les déserts du Nefoud. Roub. al. Khali et Sahara, et, les steppes sèches du Nedjd et Syrie, du Sahel et du Maghreb. On constate avec F. Braudel que toutes ces steppes ont été zones de départ des conquérants cavaliers : au nord, les nomade de la « yourte » de feutre (laine de moutons),  au sud, les nomades de la « tente » Khaima (poils de chameaux et de chèvres... ) ; si l'on ajoute que les chevaux de ces différents nomades cavaliers sont différents, élevés de façons différentes... Ces observations de deux grands historiens de ce siècle éclairent nos connaissances sur les nomades cavaliers (voir notre deuxième partie, chap. X).
(7) Il faut noter : a) que l'ethnie mongole sera toujours minoritaire dans l'empire des Steppes, de même que l'ethnie tartare. Il est plus convenable d'appeler l'ensemble des nomades cavaliers rassemblés par Tamoudjin : des Turko-Mongols ; b) que les orthographes varient suivant les auteurs : Gengis ou Genghis, Soubédé ou Souboteï, etc.
(8) R. Grousset. Bilan de l'histoire, Perrin 1974, p. 348. « Le nomade (-) a possédé une avance (-) militaire énorme. Il a été l'archer à cheval. » Avec « la mobilité, l'ubiquité hallucinante de cette cavalerie (-) quand elle est maniée par (-) un Suboteï... » « Plan Carpin et Rubrouk, qui l'ont vu évoluer (cette cavalerie), ont très bien marqué cette décisive supériorité technique. »
(9) Dictionnaire d'art et d'histoire militaire, PUF 1988, voir: Mongols.
(10) Ibn Khaldûn. Discours sur l'histoire universelle, (1332). Traduction Vincent Monteil, t. II, Beyrouth 1968, p. 556. « Depuis que le monde est monde, on a fait la guerre de deux façons - ou bien l'on se bat en avançant en formations serrées, ou bien l'on adopte la technique de l'attaque suivie du repli. » A Aïn Djallut, les Mameluks adoptèrent cette technique préférée des Arabes. Les Mongols la pratiquaient aussi. Mais Baïbars et Qoutouz furent meilleurs généraux que Kitbouqa !
(11) Cette cavalerie mongole était divisée en deux catégories (subdivisions d'armes, dirions-nous aujourd'hui) - 60 % de troupes à cheval, de manoeuvre et de harcèlement : les archers à cheval, pouvant combattre à pied. 40 % de troupes à cheval - de mêlée et corps à corps. Les cavaliers de cette subdivision étaient protégés par une cuirasse « de cuir » et armés de la lance à crochet. Cette cavalerie a été confondue par les historiens européens avec une cavalerie lourde de type occidental. C'est un contresens ! En effet, la cavalerie lourde, ou grosse ou pesante (Warnery, général de Frédéric II. Remarques sur la cavalerie, Paris 1828) est une troupe à cheval, combattant à cheval, mais remontée de lourds animaux et armée d'armes offensives, d'estoc, tels que le sabre « latte » ou la lance à pointer ou de joute. Dans la bataille à l'occidentale (rangée) ou à la chinoise, elle doit « charger » en « haie » ou en « muraille », c'est-à-dire en « masse » pour obtenir la « rupture » par le « choc ». Certains historiens désignent ainsi quelques troupes à cheval de l'Antiquité (avant l'étrier)(?)... Soit ! En tout cas, ce n'était pas le système mongol. Car, en effet, une cavalerie lourde ne peut participer à la manoeuvre stratégique, comme l'a dit Warnery, ce qui était incompatible avec l'organisation de Gengis Khān. Cette infirmité de la cavalerie lourde sur laquelle Warnery a insisté (il écrivait en 1763) fut démontrée dans la campagne de 1812 : « Napoléon fit un désastre dans les steppes russes, car il avait sous-estimé la stratégie de Gengis Khān » (F. Adravanti, Gengis Khān, Payot 1987, p. 326). Il n'avait sans doute pas étudié « les remarques sur la cavalerie », qui lui auraient appris à organiser la sienne différemment, et au moins, à l'utiliser autrement qu'il ne le fit ! - (Le parler populaire a donné un sens péjoratif à l'expression « c'est de la grosse cavalerie » !)
(12) C'est à la bataille de la Kalka, en 1222, où Suboteï écrasa l'armée des princes russes, qu'apparaissent pour la première fois dans l'histoire : les Cosaques. A la vérité, il s'agit des Brodniks (errants - vagabonds) qui, selon Grékov (op. cit.), « étaient probablement des Slaves, habitant les côtes de l'Azov et les bords du Don ». Les historiens russes les considèrent comme les prédécesseurs des Cosaques. Ceux-ci ne formèrent jamais une ethnie originale. Ce furent des populations cosmopolites, formées de proscrits, de déserteurs, de serfs en rupture de ban, de fuyards de toutes espèces, mélanges de toutes les ethnies de cette région du monde rassemblées dans des genres de républiques militaires cavalières. Ils proliféreront dans les steppes d'Ukraine, du Don paisible, du Dniepr (les Zaporogues) et plus tard encore, au Kouban, au Terek et en Sibérie dont ils seront les premiers conquérants. Jaloux de leur indépendance, ils s'allieront tour à tour à tous les pouvoirs qui la leur garantiront. Ils combattront, au contraire, tous ceux qui la menaceront. Mais, en même temps, ne vivant que pour et par la guerre, ils serviront tous ceux qui leur donneront l'occasion de faire des expéditions et de ramasser du butin. Cette mentalité les rapproche beaucoup des véritables Mongols, dont ils héritèrent les vertus cavalières soit en les aidant, mais le plus souvent en les combattant. Sans doute, cela est assez loin de notre sujet et pourtant ! Comment comprendre l'évolution de l'équitation militaire en Europe occidentale, dont les cavaleries succomberont plusieurs fois devant les Cosaques (qui camperont sur les Champs-Élysées), sans connaître ce « peuple », par lequel l'héritage équestre des derniers cavaliers nomades, les Mongols, nous a été transmis et nous a influencés ? Venant de quitter son armée décimée et en déroute, Napoléon, sur la route de Varsovie, confia à Caulaincourt : « ... Tous nos désastres ont tenu à quinze jours et à l'inexécution (sic) de mes ordres concernant la levée de cosaques polonais » (cité par Curtis Cate, 1812, le Duel des deux empereurs, R. Laffont, 1987, p. 404). Quel brevet décerné au système d'armes cavalerie légère cosaque, hérité des Mongols ?... par celui que l'opinion considère comme un très grand capitaine sinon le plus grand ! C'était un Méditerranéen des îles, et non des steppes. Il comprit trop tard ce que devait être une véritable cavalerie. Héritier des Romains auxquels il fit souvent référence, il aurait dû suivre leur exemple... et ne pas s'enfoncer dans le pays des cavaliers (voir chap. II, planche VII).
(13) Rosalind Mazzawi. The Horse in Islamic Art, communication au symposium sur le cheval, organisé par l'Organisation arabe pour le développement agricole, Tiaret ; Algérie 3-4 septembre 1988. On lit parfois « le poney mongol ». C'est une faute grossière de langage. Le mot poney en français classique est réservé aux chevaux de très petite taille (ce qui n'est pas le cas du cheval mongol) des races anglaise, écossaise, galloise... et des îles Atlantiques, que le roi Henry VIII n'a pas réussi à supprimer !... Bien sûr, à notre époque, le Poney Club International appelle poneys des chevaux de toutes tailles, y compris des Pur-Sang anglais de polo ! Cela n'a aucun intérêt historique.
