NOTES DU CHAPITRE I
(1) Qu'est-ce qu'un peuple cavalier ? C'est une population qui a
élevé ou élève des chevaux de selle
à un niveau de production et de qualité suffisant (avec
la maîtrise des techniques complémentaires) pour
construire un système équestre fiable et performant, lui
ayant permis ou lui permettant de vivre ! C'est le premier point. A cet
égard, il est troublant de constater que les Arabes font
remonter l'origine de leurs chevaux à l'étalon offert par
Salomon aux Banu Azd de l'Oman. Ils l'appelèrent « Zad er
Rakib » que Merder traduit par : « le viatique du cavalier
» ; le cheval qui nourrit ses compagnons grâce à sa
vitesse à la chasse. Le deuxième point qui
caractérise les peuples cavaliers qui ont une place dans
l'histoire est le suivant. A partir d'un tel système
équestre, ces peuples (portés par l'esprit de corps, l'
Ashabiya
d'Ibn Khaldun) ont crée un système d'armes qui leur a
permis des conquêtes ou des raids les plus étonnants. Ces
peuples furent des pasteurs nomades ! Dans ce cadre, les Cosaques font
partie des populations cavalières, ainsi que les Afrikaanders,
ces fermiers Boers qui, harcelant la cavalerie et les troupes à
cheval britanniques, sur leurs petits chevaux du pays, secs et
endurants, leur infligèrent des pertes humiliantes. (326 000
chevaux morts sur 494 000 en moins de trois ans, de 1899 à 1902
: selon E.-H. Edwards,
Horses,
chez Willow Books, Londres 1987.) En tirant sur les mots, on peut sans
doute y ajouter la population cosmopolite dites des « cow-boys
» ! Quant aux gauchos, le Pr Cahuzac les qualifient de «
paysans cavaliers » (colloque d'Avignon). Citation de R. Grousset,
Bilan de l'histoire,
Paris 1946.
« Le nomade (-.) a possédé une avance (et) un avantage militaire,
énormes. Il a
été l’archer à cheval. Une cavalerie incroyablement mobile d'archers
infaillibles...
» qui ont assuré sa supériorité sur le sédentaire durant des siècles.
(2)
Mennessier de La Lance.
Bibliographie
hippique. Paris
1915. - Lefebvre des Noëttes.
L’Attelage,
le Cheval de selle à travers les âges,
Paris 1931. - P. Vigneron.
Le
Cheval dans l’Antiquité, Nancy 1965.
(3) Perron.
Le Naceri, la perfection des
deux arts,
traduit de l’arabe, manuscrit d’Abou Bekr ibn Bedr, Paris 1852. -
Daumas.
Les
Chevaux du Sahara, Paris 1858. - Mercier.
La Parure des cavaliers,
traduit de l'arabe.
Manuscrit d'Ali ben Abderrahman ben Hodeil el Andalusy. Paris 1924.
(4)
Gianoli.
Le Cheval et
l’homme, Paris 1969. - Saurel,
Histoire de l’équitation,
Paris 1971. - Tavard.
L’Habit
du cheval, Fribourg 1975.
(5) Decarpenty. Baucher
et son école, Paris 1948.
Les
Maîtres écuyers du manège de Saumur, Paris 1954. - -
Montheilhet.
Les
Maîtres de l'oeuvre équestre, Paris 1979.
(6)
Chercheve.
Le Cheval
dans la vie médiévale, thèse, Paris SD.- Lagoutte.
Idéologies, croyances et
théories de l'équitation, thèse, Tours 1974.- Mulliez.
Les Chevaux du Royaume,
Paris 1983. - Grange.
Le
Cheval oublié, thèse, Grenoble 1981. - Meniel.
Chasse et élevage chez les
Gaulois, Paris 1987. - Aubin.
L'Art du cheval en Mongolie,
Mémoire, MSH, Paris 1986.
(7) Braudel.
L'Identité de la France, les
hommes et les choses, t. III, p. 79, Paris 1986.
(8)
Des chevaux et des
hommes, équitation et société, colloque d'Avignon,
Caracole, Paris 1988.
(9)
Dictionnaire
d'art et d'histoire militaire, Paris 1988.
(10)
Remonte: fourniture de chevaux à
l'armée, 1680, encyelopédie Hachette.
(11) «
Rapport du général Oudinot de
juin/septembre 1847 », publié par le
Spectateur militaire,
Paris, 1848, XLVe volume. On sait qu'Oudinot fut l'organisateur de
l'Ecole de cavalerie de Saumur.
(12) H = homme. Ch == cheval.
h = harnachement. E = équitation (technique). S = système équestre.
S = f(H x Ch x h x E)
Cette formule amusante montre que, si un seul des facteurs tend vers
zéro!...
le système
équestre n'est plus fiable.
Elle explique aussi pourquoi, depuis d'Auvergne (1769) à Champsavin et
d'Urbal (1918), les écuyers militaires français, s'accomodant de la
mauvaise qualité des cavaliers et des chevaux, ont tenté de rendre le
système fiable - quand même - en «
améliorant
l'équitation pour la guerre » !
(13) A ce sujet
essentiel, nous avons ajouté dans la deuxième partie, des essais sur
des questions fondamentales.
(14) Maxime Rodinson.
La Fascination de l'Islam,
paris 1980.
NOTES
DU CHAPITRE II
(1) Poséidon
: Dieu de la mer. Les Grecs lui attribuaient la domestication du
cheval. Ismaël
: premier fils d'Abraham. L'ancêtre des sémites arabes, « le premier
homme qui ait monté à cheval et l'ait domestiqué (-). Lorsqu'il devint
adolescent, Dieu fit sortir pour lui cent chevaux de la mer... »,
citation de Hicham ibn Kelbi (mort au IXe siècle en 206 de l'hégire)
dans son ouvrage Al
Kitab Nasab Al Khil.
(2) L. Guillot. Le Cheval dans l'art,
op. cit., 1927.
(3) Le char de combat est apparu à la même
époque historique (Antiquité) en Chine.
(4) Lecture des
cahiers du capitaine Coignet, Hachette, Paris 1968, p. 144.
(5)
Abu Abdallah ibn Batoutah (1304-1377). Géographe marocain. Carnets de voyage,
voir chap. VI.
(6)
« C'est l'admirable cheval de la steppe, figuré sur l'amphore d'argent
du tumulus de Tchertomlik », citation de R. Grousset. L'Empire des steppes,
Payot 1976, p. 36. Selon P. Meniel, op. cit.
, c'est ce cheval que les Romains importèrent en masse à partir de la
Grèce pour en « tirer » le « cheval militaire », représenté par les
sculpteurs.
(7) P. Vigneron. op. cit., p. 73
évoque cette question.
(8) M. de Nestier. Maître français du
XVIIIe siècle (1684-1754).
(9) P. Vigneron. op. cit., p. 264.
(10)
Theodor Mommsen. Histoire
de Rome,
extraits, Rombaldi. Collection Prix Nobel, 1963, p. 142. « Il (Jules
César) remédia autant qu'il put au manque de cavalerie et d'infanterie
légère, en adjoignant à son armée, peu à peu, des mercenaires germains,
qui échangèrent leurs petits chevaux contre ceux d'Espagne et d'Italie
qu'on acheta ou qu'on requit des officiers. »
(11) Coupe
sassanide
datée du VIIe siècle apr. J.-C. Rappelons la règle constante qui veut
que l'iconographie soit toujours en retard sur la réalité. En fait, la
selle à étriers est apparue deux ou trois siècles plus tôt selon les
auteurs. Il est évident qu'un tel progrès technique s'est fait sur une
« longue durée », et sans synchronisme dans l'espace. Il s'est transmis
par les guerres entre peuples cavaliers. C'est ainsi que les Perses
l'ont transmis aux Arabes.
(12) N'ayant pas trouvé de
représentations « authentiques » des cavaliers Huns, nous les
citons pour mémoire. En effet, ils ont laissé des souvenirs légendaires
qui pèsent encore dans notre mémoire collective. Au plan des techniques
équestres, leur apport est nul, ou tout au moins insaisissable.
NOTES
DU CHAPITRE III
(1)
R. Grousset. Histoire
de l'Asie,
PUF, 1944. « Au cours de ces guerres, la charrerie chinoise se doubla,
à partir de 300 av. J.-C., d'une cavalerie véritable (?), imitée de la
cavalerie des Huns. » (Voir note 7, chap. V et note 2, chap. IX.)
(2)
Lefebvre des Noëttes. op.
cit.
« Au VIe siècle, le cavalier chinois ne connaissait encore que la selle
sans étriers... » « ... c'est au VIIe siècle, sur les documents figurés
d'époque Tang... que cet organe essentiel du harnachement de la selle
apparaît pour la première fois en Chine ».
(3) R. Grousset. L'Empire des steppes,
Pavot, 1976, p. 643. « ... vers 300 av. J.-C., les Chinois, pour lutter
à armes égales contre les Huns de l'Ordos et du Soueï-Yuan, doublèrent
leur charrerie d'une cavalerie. »
(4) E. Saurel. Histoire de l'équitation,
Stock 1971.
(5) E. Delebecque. Xénophon, De l'art équestre,
Paris 1950, p. 9. Ce texte du Pr Delebecque est troublant. Il expose,
en termes militaires de notre époque, des actions de cavalerie décrites
par Xénophon il y a plus de deux mille ans ! Or, peu ou pas de
cavaleries européennes occidentales ne surent exécuter ces types
d'actions dans les temps modernes et contemporains. Remarquons aussi,
que, le nom du premier marchand de chevaux connu, suggère que c'était
un Juif de la diaspora dans le monde grec.
(6) Aristote ! qui
fut précepteur d'Alexandre le Grand.
(7)
« La poursuite et la fuite ! » Formule intéressante de Xénophon. On la
retrouvera intégralement dans la bouche du prophète de l'Islam, qui
enseigna ce mode de combat à sa cavalerie (D. Bogros, l'Arabe, Crépin
Leblond, 1978, p. 9).
(8) Choiseul (duc de). Ministre de Louis
XV. Rénovateur et réformateur de la cavalerie française après la
défaite de Rossbach...
(9) Sauf exception, et à un niveau peu
significatif. Voir Paul Vigneron. Op. cit.,
pp. 254 passim, p. 261: « La cavalerie romaine ne s'est ralliée à la
tactique du harcèlement qu'à contrecœur... La grande force d'Hannibal
résidait dans sa cavalerie. Selon les habitudes militaires africaines,
elle tendait des embuscades, battait la campagne (sic), obligeait
l'adversaire à se disperser. »
NOTES DU CHAPITRE IV
(1) Voir chapitre II.
(2) A
propos de la ferrure (suite au chap. VI. note 1). a) Perron. Le Naceri, op. cit., t. III,
2e partie, 1ere division, 3e exposition, cite un manuscrit égyptien du
XIIIe siècle : Kitab al
Akoual :
« Le Kesra Barwiz (le Cosroes Pércose-590-628, c'est-à-dire avant
l'hégire) eut un cheval du nom de Cherbrizlaque ter, il avait huit
clous. » b) Tasset et Carel. Traité pratique de maréchalerie,
Paris 1926. Nous donnent deux informations : - page 15. « Les Arabes
ferraient déjà les chevaux au VIIe siècle », ils citent une tradition
qui rapporte que « l'ouvrage de fer qui terminait l'étendard d'Hossein
(-) avait été fait par ordre de Fatima, fille de Mahomet, avec un fer à
cheval appartenant à Abbas, oncle du Prophète. » - Ils citent par
ailleurs la sourate cent du Coran: « Au nom de Dieu clément et
miséricordieux :
-
J'en jure par les coursiers haletants,
- Par les coursiers qui
font jaillir le feu sous les coups de leurs fers... »
D'autres
traductions ne parlent pas de fer mais toutes parlent du feu qui
jaillit sous les pieds des chevaux ! Enfin, grâce à un document de 560
apr. J.-C., traduit par Jean Maspéro, papyrus adressé au duc Athanase
qui gouvernait la Thébaïde pour l'empereur de Byzance : « Un plaignant
réclame seize juments ferrées. »
- Page 7. Tasset et Carel
citent
Diodore de Sicile et Appien Marcellin qui « signalent simplement
l'usure des sabots des chevaux comme une entrave aux opérations
militaires, pouvant même arrêter la marche des armées ».
- En
1957,
l'auteur a renouvelé cette expérience, bien malgré lui, dans les
steppes semi-arides du Maghreb. Après trois semaines d'opérations, un
peloton de cavalerie - aux chevaux non ferrés - dut être retiré du
service - chevaux boiteux. Après pousse de la corne et ferrage, il fut
à nouveau disponible.
- En 1987, le loueur d'ânes du parc de
l'Allier dans la ville thermale de Vichy en fit à nouveau l'expérience.
Louant des ânes pour les enfants, il augmenta son effectif d'équidés en
mettant en service trois poneys ! Comme ses ânes, il ne les ferrent pas
! Après un mois de marche dans les allées du parc, à raison de six
après-midi par semaine (pleine saison), il doit les arrêter : boiteux !
En 1988, il reprend son commerce saisonnier. Tous ses poneys sont
ferrés ! - CQFD.
(3) D'après Kamal ed din ad Damiri : Kitab hayyat al hayyawan,
XIIe siècle, Égypte.
(4) P.K. Hitti. Histoty of the Arabs,
USA, 1961.
(5) Caussïn de Perceval. Essai sur l'histoire des Arabes
avant l'islamisme, Paris 1848.
(6) Le transfert
se fit par le royaume arabe de Hira, allié de la Perse sassanide contre
l'empire de Byzance.
(7)
Traité traduit par Louis Mercier, édité à Paris en 1924. Par ses
références, Al Andalusy nous montre que ses travaux s'inscrivent à la
suite de ceux des écuyers arabes du VIIe siècle.
(8) Traité
traduit de l'arabe par le Dr Perron, Paris 1852. II faut savoir que
cette traduction a été commandée, sur la demande du général Oudinot,
dans son rapport de 1847 au Ministre de la Guerre sur la
situation
de l'élevage du cheval en Algérie. Le général avait consulté le
manuscrit arabe à la B.N. Après la Révolution de 1848, c'est le
ministère de l'Agriculture qui prit l'affaire à son compte.
(9)
Zenk
? N'est-ce pas le Tride? Qui selon La Guérinière exprime les «
mouvements prompts, courts et unis que font les chevaux avec les
hanches, en les rabattant promptement sous eux » ?
(10)
Montaigne. Journal de
voyage
(1580-1583) « Les Italiens disent qu'à la bataille de Fornoue (1495),
le cheval du roy le déchargea, à ruades et coups de pieds, des ennemis
qui le pressaient et qu'il était perdu sans cela. Ce fut un grand coup
du hasard, s'il est vrai »
(11) L'armement ? Dès le
VIIe siècle, les cavaliers arabes sont représentés chassant avec l'arc.
Au XIe siècle, avec une lance (Djerid)
à piquer et à darder (non à renverser) et une épée de « taille ».
L'iconographie fait apparaître le sabre cimeterre au XIVe siècle. On
sait, qu'en règle générale, l'iconographie est en retard sur la
pratique! On sait aussi que les auteurs arabes écrivent que ces armes :
l'arc, la lance, le sabre étaient déjà en service à l'époque du
Prophète de l'Islam (voir l'Andalusy, op. cit., chap.
XV-XVI-XVII).
(12) Tactique
(stratégie).
Celle que nous décrivons ici est fondamentale, mais élémentaire. Au
cours des siècles, les (Arabes) musulmans eurent de grands capitaines
(Tarik, Saladin, Tougouz, Baïbars...) qui, par des stratégies
élaborées, remportèrent des victoires décisives sur la chevalerie
européenne: Hattin, 1197, en Palestine ; et sur la cavalerie mongole
des successeurs de Gengis Khān : Aïn Djallut (la fontaine de Goliath),
en 1260, en Palestine aussi. La campagne de Hattin est remarquablement
décrite par Amin Maalouf. (Les
Croisades vues par les Arabes, Lattès 1983.) Celle d'Aïn
Djallut par James Chambers. (Les
Cavaliers du diable, Payot 1988.)
(13) Sur
l'élevage des chevaux des Arabes : on consultera Denis Bogros. L'Arabe, premier cheval de sang,
premier livre ; Crépin Leblond, 1978. « Le Cheval Barbe »,
premier livre. Caracole, Paris 1987. Sur l'équitation arabe,
du même auteur, Actes du colloque d'Avignon, 1988. Le discours français sur
l'équitation arabe, Caracole ; Paris 1988 (Des chevaux et des hommes).