(14) Voir Françoise Aubin. L'Art du cheval en Mongolie, dans Production pastorale et société. Supl. MSH Info n° 19/1986 ; Maison des Sciences de l'Homme, Paris, pp. 129 à 149. Nous citons ce mémoire sur l'élevage et l'usage actuel du cheval en Mongolie car il éclaire ce que les historiens ont écrit sur un passé lointain, souvent mal perçu !
(15) J.-P. Roux. Les Barbares, Bordas, 1982, p. 94. L'idée de la supériorité des nomades sur les sédentaires date d'Ibn Khaldun, au XIVe siècle, elle est reprise ici par J.-P. Roux sous l'angle de l'élevage du cheval.
(16) Ibn Batoutah. Voyages, t. III (géographe marocain né à Tanger [1304-1377]). « Le Diecht-i-Kyptchac est renommé pour ses chevaux (-) ils sont exportés dans de nombreux États (-). Une caravane de chevaux peut compter jusqu'à six mille bêtes (-) malgré les frais de route et les droits d'octroi (-) les marchands de la Horde d'Or réalisent de beaux bénéfices... » Voilà un exemple qui permettrait de dire à un historien en chambre que l'on peut faire voyager de nombreux chevaux en les nourrissant avec l'herbe de la route et le fourrage acheté en chemin ! Oui ! Mais sur des itinéraires choisis, à un rythme lent, donc en temps de paix. En guerre, on ne dispose ni du rythme de la marche, ni de l'itinéraire, ni de l'espace et ni du temps pour s'arrêter et faire paître. On ne peut choisir que ses objectifs. Ceux-ci doivent intégrer la logistique.
(17) A propos de l'organisation et de la logistique de la cavalerie mongole. Cité par L. Gianoli (op. cit., p. 83), Marco Polo, surnommé Il Milione pour ses exagérations (d'après Stuart Legg., op. cit.) nous rapporte : « Chaque soldat mongol possédait dix-huit chevaux ou juments, qui se nourrissaient uniquement d'herbe... » Il devrait être clair qu'il s'agit ici du Mongol dans sa yourte en temps de paix, et non en campagne de guerre. Et pourtant, les historiens, prolixes sur les rations conditionnées emportées par les cavaliers mongols, se satisfont d'explications de ce genre pour la subsistance des chevaux. En effet, comme nous l'avons déjà dit, l'historiographie est en panne sur deux questions primordiales : la ferrure et la nourrlture du cheval en campagne. Ce qui rend vagues et incertaines, sous l'angle de la conduite des opérations, les œuvres les meilleures sur les conquérants des steppes, quand elles ne sombrent pas dans le fabuleux (comme ci-dessus). Pour la ferrure, voir note 1 de ce chapitre. Pour la subsistance des chevaux en campagne, nous savons (général Denis Davidoff, la Guerre des partisans, trad. fran., Paris 1841, p. 67 passim) qu'au-dessus d'un effectif de quinze cents chevaux, une force de cavalerie rencontre de graves problèmes, ce qui réduit ses capacités de manœuvres stratégiques (exemple 1812). Même en admettant la sobriété maximale du cheval mongol, il est impossible d'expliquer, durant la guerre du Khwarezm, en 1220, la traversée du désert Qyzil Qoum par 50 000 chevaux, sans portage de fourrage, ni celle des monts du Pamir par 20 000 chevaux. Ayant pris Boukhara en février, après ces admirables manoeuvres stratégiques, Gengis Khan lui-même s'occupa de l'approvisionnement en fourrage. Il ordonna aux musulmans réunis à la Grande Mosquée: « Vos prairies n'ont pas de fourrage. Ouvrez vos greniers et vos granges. Nourrissez nos chevaux » (F. Adravanti, op. cit. , p. 250). Il est bien entendu que les bons chevaux de guerre de troupe mangent toutes les céréales blé, seigle, avoine, orge, riz, millet... et même des dattes, des pois secs, etc. (ce que nous savons par expérience). Ceci étant, il est hors de question que des chevaux de cavalerie en campagne et en gros effectifs subsistent sans logistique (approvisionnement et maintenance). Les objectifs successifs qui marquent les campagnes de Gengis Khān et Suboteï devraient être analysés sous cet angle. Mais ce n'est pas notre sujet (voir annexe : le manuscrit tibétain).
(18) P. Diffloth. Zootechnie. Races chevalines, 5e édition, Encyclopédie agricole, Baillère et Fils, Paris 1923.
(19) Encyclopédie Hachette, 1982, p. 561.
(20) R. Glyn. Les Plus beaux chevaux et poneys, Horizons, Paris 1972, p. 210.
(21) P. Diffloth. Op. cit., p. 79, note 1. L. de Simonoff, op. cit., planche XV. En 1889, le lieutenant Pechkoff a rejoint Saint-Pétersbourg à partir de sa garnison sur le fleuve Amour. 8 838 km en 193 jours sur le cheval sibérien Serko (14 ans. 1 m 37).
(22) Bien entendu, ce prétendu standard n'est qu'un mot! L'on ne saurait ramener le cheval des Mongols à un seul type. Nous savons qu'ils ont utilisé tous les chevaux qu'ils ont trouvés dans leurs conquêtes. Cependant, les « signalements » donnés par ces différents auteurs concordent au moins sur le format, la taille, les proportions.
(23) F. Aubin, op. cit., pp. 129 et suivantes, estime le cheval mongol à 135 cm et à 350 kg environ.
(24) Lefebvre des Noëttes, op. cit., fig. 290.
(25) Encyclopédie Hachette, op. cit., p. 521. Yuan, dynastie mongole de la Chine ; 1280-1368.
(26) Voir F. Aubin. Op cit.
(27) a) Voir Tavard, Gianoli, Edwards, Mazzawi, op. cit. b) Les Hussards, par Y. Barjaud, Paris, Caracole 1988. pp. 280-281. La selle hongroise (premier Empire), description de M. Boulin. Fondateur du Musée international des Hussards, p. 37. « La selle hongroise élève son cavalier et le soutient devant, comme la selle mongole...
(28) Ce point est essentiel : il marque la différence fondamentale entre l'équitation mongole et arabe, les deux équitations de guerre qui ont été les plus fiables et performantes selon l'expression en usage. La première se caractérise par un équilibre sur les épaules. La seconde par l'équilibre dit « de campagne », également réparti entre les épaules et les hanches. La première exclut donc toute idée (et même possibilité) de « rassembler » ! - L'école française militaire de Beauchesne (1905) rejoindra cette conception. La seconde porte en elle l'équitation rassemblée, ce qui rend crédible les airs d'école décrits par Abu Bekr. Le Naceri, au XIVe siècle ! (Voir chap. IV.)
(29) Tavard. Op. cit., p. 102.
(30) Les cavaliers asiatiques n'ont pas conçu le mors comme un frein ! Leur conception de l'équitation se situe ainsi à l'opposé de celle des Occidentaux de l'Antiquité et de leurs héritiers du Moyen Âge (voir la thèse magistrale de P. Vigneron, op. cit.). Voilà un fait de civilisation d'une importance considérable. Par contre, montant des chevaux de sang de taille normale (1 m 45 à 1 m 50), les Arabes du Mashrek et du Maghreb ont été dans l'obligation d'employer un frein, très élaboré, la bride à anneau gourmette, qui permet aussi - pour d'autres raisons - de libérer les mains pour tirer à l'arc ou au fusil ! Pour fixer les idées, il faut savoir que la taille des chevaux de cavalerie légère dans l'armée française était fixée, en 1863, à 1 m 48, 1 m 51. Références A. Vallon, Cours d'hippologie, Paris 1863.
(31) James Chambers. Les Cavaliers du diable, l'invasion mongole en Europe, Payot 1988. L'auteur fait la synthèse des connaissances actuelles sur l'organisation et la stratégie, ainsi que la tactique de la cavalerie mongole. Silence complet sur l'équitation et erreur habituelle sur la soi-disant cavalerie « lourde » mongole ! Quant à la logistique, elle est aussi occultée. Ce qui est un manque sérieux pour une histoire militaire !