(14)
E.-J. Roux. Le Cheval
Barbe. Maisonneuve ; Paris 1987, p. 62.
NOTES DU CHAPITRE V
(1) L. Gianoli. Op. cit.
(2)
E. Saurel. Op.
cit.
(3) J. Lagoutte. Op. cit.
(4)
P. Vigneron. Op.
cit., p. 73.
(5) P. Meniel. Chasse et élevage chez les
Gaulois, Errance 1987 ; p. 32 passim.
(6) L.
Guillot. Le Cheval
clans l'art, Paris 1927.
(7)
Cavalerie. Troupe à cheval en mesure de se déplacer sur de longues
distances, de manoeuvrer et de combattre à cheval. Il faut noter que ce
mot, venant de l'italien, n'apparaîtra dans notre langue qu'à la fin du
Moyen Âge. Les partis gaulois, romains, numides, se déplaçant à cheval
et combattant à pied, étaient des troupes légères ou des dragons avant
la lettre. Ce n'étaient pas des cavaleries !!
(8) G.
Castellan. Histoire de
l'armée, PUF, Paris 1948, p. 39.
(9) Lynn White. Technologie médiévale et
transformations sociales, Paris 1969.
(10) L.
Champion. Les Chevaux
et les cavaliers de la Tapisserie de Bayeux, Caen 1907.
(11)
F. Braudel. Op. cit.,
t. 11, p. 75 : « l'Élevage ancien ».
(12) Abbé Tollemer. Un sire de Gouberville,
gentilhomme campagnard dit Cotentin de 1553 à 1562, Paris
1873, p. 380 passim.
(13) G. Guillotel. Les Haras nationaux,
Paris 1985, p. 23 passim.
(14)
Ce qui n'est pas notre thèse! On a voulu accréditer l'idée qu'auraient
existé, au Moyen Âge, de nombreux établissements d'élevage du cheval de
selle chez les clercs et les nobles qui auraient assuré une production
suffisante... En fait, G. Guillotel (Op. cit.,
p. 37) n'en a trouvé trace que d'un petit nombre et qui n'étaient pas
des haras au sens moderne. Notons tout de suite cette confusion
entretenue entre haras signifiant troupeau de chevaux, sens des XIIIe.
XIVe et XVe siècles d'après Le Robert, et, haras signifiant
établissement d'élevage de chevaux sélectionnés, qui est le sens
moderne. Cette confusion a été néfaste à la recherche. D'ailleurs, F.
Braudel juge insuffisante l'explication avancée par F. Chercheve et
reprise par J. Mulliez : « d'un bel élevage de chevaux de
selle
durant le Moyen Âge, qui aurait été détruit par la politique de
Richelieu tendant à briser la féodalité. » (Op. cit., t. II, p.
91 : l'Histoire curieuse
du cheval en France, s'explique-t-elle ?)
(15)
Cité par d'Humières (Gal.) « Le Cheval d'armes », in Prestige du cheval.
Paris 1951, p. 233.
(16) Henry Lee. Historique des courses de chevaux,
Paris 1914, p. 18. Henri VII interdit d'employer à la reproduction des
chevaux d'une taille inférieure à 1 m 27 (Preuve que c'était
l'habitude). Henri VIII, par un acte du Parlement, fixa la taille des
étalons à 1 m 52, et par un second billet ordonna de « tuer, avant la
Saint-Michel, tous les chevaux n'ayant pas la taille voulue ».
(17)
Tollemer. Op. cit.,
p. 383. « Au matin, je mande Pierre Quentin... et allasme à la forest
pour prendre du "haras"... » c'est-à-dire : pour attraper des chevaux
du troupeau sauvage (1553-62).
(18) Cette aide animale, par le
cheval de traction, était rendue possible par l'invention du collier
d'épaules et des traits, invention que Lefebvre des Noëttes (op. cit., p. 92)
situe vers le Xe siècle et B. Lizet bien avant ! (op. cit.)
(19)
Morris (gal). L'Extérieur
du cheval,
Paris Éditions 1890 (3e), désigne la première des races régionales de
trait dont on ait fait état: « la Cauchoise », p. 89. La première
édition date de 1835, Morris ignorait donc les travaux de Tollemer (op. cit.)
qui furent publiés en 1873. Or, celui-ci confirme, qu'à l'époque de
Gouberville (1550), on utilisait dans le Cotentin des étalons du pays
de Caux pour améliorer la population chevaline de la Basse-Normandie
(p. 386).
(20) Il est bien entendu que les nobles et les
clercs en
leurs tours ou abbayes avec fermes en exploitations directes ont aussi
élevé des chevaux dans ce système. Philippe le Hardi (XIIIe siècle) le
leur ordonnera d'ailleurs ! (voir note 27.)
(21) Littré. « Il
n'en
perdra ni runcin ni sommier », chanson de Roland, XIIe siècle. Runcin
signifie « cheval... entre deux tailles (sic)
». Sommier signifie bête de somme, âne, mulet, éventuellement cheval.
Notons que sur la Tapisserie de Bayeux, on voit la première
représentation d'un roncin tirant la herse avec collier d'épaules et
traits. On voit aussi un mulet, c'est un sommier tirant la charrue
araire.
(22) G. Duby. Guillaume
le maréchal ou le meilleur chevalier du monde, Fayard,
Paris 1984, p. 111.
(23) Comptes
des dépenses de la chevalerie,
de Robert, comte d'Artois, à Compiègne, juin 1237. Par Peigné-
Delacourt, Amiens 1855. Voir aussi les prix des roussins de luxe pour
hauts personnages dans les Comptes d'Alphonse de Poitiers, juin 1241 à
la bibliothèque de l'École des Chartes.
(24) G. Duby. Op. cit., p. 158.
(25)
Lefebvre des Noëttes. Op.
cit., p. 246.
(26)
Cet élevage du véritable cheval de selle de cour et de guerre sera
reconnu par le document le plus important concernant l'élevage du
cheval en France: l'Arrest du Conseil d'Éstat pour rétablir (sic) les
haras dans le Royaume (du 17 octobre 1665). Les provinces d'Aunis,
Xaintonge, Poitou et Auvergne (cette province comprenant tout l'ouest
du Massif central dont le Limousin, bien sûr !) sont désignées pour
qu'y soient élevés des chevaux de selle, produits d'étalons Barbes. Au
XIXe siècle, les Anglais les appelleront « les barbes du Limousin »
(Sidney, le Livre du
cheval, Paris 1892).
(27)
Pour en terminer avec l'élevage du cheval en France au Moven Age, il
faut retenir deux idées remarquablement établies par F. Chercheve (op. cit.) : D'abord.
L'élevage du cheval de selle fut toujours déficitaire ! Ce qui entraîna
de nombreuses mesures de la part des rois : - Interdiction
d'exporter. Incitations à l'élevage. Mesures fiscales sur les champs de
foires (Tonlieu). Le roi ordonne que « .., Li comte, li duc et li baron
et li abbé et tout li autre grant homme qui ont pasture suffisant,
tiegnent haraz de jumenz de six ou quatre au (moins)... », ordonnance
de Philippe Le Hardi (XIIIe siècle). Bibliothèque de l'École des
Chartes.
Ensuite.
Qu'il y a
durant une longue période identité entre cheval de selle et de trait ;
car il n'y avait pas de roulage (transport par voie de terre sur roues
à longues distances), les routes et pistes ne le permettaient pas. Le
transport se faisait par portage, par bât, par somme, par charge. (Le cheval de guerre anglais
s'appelle « charger ».)
Enfin,
il faut ajouter à cela, qu'il y eut aussi identité entre le cheval de
bataille et le cheval de travail, spécialité labour ! - Dans ces trois
remarques, nous tenons les clés de toute la problématique de l'élevage
du cheval de selle de guerre de troupe en ce pays. L'élevage national
n'a jamais produit les chevaux de selle nécessaires à l'armée. Ceci est
tellement vrai qu'il fallut, en 1898 (c.-à-d. à la fin de la
cavalerie), fonder la Société
d'encouragement à l'élevage du cheval de guerre français.
Trop tard
(28) Mot de Lucien Poirier (gal). Les Voix de la stratégie,
Paris 1985. Cugnac (gal de). Revue historique de l'armée,
août 1957 écrit, p. 26 : ordonnances du 13/1/1373 et du 6/12/1373, en
p. 17: « La cavalerie française, entre 1870 et 1914, s'est trompée
comme la chevalerie jadis », stigmatisant les méfaits du conservatisme
archaïque (voir note 10 du chap. IX).
(29) Lucien Clare. Les
deux façons de monter à cheval en Espagne au siècle d'or. Actes du
colloque d'Avignon. Des
chevaux et des hommes, Caracole 1988.
(30)
Froissard. XIVe siècle, « Ginet Ligier et bien courant à merveille »,
Littré.
(31) M. Dugué-mac-Carthy. La Cavalerie française et son
harnachement, Maloine 1985, p. 78.
(32) D'Aure. Cours d'équitation,
Paris 1853, p. 256.
(33) Jusqu'au jour où les Anglais mirent
pied à terre, et ce fut Crécy 1346.
(34) Analyse
du discours français sur l'équitation arabe. Op. cit.
(35)
Perron. Le Naceri. op.
cit., t. II, chap. XII. « Dressage et éducation des
chevaux ».
(36a)
Cet exposé critique, qui prétend analyser la société féodale au plan
hippique, ne doit pas faire oublier - ni ses progrès économiques, - ni
ses forces d'expansion. Ainsi, les Croisés se sont maintenus deux
siècles au Proche-Orient au milieu des principautés arabo-turques ; les
chevaliers teutoniques ont colonisé les rives de la mer Baltique. La «
Reconquista », la croisade espagnole, fut finalement victorieuse, après
sept siècles ! La prise de Grenade, en 1492, marque précisément la fin
du Moyen Âge.
(36b) La mauvaise qualité du cheval européen ? -
Ephraim Houel, inspecteur général des haras nationaux, rapporte cette
citation de l'Anglais, John Lawrence: « Le trot est l'allure des
chevaux du Nord, comme le galop est celle des chevaux du Midi. » (Histoire et origine du cheval
dans toutes les variétés, John Lawrence, 1809.)
(37)
L'élevage du cheval de
selle en France.
La France qui est le « berceau de race » de plusieurs chevaux lourds de
trait, de réputation universelle, n'a jamais été un pays d'élevage du
cheval de selle ! Nous venons de le voir pour le Moyen Age ! - Au
moment de terminer cet ouvrage, nous recevons le n° 163 de Plaisirs équestres.
(Janvier-février 1989, paru avant Noël 1988). Page 42, on peut lire une
déclaration de Fernand Leredde (57 ans), éleveur-propriétaire. Haras
des Rouges, près de Saint-Lô, (Manche-Normandie) : « (Bien que)
l'élevage du cheval de selle (-) (ait) toujours été considéré comme
parent pauvre parmi la diversité des productions agricoles. (-) Il fut
longtemps complètement ignoré dans le système agricole. » Ce jugement,
libre et grave d'un éleveur-expert, de la fin du XXe siècle, résume la
question de l'élevage du cheval de selle en ce pays depuis un
millénaire. Résultat équivalent à zéro malgré l'intervention de la
puissance publique sous tous les régimes politiques, à toutes les
époques ! Cela nous interpelle ! Car, ce jugement d'une extrême
importance, qui détruit définitivement les affabulations patriotiques
qui baignent notre imaginaire, avait déjà été proclamé par Napoléon
Ier, en 1806, et par le vice-président du Conseil dans les débats
célèbres de la « Loi sur les haras et remontes », de 1874
: 1806.
Napoléon Ier « Je fis faire une enquête... Il n'y avait pas en France
cent étalons de selle... » (cité p. 114, in l'arabe, op. cit.,
2e livre par N. de Blomac) ; 1874. Le vice-président du
Conseil :
Il faut « ... des étalons capables de faire des chevaux de selle, ce
qui nous manque par-dessus tout. » (Nombreuses marques d'approbation.)
(In les Annales de
l'Assemblée nationale, p. 164, séance du jeudi 28 mai
1874.)
NOTES DU CHAPITRE VI
(1) A propos de la ferrure
(suite de la note 2 du chap. IV). (Voir la fin de cette question au
chap. XI, note 2.) Les découvertes archéologiques du champ de
bataille d'Augsbourg (955) sont de la plus haute importance au plan de
la question primordiale de la ferrure des chevaux. Nous ne parlons pas
de l'origine du fer à cheval ! Question controversée sans intérêt ici.
Nous parlons de l'usage du fer à cheval. Le fait à retenir est que les
cavaliers nomades des « steppes-prairies » (opposées aux « steppes
sèches ») par R. Grousset (Op.
cit.) ou « semi-arides » selon la terminologie de Stuart
Legg (le Coeur du monde.
Fayard 1975), en l'occurrence les Magyars de Hongrie, ferraient leurs
chevaux orientaux au Xe siècle. Ils étaient les héritiers en ligne
directe des envahisseurs cavaliers asiatiques venus de Sibérie. Or, Mme
B. Lizet dans son livre : le
Cheval dans la vie quotidienne,
Berger-Levrault 1982, signale, p. 43, que l'on a découvert des fers à
cheval dans les tombes des cavaliers nomades de Sibérie, dans la région
de Hénisseï et qu'on les date du IXe siècle pour les uns, du XIe siècle
pour les autres. Or, que l'on nous pardonne d'anticiper. Les historiens
des Mongols ne disent rien sur ce sujet. De sorte que certains «
sous-traitants de l'histoire » soutiennent qu'au bas Moyen Âge, la
cavalerie des Gengis khanides a « conquis le monde », à une rapidité
surprenante : sans ferrer ses chevaux !!! de la Corée à la Pologne par
l'Afghanistan et la Hongrie en passant des steppes-prairies aux steppes
semi-arides, et en franchissant les monts du Pamir !... Cela est
matériellement impossible. Il a été prouvé qu'une cavalerie ne peut
faire des étapes longues et répétées, sans ferrure, dans les montagnes
au sol rocailleux, et les steppes au sol abrasif. Elle serait en
quelques semaines au niveau opérationnel zéro. Bien sûr, il n'est pas
question de nier que les chevaux des nomades (aussi bien du Nord que du
Sud d'ailleurs), marchant dans les « pâturages », au rythme des lentes
transhumances « derrière l'herbe », n'étaient et ne sont pas ferrés.
Mme F. Aubin dans son mémoire (op.
cit.)
sur le cheval en Mongolie aujourd'hui, nous indique que le ferrage des
chevaux n'est pas pratiqué. Mais le contexte est différent de celui que
nous étudions. Ne confondons pas le nomadisme pastoral et les guerres
de conquêtes des cavaliers des mêmes peuples ! - Nous n'ignorons pas
non plus que Marco Polo, dans son livre dicté, en 1298, a dit des
chevaux de la Perse orientale : « Leurs sabots sont si durs qu'ils
n'ont pas besoin d'être ferrés (-) on dit qu'il y a encore peu de
temps, on trouvait parmi eux des descendants directs du fameux
Bucéphale. » (Mais il précise que tous ces chevaux ont été tués), « de
sorte que le monde perdit ce qui était sans doute la meilleure race
équine qu'il n'eût jamais connue ». Lui-même ne 1es a jamais vus, et
nous rapporte des « on-dit ». Ce que fait aussi L.
Gianoli (op. cit.
p. 83), auquel nous empruntons cette citation, dans un chapitre
intitulé : « Les premières mentions du cheval mongol ». Et c'est ainsi
que se propagent d'âge en âge, des erreurs de lecture qui sont la cause
d'erreurs historiques. (Voir en annexe le manuscrit
tibétain.) Ajoutons une dernière observation. A la fin de sa
vie,
René Grousset, le grand orientaliste, nous a appris le sens du
véritable nom de Gengis Khān : Tamoudjin.
Ce nom signifiait en dialecte mongol de son époque: « forgeron ». (L'Empire des steppes,
op. cit.,
p. 639.) Or, cela a un sens chez les nomades cavaliers. Dans les tribus
de nomades cavaliers des steppes du Sud, nous avons observé que le
forgeron (heddad
ou amezyl,
selon le dialecte arabe ou berbère) était un artisan protégé. Car
c'était lui qui fabriquait et posait les fers des chevaux, et réparait
les armes. Ce nom de Tamoudjin, conquérant du monde, nous interpelle !