NOTES DU CHAPITRE VII

(1) Voir chap. V. Duguesclin et note 28 du même chapitre.
(2) E.J. Roux. Le Cheval Barbe. Librairie d'Amérique et d'Orient, Paris 1987. L'auteur, dans sa deuxième partie. écrit l'histoire de la conquête de l'Amérique par le cheval Barbe-Andalous, et le système équestre maghrébin.

DEUXIÈME PARTIE

NOTES DU PRÉAMBULE

(1) Le lecteur aura compris que, pour nous, on ne peut parler d'équitation, qu'à partir du jour où les cavaliers ont disposé de la selle avec étriers et du mors...
(2) Voir Cheval et tradition en Algérie, ministère de l'Agriculture, Alger, janvier 1988.
(3) Voir Analyse du discours français sur l'équitation arabe, par Denis Bogros. In Des chevaux et des hornrnes, équitation et société, Caracole 1988. Colloque d'Avignon.

NOTES DU CHAPITRE VIII

(1) En vérité, ces deux brochures, l'une du directeur de l'école d'équitation de Saumur, l'autre du directeur de l'école de Vienne, portent des titres impropres. La maladie qui frappe actuellement notre langage, l'enflure des mots, y  est sans doute pour quelque chose. La première intitulée « doctrine », n'est, en fait, qu'un inventaire des principes et procédés qui seraient propres à l'équitation française et une suggestion : prendre en compte l'apport de l'équitation sportive moderne. Ce dernier point est intéressant. La seconde intitulée « dogmes » est une réflexion sur les rapports du dresseur et du cheval. Excellente analyse qui sera utile à beaucoup de débutants. Il ne s'y trouve aucun dogme, grâce à Dieu... mais on y trouvera de bons conseils... Fuyons les doctrinaires et les dogmatiques !
(2) A propos de « la doctrine » Fuyons les doctrinaires ! ... Mais la doctrine nous rattrape. Ainsi le veut ce siècle. Dans sa livraison de décembre 1988, le Bulletin d'information « 28 » des Amis du Cadre noir, relance le débat public en France et en Europe ! - Il diffuse un texte du colonel Margot qui circule, il faut le savoir, depuis les années 70. Intitulé La Doctrine équestre française. C'est un très beau texte, que tout dresseur doit avoir lu. Il peut s'analyser comme un commentaire des chapitres, très courts, II et III, des « questions équestres ». Dans ceux-ci, L'Hotte définit l'art équestre, ainsi que la soumission, l'impulsion, la flexibilité qui doivent être les qualités du cheval de selle en général, mais dans des mesures différentes selon l'emploi auquel on le destine. Puis il aborde : le ramener, le rassembler et le cheval droit, ce qui le conduit, naturellement, à l'équitation dite savante, qui a sa marque dans la parfaite légèreté. Mais L'Hotte ne donne pas le nom de doctrine à cette remarquable théorisation de l'équitation. A son époque, on n'employait pas ce mot, mais celui de « principes » (au pluriel). Pour lui, ils sont « premiers » (op. cit., p. 2). Pour lui, il y a ceux de Daure et ceux de Baucher (p. 242, Un officier de cavalerie) pour ce qui concerne les deux équitations qui furent - au manège de Saumur - l'objet principal de sa réflexion et de sa pratique : l'équitation de campagne et l'équitation savante. On sait qu'au 18e de Dragons, il s'appliqua plus particulièrement à l'équitation militaire... Il apparaît donc que le très beau texte du colonel Margot ne concerne que l'équitation savante, de haute école, artistique, ou haute équitation, « comme on voudra l'appeler », écrit L'Hotte lui-même (op. cit., p. 35). Car il faut dire que « la doctrine équestre française », si doctrine il y a, ne s'applique qu'à la discipline dite du dressage. Discipline qui intéresse peu de cavaliers en notre pays, ce qui est bien dommage. Mais c'est un fait. Dès lors, tout est clair et nous voilà en paix ! A ce propos, il n'était peut-être pas utile de relancer une dispute franco-germanique ? Surtout quand on sait que le général Decarpenty, maître français du XXe siècle, a écrit de l'écuyer en chef Lindenbauer de l'École espagnole de Vienne : « Ses chevaux exécutent tout leur travail sur des rênes à peine tendues, dans cette parfaite légèreté qui reste l'essence et la pierre de touche de la véritable Haute École » (l'École espagnole de Vienne, Rennes 1947, p. 43). Quand on sait aussi qu'en 1946, Decarpenty confiait au colonel Cavaillé, qui devait conduire nos équipes aux victoires des JO de 1948 et l912, que « les Allemands étaient dans le vrai en dressage », 1946-1988 ? Decarpenty voyait très loin ! Pour conclure, le dernier mot reste au colonel Margot qui écrit au début de son article : « Toutes les écoles sont d'accord, la divergence est dans le style. » Eh bien ! Il faut remettre en honneur le style français !
(3) Le doute cartésien. La République équestre française admet le débat. En 1972, dans son numéro 85. la très officielle revue l'Éperon a publié un texte qui avait circulé sous le manteau pendant des années ! Réflexions sur l'instruction équestre « Et si les "MAÎTRES" avaient tort ? » par le général Donnio. Page 25, il écrit: « Qu'on nous laisse en paix avec l'école française.... » Cela mérite une lecture !