En conclusion, les chevaux choisis pour la remonte des cavaliers des
peuples nomades « en campagnes de guerre », ne pouvaient pas ne pas
être ferrés ! C'est ce que prouvent les découvertes archéologiques
faites sur le champ de bataille d'Augsbourg ; bataille qui termina les
invasions des cavaliers hongrois au Xe siècle. Deux cent cinquante ans
avant celles des cavaliers mongols... sur les mêmes itinéraires pour
une part.
(2) L'encyclopédie Hachette nous apprend que «
hongre »
signifie cheval châtré. Au XVe siècle, on disait hongre ou « hongrois
», « l'usage de châtrer les chevaux étant venu de Hongrie ». Il est
donc important de faire les remarques suivantes : a) les
Hongrois,
qui sont les plus occidentaux des peuples cavaliers des steppes du Nord
ont transmis cet usage aux Européens sédentaires. Dès le XIIe siècle,
ces derniers importaient des chevaux de Hongrie. La castration des
chevaux est une pratique très ancienne dans les steppes du Nord de la
Mongolie à la Hongrie ; b) les peuples nomades cavaliers des
steppes du Sud n'ont jamais castré leurs chevaux !!
(3)
Duhousset (commandant). Notice sur les chevaux orientaux,
Saint-Germain 1862, p. 12.
(4)
Ce mors était utilisé par les pères fondateurs de l'équitation
française: La Broue et Pluvinel sous le nom de « génette ». Il l'était
aussi par les hussards de Frédéric II le Grand.
(5) Grekov et
Iakoubovski. La Horde
d'Or et la Russie, Payot, Paris 1961.
(6)
Grousset. L'Empire des
steppes, op.
cit., carte
n°1 (repris par Braudel, Grammaire
des
civilisations,
Arthaud 1988) a divisé l'Eurasie des nomades en zones :
prairies-steppes, prairies sèches, déserts, montagnes, forêts,
pâturages. Il est intéressant de continuer sa carte en Arabie et en
Afrique avec les déserts du Nefoud. Roub. al. Khali et Sahara, et, les
steppes sèches du Nedjd et Syrie, du Sahel et du Maghreb. On constate
avec F. Braudel que toutes ces steppes ont été zones de départ des
conquérants cavaliers : au nord, les nomade de la « yourte » de feutre
(laine de moutons), au sud, les nomades de la « tente » Khaima
(poils de chameaux et de chèvres... ) ; si l'on ajoute que les chevaux
de ces différents nomades cavaliers sont différents, élevés de façons
différentes... Ces observations de deux grands historiens de ce siècle
éclairent nos connaissances sur les nomades cavaliers (voir notre
deuxième partie, chap. X).
(7) Il faut noter : a) que
l'ethnie mongole sera toujours minoritaire dans l'empire des Steppes,
de même que l'ethnie tartare. Il est plus convenable d'appeler
l'ensemble des nomades cavaliers rassemblés par Tamoudjin : des
Turko-Mongols ; b) que les orthographes varient suivant les
auteurs : Gengis ou Genghis, Soubédé ou Souboteï, etc.
(8) R.
Grousset. Bilan de
l'histoire, Perrin 1974, p. 348. « Le nomade
(-) a possédé une avance (-) militaire énorme. Il a été l'archer à
cheval. » Avec « la mobilité, l'ubiquité hallucinante de cette
cavalerie (-) quand elle est maniée par (-) un Suboteï... » « Plan
Carpin et Rubrouk, qui l'ont vu évoluer (cette cavalerie), ont très
bien marqué cette décisive supériorité technique. »
(9) Dictionnaire d'art et d'histoire
militaire, PUF 1988, voir: Mongols.
(10) Ibn
Khaldûn. Discours sur
l'histoire universelle, (1332).
Traduction Vincent Monteil, t. II, Beyrouth 1968, p. 556. « Depuis que
le monde est monde, on a fait la guerre de deux façons - ou bien l'on
se bat en avançant en formations serrées, ou bien l'on adopte la
technique de l'attaque suivie du repli. » A Aïn Djallut, les Mameluks
adoptèrent cette technique préférée des Arabes. Les Mongols la
pratiquaient aussi. Mais Baïbars et Qoutouz furent meilleurs généraux
que Kitbouqa !
(11) Cette cavalerie mongole était
divisée en deux catégories (subdivisions d'armes, dirions-nous
aujourd'hui) - 60 % de troupes à cheval, de manoeuvre et de
harcèlement : les archers à cheval, pouvant combattre à pied. 40 % de
troupes à cheval - de mêlée et corps à corps. Les cavaliers de cette
subdivision étaient protégés par une cuirasse « de cuir » et armés de
la lance à crochet. Cette cavalerie a été confondue par les historiens
européens avec une cavalerie lourde de type occidental. C'est un
contresens ! En effet, la cavalerie lourde, ou grosse ou
pesante
(Warnery, général de Frédéric II. Remarques
sur la cavalerie,
Paris
1828) est une troupe à cheval, combattant à cheval,
mais remontée
de lourds animaux et armée d'armes offensives, d'estoc, tels que le
sabre « latte » ou la lance à pointer ou de joute. Dans la bataille à
l'occidentale (rangée) ou à la chinoise, elle doit « charger » en «
haie » ou en « muraille », c'est-à-dire en « masse » pour obtenir la «
rupture » par le « choc ». Certains historiens désignent ainsi quelques
troupes à cheval de l'Antiquité (avant l'étrier)(?)... Soit ! En tout
cas, ce n'était pas le système mongol. Car, en effet, une cavalerie
lourde ne peut participer à la manoeuvre stratégique, comme l'a dit
Warnery, ce qui était incompatible avec l'organisation de Gengis
Khān. Cette infirmité de la cavalerie lourde sur laquelle Warnery a
insisté (il écrivait en 1763) fut démontrée dans la campagne de 1812 :
«
Napoléon fit un désastre dans les steppes russes, car il avait
sous-estimé la stratégie de Gengis Khān » (F. Adravanti, Gengis Khān,
Payot 1987, p. 326). Il n'avait sans doute pas étudié « les remarques
sur la cavalerie », qui lui auraient appris à organiser la sienne
différemment, et au moins, à l'utiliser autrement qu'il ne le fit ! -
(Le parler populaire a donné un sens péjoratif à l'expression «
c'est de la grosse cavalerie » !)
(12) C'est à la bataille
de la Kalka, en 1222, où Suboteï écrasa l'armée des princes russes,
qu'apparaissent pour la première fois dans l'histoire : les Cosaques. A
la vérité, il s'agit des Brodniks
(errants - vagabonds) qui, selon
Grékov (op. cit.),
« étaient probablement des Slaves, habitant les
côtes de l'Azov et les bords du Don ». Les historiens russes les
considèrent comme les prédécesseurs des Cosaques. Ceux-ci ne formèrent
jamais une ethnie originale. Ce furent des populations cosmopolites,
formées de proscrits, de déserteurs, de serfs en rupture de ban, de
fuyards de toutes espèces, mélanges de toutes les ethnies de cette
région du monde rassemblées dans des genres de républiques militaires
cavalières. Ils proliféreront dans les steppes d'Ukraine, du Don
paisible, du Dniepr (les Zaporogues) et plus tard encore, au Kouban, au
Terek et en Sibérie dont ils seront les premiers conquérants. Jaloux de
leur indépendance, ils s'allieront tour à tour à tous les pouvoirs qui
la leur garantiront. Ils combattront, au contraire, tous ceux qui la
menaceront. Mais, en même temps, ne vivant que pour et par la guerre,
ils serviront tous ceux qui leur donneront l'occasion de faire des
expéditions et de ramasser du butin. Cette mentalité les rapproche
beaucoup des véritables Mongols, dont ils héritèrent les vertus
cavalières soit en les aidant, mais le plus souvent en les combattant.
Sans doute, cela est assez loin de notre sujet et pourtant ! Comment
comprendre l'évolution de l'équitation militaire en Europe occidentale,
dont les cavaleries succomberont plusieurs fois devant les Cosaques
(qui camperont sur les Champs-Élysées), sans connaître ce « peuple »,
par lequel l'héritage équestre des derniers cavaliers nomades, les
Mongols, nous a été transmis et nous a influencés ? Venant de quitter
son armée décimée et en déroute, Napoléon, sur la route de Varsovie,
confia à Caulaincourt : « ... Tous nos désastres
ont tenu à quinze jours et à l'inexécution (sic) de mes ordres
concernant la levée de cosaques polonais » (cité par Curtis Cate, 1812,
le Duel des deux
empereurs, R.
Laffont, 1987, p. 404). Quel brevet
décerné au système d'armes cavalerie légère cosaque, hérité des
Mongols ?... par celui que l'opinion considère comme un très grand
capitaine sinon le plus grand ! C'était un Méditerranéen des îles, et
non des steppes. Il comprit trop tard ce que devait être une véritable
cavalerie. Héritier des Romains auxquels il fit souvent référence, il
aurait dû suivre leur exemple... et ne pas s'enfoncer dans
le pays des cavaliers (voir chap. II, planche VII).
(13)
Rosalind Mazzawi. The
Horse in Islamic Art,
communication au
symposium sur le cheval, organisé par l'Organisation arabe pour le
développement agricole, Tiaret ; Algérie 3-4 septembre
1988. On
lit parfois « le poney mongol ». C'est une faute grossière de
langage. Le mot poney en français classique est réservé aux chevaux de
très petite taille (ce qui n'est pas le cas du cheval mongol) des races
anglaise, écossaise, galloise... et des îles Atlantiques, que le roi
Henry VIII n'a pas réussi à supprimer !... Bien sûr, à notre époque, le
Poney Club International appelle poneys des chevaux de toutes tailles,
y compris des Pur-Sang anglais de polo ! Cela n'a aucun intérêt
historique.
(14) Voir Françoise Aubin. L'Art du cheval
en Mongolie, dans Production pastorale et société. Supl.
MSH Info n°
19/1986 ; Maison des Sciences de l'Homme, Paris, pp. 129 à 149. Nous
citons ce mémoire sur l'élevage et l'usage actuel du cheval en Mongolie
car il éclaire ce que les historiens ont écrit sur un passé lointain,
souvent mal perçu !
(15) J.-P. Roux. Les Barbares,
Bordas, 1982, p. 94. L'idée de la supériorité des nomades sur les
sédentaires date d'Ibn Khaldun, au XIVe siècle, elle est reprise ici
par J.-P. Roux sous l'angle de l'élevage du cheval.
(16) Ibn
Batoutah. Voyages,
t. III (géographe marocain né à Tanger [1304-1377]).
« Le Diecht-i-Kyptchac est renommé pour ses chevaux (-) ils sont
exportés dans de nombreux États (-). Une caravane de chevaux peut
compter
jusqu'à six mille bêtes (-) malgré les frais de route et les droits
d'octroi (-) les marchands de la Horde d'Or réalisent de beaux
bénéfices... » Voilà un exemple qui permettrait de dire à un historien
en chambre que l'on peut faire voyager de nombreux chevaux en les
nourrissant avec l'herbe de la route et le fourrage acheté en chemin !
Oui ! Mais sur des itinéraires choisis, à un rythme lent, donc en temps
de paix. En guerre, on ne dispose ni du rythme de la marche, ni de
l'itinéraire, ni de l'espace et ni du temps pour s'arrêter et faire
paître. On ne peut choisir que ses objectifs. Ceux-ci doivent intégrer
la logistique.
(17) A
propos de l'organisation et de la logistique de la cavalerie mongole.
Cité par L. Gianoli (op.
cit., p. 83), Marco Polo, surnommé
Il Milione pour ses exagérations (d'après Stuart Legg., op. cit.) nous
rapporte : « Chaque soldat mongol possédait dix-huit chevaux ou
juments,
qui se nourrissaient uniquement d'herbe... » Il devrait être clair
qu'il s'agit ici du Mongol dans sa yourte en temps de paix, et non en
campagne de guerre. Et pourtant, les historiens, prolixes sur les
rations conditionnées emportées par les cavaliers mongols, se satisfont
d'explications de ce genre pour la subsistance des chevaux. En effet,
comme nous l'avons déjà dit, l'historiographie est en panne sur deux
questions primordiales : la ferrure et la nourrlture du cheval en
campagne. Ce qui rend vagues et incertaines, sous l'angle de la
conduite des opérations, les œuvres les meilleures sur les conquérants
des steppes, quand elles ne sombrent pas dans le fabuleux (comme
ci-dessus). Pour la ferrure, voir note 1 de ce chapitre. Pour
la subsistance des chevaux en campagne, nous savons (général Denis
Davidoff, la Guerre des
partisans, trad. fran., Paris 1841, p. 67
passim)
qu'au-dessus d'un effectif de quinze cents chevaux, une force
de cavalerie rencontre de graves problèmes, ce qui réduit ses capacités
de manœuvres stratégiques (exemple 1812). Même en admettant la sobriété
maximale du cheval mongol, il est impossible d'expliquer, durant la
guerre du Khwarezm, en 1220, la traversée du désert Qyzil Qoum par 50
000 chevaux, sans portage de fourrage, ni celle des monts du
Pamir
par 20 000 chevaux. Ayant pris Boukhara en février, après ces
admirables manoeuvres stratégiques, Gengis Khan lui-même s'occupa de
l'approvisionnement en fourrage. Il ordonna aux musulmans réunis à la
Grande Mosquée: « Vos prairies n'ont pas de fourrage. Ouvrez vos
greniers et vos granges. Nourrissez nos chevaux » (F. Adravanti, op.
cit. , p. 250). Il est bien entendu que les bons chevaux
de guerre de
troupe mangent toutes les céréales blé, seigle, avoine, orge, riz,
millet... et même des dattes, des pois secs, etc. (ce que nous savons
par expérience). Ceci étant, il est hors de question que des chevaux de
cavalerie en campagne et en gros effectifs subsistent sans logistique
(approvisionnement et maintenance). Les objectifs successifs qui
marquent les campagnes de Gengis Khān et Suboteï devraient être
analysés sous cet angle. Mais ce n'est pas notre sujet (voir annexe :
le
manuscrit tibétain).
(18) P. Diffloth. Zootechnie. Races chevalines,
5e édition, Encyclopédie agricole, Baillère et Fils, Paris 1923.
(19)
Encyclopédie Hachette, 1982, p. 561.
(20) R. Glyn. Les Plus beaux chevaux et poneys,
Horizons, Paris 1972, p. 210.
(21) P. Diffloth. Op. cit., p. 79,
note 1. L. de Simonoff, op.
cit., planche XV. En 1889, le lieutenant Pechkoff a
rejoint Saint-Pétersbourg à partir de
sa garnison sur le fleuve Amour. 8 838 km en 193 jours sur le cheval
sibérien Serko (14 ans. 1 m 37).
(22) Bien entendu, ce
prétendu standard n'est qu'un mot! L'on ne
saurait ramener le cheval des Mongols à un seul type. Nous savons
qu'ils ont utilisé tous les chevaux qu'ils ont trouvés dans leurs
conquêtes. Cependant, les « signalements » donnés par ces différents
auteurs concordent au moins sur le format, la taille, les proportions.
(23)
F. Aubin, op. cit.,
pp. 129 et suivantes, estime le cheval mongol à 135 cm et à 350 kg
environ.
(24) Lefebvre des Noëttes, op. cit., fig. 290.
(25) Encyclopédie Hachette, op. cit., p. 521.
Yuan, dynastie mongole de la Chine ; 1280-1368.
(26) Voir F.
Aubin. Op cit.
(27)
a) Voir Tavard, Gianoli, Edwards, Mazzawi, op. cit. b) Les
Hussards, par Y. Barjaud, Paris, Caracole 1988. pp.
280-281. La selle
hongroise (premier Empire), description de M. Boulin.
Fondateur du
Musée international des Hussards, p. 37. « La selle hongroise élève son
cavalier et le soutient devant, comme la selle mongole...
(28)
Ce point est essentiel
: il marque la différence fondamentale entre
l'équitation mongole et arabe, les deux équitations de guerre qui ont
été les plus fiables et performantes selon l'expression en usage. La
première se caractérise par un équilibre sur les épaules. La seconde
par l'équilibre dit « de campagne », également réparti entre les
épaules et les hanches. La
première exclut
donc toute idée (et même possibilité) de « rassembler » ! - L'école
française militaire de Beauchesne (1905) rejoindra cette
conception. La
seconde porte en elle l'équitation rassemblée, ce qui rend
crédible
les airs d'école décrits par Abu Bekr. Le Naceri, au XIVe
siècle ! (Voir
chap. IV.)
(29) Tavard.
Op. cit., p. 102.