NOTES DU CHAPITRE IX

(1) Les Numides... qui, remarquons-le, furent les seuls cavaliers de l'Antiquité à n'avoir pas su inventer le mors !
(2) Cavalerie : troupes à cheval, agissant de façons coordonnées, capables de faire des raids et, plus tard, après l'invention de l'étrier, capables de combattre à cheval. Les troupes à cheval, sans selle ni ferrure, avaient un rayon d'action réduit et peu d'autonomie. Une muraille suffisait à les arrêter. Elles ne pouvaient pas la contourner ! Ce que fera facilement Gengis Khān et sa véritable cavalerie.
(3) Voir Paul Vigneron. Op. cit. et Valérie Courtot. Des chevaux et des hommes, Caracole 1988, p. 104. Sur le plan du harnachement et de la ferrure, la fin de l'Antiquité transmit toutes les techniques qui permirent et expliquent pour une part, la libération des forces vives des peuples nomades cavaliers.
(4) Les systèmes équestres, arabe et mongol, furent opérationnels dès le VIIIe siècle pour le premier, a partir du XIIIe pour le second.
(5) Équitation classique qui, en Espagne, sera appelée « à la stradiote » et « à la brida » en opposition à l'équitation « à la jineta ». Cf. Des chevaux et des hommes, op. cit., p. 73.
(6) Auxquels il faut ajouter Mottin de La Bali-ne et Bohan
(7) Beauchesne et ses continuateurs: Champsavin et d'Urbal. « Le lecteur voudra bien, dès lors, ne pas taxer d'ingratitude les objections faites aux procédés génériques (sic) de notre grande école », (Saumur) - Beauchesne (gal de) Dressage du cheval d'armes, Paris 1905.
(8) D'Auvergne : Père de l'équitation militaire en France. Il semble avoir été le seul à analyser le système équestre français, dans sa globalité : humaine. économique et tactique. C'est-à-dire en tenant compte de la pensée militaire française - du cheval de remonte produit en France - et du cavalier français tel qu'il était... au XVIIIe siècle. A partir de cette analyse, il conçut une équitation militaire différente de celle enseignée jusqu'alors. Les documents dont nous donnons des extraits ci-dessous (Archives de la guerre, Vincennes, Référence dossier « Écoles de cavalerie » [20 pièces]. Cote MR 1732) sont écrits de la main de d'Auvergne. Ce qui est émouvant. En 1769, mémoire intitulé Observation sur l'équitation par M. d'Auvergne. « ... en parcourant l'histoire militaire de ce corps (la cavalerie), en réunissant tous les avis des officiers supérieurs tant par leurs connaissances (sic) que par leurs grades, il nous paraît démontré que la cavalerie française est faite pour combattre en masse. Il est aisé d'en donner les raisons :

l - Le cheval fait le cavalier. L'espèce que le royaume produit est inférieure à celle des contrées du Midi, et n'est pas susceptible de cette légèreté et de cette vigueur qui nous fait regarder ces derniers comme les premiers chevaux du monde. (Il s'agit à l'évidence des chevaux Barbes et Arabes.)
2 - Le peu d'habitude qu'ont nos cavaliers, fait qu'ils ont cette maladresse à cheval que n'ont point les hommes des nations qui élèvent beaucoup de chevaux. Ces deux raisons, ce me semble, suffisent pour prouver que notre cavalerie ne peut combattre qu'en masse. » (17) Plus loin, il écrit : « On bannira surtout toute espèce d'aires de manège (-) en général on rejettera tout ce qui assouplit trop le cheval, tous les effets de main qui peuvent, ce qu'on appelle, le mettre sur les hanches, il doit être soutenu et relevé par les effets de jambes (-) l'instruction du cavalier dans le manège se réduira donc :- à lui donner la position (-) et (à) l'affermir,- à lui faire connaître l'effet de ses mains et de ses jambes, tout cela en le faisant aller au pas et au trot. Quand il sera affermi (-) on le sortira du manège pour l'exercer par petites troupes au galop (-).Quant à l'instruction du cheval, elle suivra les mêmes degrés. »

Plus loin il revient sur deux idées maîtresses : « Les effets de la main doivent être réservés pour les arrêts et demi-arrêts... indispensables dans les manoeuvres (-). » - « Le choc étant le seul effet qu'on se propose d'obtenir de la cavalerie ». Dans le même dossier, on trouve un autre mémoire qui semble de la main de d'Auvergne (?), en date du 26 février 1769, où l'auteur revient sur l'emploi de la cavalerie française. « La cavalerie n'est point destinée à combattre corps à corps, elle est constituée pour combattre en masse et par rang. Son but principal est la charge. Tous les autres objets auxquels elle est employée à la guerre sont des accessoires de celui-la (-). C'est d après ces bases que toute son instruction doit être dirigée sur l'objet essentiel que l'on se propose... »
  
En 1774, d'Auvergne écrit un nouveau mémoire (même référence-même cote) : Instruction pour un régiment de cavalerie relativement à l'équitation. C'est une progression pour l'instruction du cavalier et le dressage du cheval, en application de l'Ordonnance du roi pour régler l'exercice de la cavalerie du 1er juin 1766. Cette ordonnance a été rédigée à partir des travaux de Drummond de Melfort. Pour la première fois, un chapitre est consacré à une « instruction pour l'équitation » (23 pages). Cette ordonnance est signée Choiseul, secrétaire à la guerre ? En conclusion, il faut ajouter : si d'Auvergne a été le simplificateur de l'équitation française pour l'adapter à la guerre, et si le duc de Choiseul fut le réformateur, le marquis de Castries, général inspecteur, fut l'homme de terrain. Dans ses rapports d'inspection (même dossier MR 1732), il résume remarquablement la question du système équestre militaire. Il a écrit :

   en 1770 - « ... adopter une équitation militaire plus adaptée aux hommes, aux chevaux, et à l'objet que la cavalerie a à remplir à la guerre. »
   en 1771 - « ... sans équitation, on n'a pas de cavalerie (-) avec trop d'équitation, on n'en a pas davantage. »

(9) Baucher. Il doit être considéré comme le véritable continuateur des maîtres de la Haute École. Le général L'Hotte a été clair à ce propos (voir note 10). En effet, son équitation fut avant tout celle du paraître, de la « poésie de l'équitation ». Donc, s'il existe une doctrine française de Haute École, il faut la chercher dans la lignée La Guérinière-Baucher, qui ont chacun marqué leur siècle. C'est ce qu'a fait le colonel Durand (op. cit.). Mais la véritable question qui a été posée au siècle passé ne fut pas celle de l'équitation « savante » qui ne concernait qu'un petit nombre de cavaliers. Ce fut celle de l'inadéquation entre la production chevaline et la demande de la remonte. De cette inadéquation proviendront les difficultés de l'armée pour faire une cavalerie métropolitaine opérationnelle, avec un matériel chevalin inadapté. Cette question (18) avait des racines profondes dans le passé. Les écuyers du XIXe siècle ont tenté d'y répondre par la seule équitation (sauf d'Aure qui s'intéressa autant à l'élevage qu'à l'équitation !). Baucher et ses disciples ont prétendu appliquer une méthode nouvelle valable aussi bien pour le cheval de Haute École que pour le cheval de guerre de troupe. Malgré l'interdiction officielle, le « Baucherisme » se diffusera dans l'armée. Ce fut la source d'une grande équivoque qui entraînera bien des querelles. L'Hotte, le disciple préféré, fut le seul à refuser la confusion entre les différentes équitations (voir note 10).
(10) L'Hotte. Quoi qu'on ait pu en dire, l'enseignement équestre du général L'Hotte pose une énigme ! Mennessier de La Lance (op. cit., T. II, p. 107) qui a servi sous ses ordres nous parle d'ailleurs du « conflit intérieur qui a nui à l'expansion de son enseignement ». En vérité, élève de Baucher et de Daure, L'Hotte a posé problème à tous ses successeurs. Ceux-ci s'interrogent encore au sujet des équitation de ses deux maîtres et de leur place dans une soi-disant doctrine française ? Doctrine que L'Hotte aurait fait naître de leur synthèse, mais qu'on ne trouve exposée nulle part dans ses écrits. Formateur des formateurs, comme instructeur en chef d'équitation de l'école de cavalerie, puis comme commandant de cette école, il n'a enseigné - en principe - que l'équitation militaire. Il lui a consacré d'ailleurs un chapitre entier des « questions équestres », le chapitre XI : « Méthode abrégée et simplifiée pour le dressage (sic) des recrues » selon l'analyse de Mennessier de la Lance (op. cit., t. II, p. 108). Cette méthode fait irrésistiblement penser à celle de d'Auvergne (note 8). Membre influent de la Commission du règlement de 1876, dont il fut l'expérimentateur et le principal rédacteur, il a - dans le tome 1 - réduit l'équitation militaire : à l'instruction du cavalier du rang, et au dressage du cheval de troupe, reliant l'une à l'autre. (Questions équestres, Plon 1906, p. 152). On sait, par ailleurs, qu'il a pris d'importantes responsabilités dans la réorganisation de la cavalerie. (Il était général inspecteur, en 1881, et président du comité consultatif en 1886). En particulier en s'opposant, avec succès, à ceux qui voulaient la suppression des cuirassiers (suite logique de celle des lanciers en 1871), pour faire une cavalerie légère complétée d'une cavalerie de dragons et carabiniers, selon le modèle performant américain de la guerre de Sécession. (Voir chap. V, note 28). (Voir le Concile de Tours : P.V. de séances tenues à Tours sous la présidence du général de Galliffet, 1881 ; Berger-Levrault.) (Voir « les Grandes Heures de la cavalerie française, » gal de Cugnac, p. 17. Revue historique de l'armée, août 1957.) Option qui fut lourde de conséquences. Au total, un personnage historique énigmatique. Conservateur avec les cuirassiers, progressiste avec Baucher. Un maître parmi les maîtres, mais qui ne fit pas de disciples (M. de La Lance: op. cit., t. II, p. 107, note 1). Autant de contradictions qui établissent le mystère L'Hotte. Pour résoudre cette énigme, au moins quant à sa pensée équestre, il faut pratiquer la lecture littérale, au pied de la lettre, de ses publications posthumes (selon sa volonté !). Dans Questions équestres (op. cit., pp. 169-170), contrairement à l'idée répandue en France de l'unité de l'équitation, le général L'Hotte la divise. Pour lui, il y a quatre équitations: La haute équitation. L'équitation de campagne, L'équitation de course et L'équitation militaire.Dans Un officier de cavalerie (Plon 1905, chap. XVIII, p. 246), il écrit: « Suivant que l'équitation de campagne ou savante (c.-à.-d. haute !) est envisagée, la préférence doit donc être donnée aux principes de d'Aure ou à ceux de Baucher. » D'Aure a été le maître de l'équitation de campagne, que l'on appelle de nos jours « d'extérieur » ou « sportive ». Baucher a été le maître de la Haute Équitation. L'équitation militaire a eu pour maître d'Auvergne (voir note 8) et pour continuateur, au XXe siècle, Beauchesne. Elle passe, au XIXe siècle, par L'Hotte qui l'a enseignée et décrite comme une équitation « d'usage ». Nous ne connaissons pas de maître à l'équitation de course, que L'Hotte signale pour mémoire..., semble-t-il. Ainsi, L'Hotte se situe exactement à la croisée des quatre équitations, et de tous les courants de pensées. Il s'efforce de bien les distinguer. La soi-disant synthèse est une invention de ses hagiographes ! Toutes ces équitations existent encore de nos jours. Les responsables des programmes des examens seraient bien inspirés de tenir compte de l'analyse de L'Hotte, pour les adapter à chacune.