(30) Les
cavaliers asiatiques n'ont pas conçu le mors comme un frein ! Leur
conception de l'équitation se situe ainsi à l'opposé de celle des
Occidentaux de l'Antiquité et de leurs héritiers du Moyen Âge (voir la
thèse magistrale de P. Vigneron, op.
cit.). Voilà un fait de
civilisation d'une importance considérable. Par contre, montant des
chevaux de sang de taille normale (1 m 45 à 1 m 50), les Arabes du
Mashrek et du Maghreb ont été dans l'obligation d'employer un frein,
très élaboré, la bride à anneau gourmette, qui permet aussi - pour
d'autres raisons - de libérer les mains pour tirer à l'arc ou au fusil
! Pour fixer les idées, il faut savoir que la taille des chevaux de
cavalerie légère dans l'armée française était fixée, en 1863, à 1 m 48,
1 m 51. Références A. Vallon, Cours
d'hippologie, Paris 1863.
(31) James Chambers. Les Cavaliers du diable,
l'invasion mongole en
Europe, Payot 1988. L'auteur fait la synthèse des
connaissances
actuelles sur l'organisation et la stratégie, ainsi que la tactique de
la cavalerie mongole. Silence complet sur l'équitation et erreur
habituelle sur la soi-disant cavalerie « lourde » mongole ! Quant à la
logistique, elle est aussi occultée. Ce qui est un manque sérieux pour
une histoire militaire !
NOTES
DU CHAPITRE VII
(1)
Voir chap. V. Duguesclin et note 28 du même chapitre.
(2) E.J.
Roux. Le Cheval Barbe.
Librairie d'Amérique et d'Orient, Paris 1987. L'auteur, dans
sa deuxième partie. écrit l'histoire de la conquête de
l'Amérique par le cheval Barbe-Andalous, et le système équestre
maghrébin.
DEUXIÈME PARTIE
NOTES
DU PRÉAMBULE
(1)
Le lecteur aura compris que, pour nous, on ne peut parler
d'équitation, qu'à partir du jour où les cavaliers ont disposé de la
selle avec étriers et du mors...
(2) Voir
Cheval et tradition en Algérie,
ministère de l'Agriculture, Alger, janvier 1988.
(3) Voir
Analyse du discours français sur
l'équitation arabe, par Denis
Bogros. In
Des chevaux
et des hornrnes, équitation et société, Caracole
1988. Colloque d'Avignon.
NOTES
DU CHAPITRE VIII
(1)
En vérité, ces deux brochures, l'une du directeur de l'école
d'équitation de Saumur, l'autre du directeur de l'école de Vienne,
portent des titres impropres. La maladie qui frappe actuellement notre
langage, l'enflure des mots, y est sans doute pour quelque
chose. La première intitulée « doctrine », n'est, en fait, qu'un
inventaire des principes et
procédés qui seraient propres à l'équitation française et une
suggestion : prendre en compte l'apport de l'équitation sportive
moderne. Ce dernier point est intéressant. La seconde intitulée «
dogmes » est une réflexion sur les rapports du dresseur et du cheval.
Excellente analyse qui sera utile à beaucoup de débutants. Il ne s'y
trouve aucun dogme, grâce à Dieu... mais on y trouvera de bons
conseils... Fuyons les doctrinaires et les dogmatiques !
(2) A propos de « la doctrine » Fuyons
les doctrinaires ! ... Mais la doctrine nous rattrape. Ainsi le
veut ce siècle. Dans sa livraison de décembre 1988, le Bulletin
d'information « 28 » des Amis du Cadre noir, relance le débat public en
France et en Europe ! - Il diffuse un texte du colonel Margot qui
circule, il faut le savoir, depuis les années 70. Intitulé La
Doctrine équestre française. C'est un très beau texte, que
tout
dresseur doit avoir lu. Il peut s'analyser comme un commentaire des
chapitres, très courts, II et III, des « questions équestres
». Dans
ceux-ci, L'Hotte
définit l'art équestre, ainsi que la soumission,
l'impulsion, la flexibilité qui doivent être les qualités du cheval de
selle en général, mais dans des mesures différentes selon l'emploi
auquel on le destine. Puis il aborde : le ramener, le rassembler et le
cheval droit, ce qui le conduit, naturellement, à l'équitation dite
savante, qui a sa marque dans la parfaite légèreté. Mais L'Hotte ne
donne pas le nom de doctrine à cette remarquable théorisation de
l'équitation. A son époque, on n'employait pas ce mot, mais celui de «
principes » (au pluriel). Pour lui, ils sont « premiers » (op. cit., p.
2). Pour lui, il y a ceux de Daure
et ceux de Baucher
(p. 242, Un
officier de cavalerie) pour ce qui concerne les deux
équitations qui
furent - au manège de Saumur - l'objet principal de sa réflexion et de
sa pratique : l'équitation de campagne et l'équitation savante. On sait
qu'au 18e de Dragons, il s'appliqua plus particulièrement à
l'équitation militaire... Il apparaît donc que le très beau
texte du
colonel Margot
ne concerne que l'équitation savante, de haute école,
artistique, ou haute équitation, « comme on voudra l'appeler », écrit
L'Hotte
lui-même (op. cit.,
p. 35). Car il faut dire que « la doctrine
équestre française », si doctrine il y a, ne s'applique qu'à la
discipline dite du dressage. Discipline qui intéresse peu de cavaliers
en notre pays, ce qui est bien dommage. Mais c'est un fait. Dès lors,
tout est clair et nous voilà en paix ! A ce propos, il
n'était peut-être pas utile de relancer une dispute franco-germanique ?
Surtout quand on sait que le général Decarpenty, maître
français du XXe
siècle, a écrit de l'écuyer en chef Lindenbauer de
l'École espagnole de
Vienne : « Ses chevaux exécutent tout leur travail sur des rênes à
peine
tendues, dans cette parfaite légèreté qui reste l'essence et la pierre
de touche de la véritable Haute École » (l'École espagnole de Vienne,
Rennes 1947, p. 43). Quand on sait aussi qu'en 1946, Decarpenty
confiait au colonel Cavaillé,
qui devait conduire nos équipes aux victoires des JO de 1948 et l912,
que « les Allemands étaient dans
le vrai en dressage », 1946-1988 ? Decarpenty
voyait très loin ! Pour
conclure, le dernier mot reste au colonel Margot qui écrit au
début de
son article : « Toutes les écoles sont d'accord, la divergence est dans
le style. » Eh bien ! Il faut remettre en honneur le style français !
(3)
Le doute cartésien.
La République équestre française admet le
débat. En 1972, dans son numéro 85. la très officielle revue l'Éperon a
publié un texte qui avait circulé sous le manteau pendant des années !
Réflexions sur l'instruction équestre « Et si les "MAÎTRES" avaient
tort ? » par le général Donnio. Page 25, il écrit: « Qu'on nous laisse
en paix avec l'école française.... » Cela mérite une lecture !
NOTES
DU CHAPITRE IX
(1)
Les Numides...
qui, remarquons-le, furent les seuls cavaliers de l'Antiquité à n'avoir
pas su inventer le mors !
(2) Cavalerie : troupes
à cheval, agissant de façons coordonnées,
capables de faire des raids et, plus tard, après l'invention de
l'étrier, capables de combattre à cheval. Les troupes à cheval, sans
selle ni ferrure, avaient un rayon d'action réduit et peu d'autonomie.
Une muraille suffisait à les arrêter. Elles ne pouvaient pas la
contourner ! Ce que fera facilement Gengis Khān et sa véritable
cavalerie.
(3) Voir Paul Vigneron. Op. cit. et Valérie
Courtot. Des chevaux et
des hommes, Caracole 1988, p. 104. Sur le plan
du harnachement et de la ferrure, la fin de l'Antiquité transmit toutes
les techniques qui permirent et expliquent pour une part, la libération
des forces vives des peuples nomades cavaliers.
(4) Les
systèmes équestres, arabe et mongol, furent opérationnels
dès le VIIIe siècle pour le premier, a partir du XIIIe pour le second.
(5)
Équitation classique qui, en Espagne, sera appelée « à
la stradiote » et « à la brida » en opposition à l'équitation
« à la jineta ». Cf. Des
chevaux et des hommes, op. cit., p. 73.
(6)
Auxquels il faut ajouter Mottin de La Bali-ne et Bohan
(7)
Beauchesne et ses continuateurs: Champsavin et d'Urbal. « Le lecteur
voudra bien, dès lors, ne pas taxer d'ingratitude les objections faites
aux procédés génériques (sic)
de notre grande école », (Saumur) -
Beauchesne (gal de) Dressage
du cheval d'armes, Paris 1905.