(11) On notera que L'Hotte ne confond pas l'équitation de campagne avec l'équitation militaire comme le font ses commentateurs contemporains.
(12) La querelle d'Aure-Baucher. - La querelle de « cent ans » : haras nationaux de l'agriculture et remontes militaires de la guerre. - La querelle de l'artillerie et du génie à propos des pontonniers (spécialistes de l'attelage) que voulait récupérer le génie.
(13) Lt-colonel Blacque-Belair. A propos du nouveau manuel d'équitation et de dressage. Revue de cavalerie, 1912. La loi de 1905 fixait le service militaire à deux ans !
(14) On notera les mots : méthode, procédés... Le mot doctrine n'est pas employé.
(15) Considérations sur l'équitation militaire allemande et l'équitation militaire française. Observons d'abord que le système équestre mongol n'a pas eu besoin de maîtres-écuyers, et que si le système arabe en eut quelques-uns, ils ont simplement décrit les méthodes et procédés d'une équitation parvenue à maturité par la pratique (sans écoles) afin qu'elle ne se perde pas. On en voit l'heureuse influence de nos jours, au Maghreb, où l'on assiste à un prodigieux retour à l'équitation traditionnelle. Par contre, les écuyers allemands et français du XVIIe au XIXe siècle, par des chemins différents, ont fait des efforts permavents pour adapter la technique de l'équitation aux chevaux produits par leurs élevages nationaux, et aux cavaliers fournis par le recrutement de leurs armées !! En France, d'Auvergne (note 8) est particulièrement clair sur ce sujet. On peut ajouter à ces observations ce fait troublant, qui témoigne, après d'Auvergne, de Bohan, de Gasté, de la mauvaise qualité de la production française de « cheval de selle de guerre de troupe ». à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. A cette époque, en effet, on constate un foisonnement des enrênements. Or, ils portent pour la plupart le nom d'un officier-instructeur de la cavalerie... Chambon-Chervet-Colbert-Féline-La Beaume... Est-ce le hasard ! Non ! Ceci explique cela - On n'a jamais vu un enrênement en équitation arabe ! Pourquoi? Parce que les chevaux sont bons. Ces deux cavaleries (française et allemande) ont souffert de ne posséder ni bons cavaliers de troupe, ni bons chevaux de guerre (en quantité suffisante). Ce qui explique leurs contre-performances au début de la Première Guerre mondiale (La Marne !). Seules les cavaleries occidentales, héritières directes des systèmes équestres orientaux, peuvent être créditées de victoires : celle des Cosaques issue du système mongol/tatar, et celle d'Afrique du Nord produit du système arabo-maghrébin : 1916. La cavalerie cosaque du général russe Broussiloff fait « prisonnière toute une armée autrichienne » (P. Diffloth, Races chevalines, Paris, Baillère et Fils, 1923) - 1918. La cavalerie des chasseurs d'Afrique et des Spahis marocains du général français Franchet d'Esperey fait capituler la XIe armée allemande sur le front d'Orient. (Jouinot-Gambetta-Uskub. Berger-Levrault, Paris 1920.)
(16) D'Aure ou Daure ? La première orthographe est celle employée par le général L'Hotte. La seconde est celle de l'état civil sous le premier Empire. Dans le registre matricule des élèves incorporés au Prytanée impérial de St-Cyr (La Flèche) : 1807-1814, on peut lire Matricule 497 - 3 Bon - 4e Cie DAURE-CARTIER. Antoine, Philippe, Henri, Léon. Ce jeune homme est parent à M. Dante, commissaire-ordonnateur. L'An dix-huit cent sept, quatorze septembre, le jeune Daure-Cartier Antoine, Philippe, Henri, Léon, né à Toulouse le 3 juin 1799, de Antoine et de Rose-Claire Barthelemy-Gouraud. Nommé élève du gouvernement au Prytanée par décret impérial du 10 septembre 1807. Y a été admis en cette qualité. M. son père est mort lieutenant de la gendarmerie du département de la Haute-Garonne. M. Pons (avocat), son beau-père, demeure à Paris, rue Coqueron n° 8. Il se charge de la correspondance. Il a remis l'enfant entre les mains de M. le général commandant et a signé. A St-Cyr les jours, mois et an que dessus. - Dictionnaire Hachette. AURE = vallée des Hautes-Pyrénées drainée par La Neste d'Aure qui conflue avec la Garonne.
(17) A propos de la remonte. Il est étonnant de noter qu'un sociologue moderne, étudiant l'équitation dans le contexte économique, politique et social du XVIIIe siècle, parvient (sans le connaître, car il ne le cite pas !) à la même analyse que d'Auvergne. Ce qui confirme que ce dernier a été le seul maître à élargir sa réflexion aux dimensions du système équestre national. En effet, Jean Lagoutte (op. cit., p. 109) évoque : « les difficultés de la remonte et du recrutement », et conclut : « Faute d'une remonte homogène et facile, l'armée ne peut assurer l'homogénéité de (la) doctrine équestre. » C'est à cette époque que l'équitation française s'est divisée en plusieurs équitations, comme L'Hotte en fera le constat (voir note 10). De sorte que : il n'y a pas une équitation française mais plusieurs ! « L'unicité de la doctrine est bien morte » (ibid). La sociologie confirme l'étude critique des traités d'équitation.
(18) Cette question devrait faire l'objet d'une recherche. L'ouvrage pourrait s'intituler: De la remonte de la cavalerie française, du colonel d'Auvergne au général Wattel. Le général Wattel (1878-1957) fut le plus grand écuyer français de ce siècle, écuyer en chef de l'école de cavalerie de Saumur ; il fut le dernier général inspecteur du service de la remonte du ministère de la Guerre (créé, en 1831, par le maréchal Soult, ministre).
(19) Brack (gal F. de). Avant-postes de cavalerie légère. 1e édition : Paris 1831. Dans la postface de cet ouvrage célèbre, de Brack revient sur les questions: de la remonte, du harnachement, du système équestre cosaque. Il écrit : « Les chevaux de charrette ne doivent pas être admis dans nos rangs... » Il faut des chevaux « élevés dans les lieux les plus arides et les plus accidentés de France... ». Sur ces deux points, il ne fut pas entendu. La cavalerie française métropolitaine sera toujours remontée des rebuts de la charrette. Il écrit aussi qu'il faut « simplifier la selle ». Il dit son admiration pour le système des Cosaques, contre lesquels il a combattu : « Je vous ai cité les Cosaques, et vous les ai présentés comme des modèles parfaits. » C'est pourquoi il exprime - en 1831 - un espoir « que le gouvernement... enverra aussi des officiers choisis, reconnaître chez les peuples cavaliers toutes les améliorations que nous pouvons nous approprier... ». Ce vœu sera exaucé par l'histoire, puisque, pour conquérir le Maghreb, l'armée française organisera sa meilleure cavalerie sur le modèle du peuple cavalier arabomaghrébin. Elle l'utilisera partout avec succès jusqu'à la fin de cette arme.

NOTES DU CHAPITRE X

(1) Le sujet traité dans ce chapitre a fait l'objet, pour l'essentiel, d'une communication au symposium de l'Organisation arabe pour le développement agricole (OADA), qui a eu lieu à Tiaret (Algérie) les 2-3-4 septembre 1988.
(2) Lieutenant général Thiébault. Manuel général du service des états-majors (rédigé en 1813). Chapitre « Du commandant de la cavalerie et de cette arme en général » (cité par Flavien d'Aldeguier. Des principes de la cavalerie, Paris 1843). Page 472 : essayant de mesurer la capacité opérationnelle de la cavalerie (française), le gal Thiébault écrit : « ... Sur cent hommes pris au hasard, il n'y en a, en général, que vingt-cinq (-) qui, maîtres de leurs chevaux (-) chargent franchement... » Page 478 : le gal Thiébault met le doigt sur l'insuffisance des cavaliers français qui rend la cavalerie fragile. « Nous débuterons (-) par une observation que l'expérience justifie ; c'est que le feu et le fer de l'ennemi ne détruisent pas (plus) la cavalerie à la guerre (-) c'est le manque de soins qui occasionne (-) les plus grandes pertes !! » Page 479: « ... Le manque de ferrage est ce qui détruit le plus rapidement les chevaux... » Flavien d'Aldeguier (même page) cite l'exemple suivant : « Faute de ferrage, deux mille dragons et chasseurs, partis de Bayonne le 1er novembre 1807, arrivèrent le 1er décembre suivant à Lisbonne, réduits à six cents hommes (sic) en état de service. » Ce dernier fait historique est la meilleure conclusion aux exposés que nous avons faits : Chap. IV note 2 et chap. VI note 1: A propos de la ferrure.
(3) Sauf, me dira-t-on, pour la cavalerie de Frédéric le Grand ! Ce fut certainement sous tous les rapports, et selon tous les critères du « système équestre » : hommes, chevaux, harnachements, équitation, la meilleure cavalerie d'Europe occidentale (Frédéric achetait ses chevaux de cavalerie en Ukraine comme en témoigne Warnery (op. cit.) et ses hussards utilisaient le mors arabe à anneau-gourmette comme nous l'apprend Weck (op. cit.)). Mais il faut ajouter le correctif suivant : super opérationnelle oui ! Mais sur théâtre européen et dans le cadre des guerres dynastiques ! Frédéric s'est bien gardé de sortir de ce théâtre d'opérations.
(4) Anne Grimshaw, op. cit., p. 97, signale : « ... les pertes épouvantables en Afrique du Sud de 340 000 animaux » (chevaux et mulets), durant ce que nous appelons, en France, « la guerre des Boers », de 1899 à 1902, soit moins de quatre ans. Quatrevingt-dix ans après Napoléon, la cavalerie britannique a atteint un niveau de pertes, comparable - dans le temps et l'espace - à celle de la cavalerie de la grande armée. Exemples historiques incontestables et incontournables de deux systèmes d'armes occidentaux non opérationnels parce que fondés sur deux systèmes équestres mauvais : soit par les hommes, soit par les chevaux, soit par les harnachements et les techniques (blessures de dos et de pieds), soit par une équitation de mauvaise qualité (thème de la fin du xixe siècle).
(5) Cheval et tradition en Algérie, Caracole 1988.
(6) F Braudel, La Grammaires des civilisations, Arthaud-Flammarion 1987.
(7) R. Grousset, l'Empire des steppes, Pavot 1939 ; thèse reprise par Stuard Lebb.
(8) Attention. Nous réduisons la zone intermédiaire à ce que fut autrefois le Khwarezm et le Khorassan. Ne pas confondre avec la « région intermédiaire » de Dimitri Kitsikis dans son excellent ouvrage sur l'Empire ottoman. PUF 1985.
(9) P. Diffloth. Zootechnie, races chevalines. Encyclopédie agricole, Paris 1923, qui en fait la remarque. Mais il faut la ramener aux temps postérieurs à l'Antiquité, après la création du cheval arabe.
(10) D. Bogros, les Chevaux des Arabes, op. cit.
(11) Ibid, pp. 32 et suivantes.
(12) R. Dussaud, les Arabes en Syrie avant l'Islam, 1907.
(13) Cité par Wentworth (Lady) The Authentic Arabian Horse 1962.
(14) Notitia dignitatum utruisque imperii, rédigée de 425 à 453 sous Théodose le Jeune.
(15) E. Renan, Mahomet et les origines de l'islamisme, Paris 1852.
(16) Dans Al Kitab al akoual, manuscrit de la B.N. de Paris, daté de 1327, et cité par Perron (op. cit.), on rapporte que le Kesra Barwiz (Perse sassanide) (590-628) avait un cheval du nom de Chebriz... « A chaque fer, il avait huit clous. » La technique du fer à cheval fut transmise aux Arabes dans le royaume de Hira, (c.-à-d. en Syrie-Irak) à cette époque. Les Européens, qui n'ont fait de recherches qu'en Europe, ont posé en principe que le fer n'est apparu qu'au IXe siècle à Byzance. Mais ils ont négligé toutes les sources arabes.
(17) C'est pourquoi il n'est pas sérieux de parler d'étriers avant l'invention de l'arçon. C'est ainsi qu'une « selle de feutre » ne peut être équipée d'étriers. Donc, ce n'est pas une selle, c'est un ephippion. (Xénophon, De l'art équestre, Delebecque, Paris 1950.)
(18) Il est bien entendu que nous savons, comme tout le monde, que le nomade « en paix » ne ferrait pas ses chevaux, et montait sans selle. Mais nous parlons des Arabes de la cavalerie de l'Islam conquérant. Le lecteur observera avec intérêt les planches numérotées de XXI à XXVIII.
(19) Abu Bekr ibn Bedr, al Naceri, op. cit.
(20) Voir planche XXIII du XIIIe siècle. Voir Descoins. l'Équitation arabe, Paris, 1924, p. 141.
(2l) Ibn Hodeil l'Andalusy, la Parure des cavaliers, op. cit., p. 147.
(22) Voir Pluvinel, l'Instruction du roy, Paris 1625, planche « Le mors génette ». Voir Weck, la Cavalerie à travers les âges, Lausanne 1980. Planche p. 171 : « Le mors arabo-turc des Hussards de Frédéric le Grand ! »
(23) Génetaires : cavaliers militaires espagnols qui montaient et combattaient selon le système arabe : chevaux, armement, harnachement, équitation... mutatis mutandis.
(24) Voir E.-J. Roux, le Cheval Barbe. Destrier de la conquête musulmane, sa descendance et son expansion en Amérique, Maisonneuve, Paris 1987. Au sujet de la selle, on note : 1) - que les selles dites mexicaines et westerns sont de filiation maghrébine pour ce qui est de l'essentiel: l'arçon ; 2) - l'autre selle orientale de type hongrois marquera à peu prés toutes les selles d'armes occidentales jusqu'au Canada ; 3) - une exception célèbre : la fameuse Mc Clellan de l'US-Cavalery qui est totalement maghrébine !  4) - arçon unique au monde : en cuir ! Celui des gauchos (voir Tavard, op. cit.).
(25) Voir : - L'Empire des steppes de R. Grousset. - Histoire des Mongols de Rachid ed Din, XIVe siècle. - Le Roman de Baïbars (tradition du Caire, de Damas et d'Alep), éditions Sindbad 1988. - Dictionnaire d'art et d'histoire militaire, PUF, Paris 1988, aux XIIe et XIIIe siècles, l'art de la guerre et la cavalerie chez les Arabes furent à leur apogée.
(26) G. Le Bon : médecin, ethnographe, psychologue français. L'Equitation actuelle, 5e édition, Paris 1922. « ... Pour connaître les principes d'équitation adoptés dans un pays, il faut étudier nécessairement son équitation militaire. »
(27) Blomac et Bogros, l'Arabe, premier cheval de sang, Paris, Grépin Leblond 1978.
(28) Les documents iconographiques que nous présentons démontrent que l'appui sur l'étrier ne fut employé systématiquement qu'à partir du Xe ou XIe siècle, et ne fut représenté qu'à partir du XIIe siècle.
(29) Il est intéressant de noter : 1) que ce sont les Arabes qui, les premiers, ont défini « le tenir de la tête dans les mains », ce qui est « la mise en main » (en tirant sur les textes, certains Européanistes diront que c'est Xénophon. Bien sûr !) ; 2) qu'au XVIIIe siècle, les Français définirent « le tenir des hanches dans les jambes » ; 3) et que le maître des maîtres. La Guérinière, a conclu en écrivant : « Un cheval est dans la main quand il est dans les talons. » Ce qui est implicite en équitation arabe, par leur position, les jambes et les talons tiennent les hanches en permanence. (Voir Marey-Monge, fondateur des Spahis, 1852, lettre, les Chevaux du Sahara, Daumas, p, 10.)
(30) Cheval et tradition en Algérie, op. cit.Rôle et histoire du cheval Barbe au Maroc. par le Pr  A. Sedrati, colloque international d'Alger, Juin 1982 ; Revue Maghreb vétérinaire, numéro de février 1988. Le Pr Sedrati fait la même remarque que nous, à propos de la « perversion du folklore exploité pour le tourisme ».
(31) E.-J. Roux, op. cit.
(32) L. Gianoli, op. cit.
(33) Ch. Tavard, op. cit.
(34) J. Le Goff, l'Apogée de la chrétienté. Paris 1982.
(35) Lefebvre des Noëttes, op. cit.
(36) F. Braudel, la Méditerranée. Paris 1977.
(37) Plaisirs équestres, spécial bibliographie, octobre 1972.
(38) Cheval et tradition en Algérie, Alger 1988
(39) Hadith : récit relatif à la vie du prophète de l'Islam, à ses paroles, à ses actes. Le hadith d'Ali rapporte que, lorsque Dieu créa le cheval, il lui dit : « Je te nomme et te crée Arabe,     ...... Tu es destiné à la poursuite et à la fuite...»
(40) Dernier commentaire. A propos de la haute équitation. Si le lecteur nous a suivi jusqu'au terme de notre recherche, il aura compris que l'auteur rejette le mot « doctrine » et préfère, avec L'Hotte, parler de « principes » pour ce qui concerne la haute équitation. La raison en est que ce mot a pris en ce siècle, en équitation, une connotation d'exclusion de ceux qui pratiqueraient une autre doctrine. Or, l'histoire et l'expérience nous prouvent qu'il en va autrement. Plus on pratique l'équitation et plus on compare les systèmes équestres, plus on s'aperçoit que l'on marche, là aussi, vers l'unité. Les différences apparentes sont venues des chevaux employés, des esthétiques, des cultures et des époques. Car il y a eu progrès, parce qu'il n'y avait pas de doctrine pour pétrifier la pensée. Si l'on observe sur la longue durée, on constate que les différences s'estompent et disparaissent. Le général Decarpentry l'a dit, en 1946, et en a témoigné, en 1947, (voir note 2, du chap. VIII). Notre écuyère championne olympique 88 et du monde 89, Mme Otto-Crépin, l'a prouvé. D'ailleurs - c'est une question de bon sens - s'il en était autrement la compétition olympique de dressage serait aberrante. Or; c'est la plus belle des épreuves.




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