(8) D'Auvergne : Père
de l'équitation militaire en France. Il semble avoir été le seul à
analyser le système équestre français, dans sa
globalité : humaine. économique et tactique. C'est-à-dire en tenant
compte de la pensée militaire française - du cheval de remonte produit
en France - et du cavalier français tel qu'il était... au XVIIIe
siècle. A partir de cette analyse, il conçut une équitation
militaire
différente de celle enseignée jusqu'alors. Les documents dont nous
donnons des extraits ci-dessous (Archives
de la guerre, Vincennes,
Référence dossier « Écoles de cavalerie » [20 pièces]. Cote MR 1732)
sont écrits de la main de d'Auvergne. Ce qui est émouvant. En
1769, mémoire intitulé Observation
sur l'équitation par M.
d'Auvergne. « ... en parcourant l'histoire militaire de ce
corps (la
cavalerie), en réunissant tous les avis des officiers supérieurs tant
par leurs connaissances (sic)
que par leurs grades, il nous paraît
démontré que la cavalerie française est faite pour combattre en masse.
Il est aisé d'en donner les raisons :
l - Le cheval fait le cavalier.
L'espèce que le royaume produit est
inférieure à celle des contrées du Midi, et n'est pas susceptible de
cette légèreté et de cette vigueur qui nous fait regarder ces derniers
comme les premiers chevaux du monde. (Il s'agit à l'évidence des
chevaux Barbes et Arabes.)
2
- Le peu d'habitude qu'ont
nos cavaliers, fait qu'ils ont cette maladresse à cheval que n'ont
point les hommes des nations qui élèvent beaucoup de chevaux. Ces deux
raisons, ce me semble, suffisent pour prouver que notre cavalerie ne
peut combattre qu'en masse. » (17) Plus loin, il écrit : « On bannira
surtout toute espèce d'aires de manège (-) en général on rejettera tout
ce qui assouplit trop le cheval, tous les effets de main qui peuvent,
ce qu'on appelle, le mettre sur les hanches, il doit être soutenu et
relevé par les effets de jambes (-) l'instruction du cavalier dans le
manège se réduira donc :- à lui donner la position (-) et (à)
l'affermir,- à lui faire connaître l'effet de ses mains et de ses
jambes, tout
cela en le faisant aller au pas et au trot. Quand il sera affermi (-)
on le sortira du manège pour l'exercer par petites troupes au galop (-).Quant
à l'instruction du cheval, elle suivra les mêmes degrés. »
Plus loin il revient sur deux idées
maîtresses : « Les effets de la main doivent être réservés pour les
arrêts et
demi-arrêts... indispensables dans les manoeuvres (-). » - « Le choc
étant le seul effet qu'on se propose d'obtenir de la cavalerie
». Dans le même dossier, on trouve un autre mémoire qui semble
de la main
de d'Auvergne (?), en date du 26 février 1769, où l'auteur revient sur
l'emploi de la cavalerie française. « La cavalerie n'est point destinée
à combattre corps à corps, elle est constituée pour combattre en masse
et par rang. Son but principal est la charge. Tous les autres objets
auxquels elle est employée à la guerre sont des accessoires de
celui-la (-). C'est d après ces bases que toute son instruction doit
être dirigée sur l'objet essentiel que l'on se propose... »
En 1774, d'Auvergne écrit un nouveau mémoire (même
référence-même cote)
: Instruction pour un
régiment de cavalerie relativement à
l'équitation. C'est une progression pour l'instruction du
cavalier et
le dressage du cheval, en application de l'Ordonnance du roi pour
régler l'exercice de la cavalerie du 1er juin 1766. Cette ordonnance a
été rédigée à partir des travaux de Drummond de Melfort. Pour la
première fois, un chapitre est consacré à une « instruction pour
l'équitation » (23 pages). Cette ordonnance est signée Choiseul,
secrétaire à la guerre ? En conclusion, il faut ajouter :
si d'Auvergne a été le simplificateur de l'équitation française pour
l'adapter à la guerre, et si le duc de Choiseul fut le réformateur, le
marquis de Castries, général inspecteur, fut l'homme de terrain. Dans
ses rapports d'inspection (même dossier MR 1732), il résume
remarquablement la question du système équestre militaire. Il a écrit :
en 1770 - « ... adopter une équitation militaire plus adaptée aux
hommes, aux chevaux, et à l'objet que la cavalerie a à remplir à la
guerre. »
en 1771 - « ... sans
équitation, on n'a pas de cavalerie (-) avec trop d'équitation, on n'en
a pas davantage. »
(9)
Baucher. Il doit
être considéré comme le véritable continuateur des
maîtres de la Haute École. Le général L'Hotte a été clair à ce propos
(voir note 10). En effet, son équitation fut avant tout celle du
paraître, de la « poésie de l'équitation ». Donc, s'il existe une
doctrine française de Haute École, il faut la chercher dans la lignée
La Guérinière-Baucher, qui ont chacun marqué leur siècle. C'est ce
qu'a fait le colonel Durand (
op.
cit.). Mais la véritable question qui
a été posée au siècle passé ne fut pas celle de l'équitation « savante
» qui ne concernait qu'un petit nombre de cavaliers. Ce fut celle de
l'inadéquation entre la production chevaline et la demande de la
remonte. De cette inadéquation proviendront les difficultés de l'armée
pour faire une cavalerie métropolitaine opérationnelle, avec un
matériel chevalin inadapté. Cette question (18) avait des racines
profondes dans le passé. Les écuyers du XIXe siècle ont tenté d'y
répondre par la seule équitation (sauf d'Aure qui s'intéressa autant à
l'élevage qu'à l'équitation !). Baucher et ses disciples ont prétendu
appliquer une méthode nouvelle valable aussi bien
pour le cheval de Haute École que pour le cheval de guerre de troupe.
Malgré l'interdiction officielle, le « Baucherisme » se diffusera dans
l'armée. Ce fut la source d'une grande équivoque qui entraînera bien
des querelles. L'Hotte, le disciple préféré, fut le seul à refuser la
confusion entre les différentes équitations (voir note 10).
(10)
L'Hotte.
Quoi qu'on ait pu en dire, l'enseignement équestre du
général L'Hotte pose une énigme ! Mennessier de La Lance (
op. cit., T. II, p.
107) qui a servi sous ses ordres nous parle d'ailleurs du « conflit
intérieur qui a nui à l'expansion de son enseignement ». En vérité,
élève
de Baucher et de Daure, L'Hotte a posé problème à tous ses successeurs.
Ceux-ci s'interrogent encore au sujet des équitation de ses deux
maîtres et de leur place dans une soi-disant doctrine française ?
Doctrine que L'Hotte aurait fait naître de leur synthèse, mais qu'on ne
trouve exposée nulle part dans ses écrits. Formateur
des formateurs, comme instructeur en chef d'équitation de l'école de
cavalerie, puis comme commandant de cette école, il n'a enseigné - en
principe - que l'équitation militaire. Il lui a consacré d'ailleurs un
chapitre entier des «
questions
équestres », le chapitre XI : « Méthode
abrégée et simplifiée pour le dressage (
sic) des recrues »
selon
l'analyse de Mennessier de la Lance (
op. cit., t. II, p.
108). Cette
méthode fait irrésistiblement penser à celle de d'Auvergne (note 8).
Membre influent de la Commission du règlement de 1876, dont il fut
l'expérimentateur et le principal rédacteur, il a - dans le tome 1
- réduit l'équitation militaire : à l'instruction du cavalier
du rang, et
au dressage du cheval de troupe, reliant l'une à l'autre. (
Questions
équestres, Plon 1906, p. 152). On sait, par ailleurs,
qu'il a pris d'importantes responsabilités dans la réorganisation de la
cavalerie. (Il était général inspecteur, en 1881, et président du
comité consultatif en 1886). En particulier en s'opposant, avec succès,
à ceux qui voulaient la suppression des
cuirassiers (suite
logique de
celle des
lanciers
en 1871), pour faire une cavalerie légère complétée
d'une cavalerie de dragons et carabiniers, selon le modèle performant
américain de la guerre de Sécession. (Voir chap. V, note 28). (Voir
le
Concile de Tours : P.V. de séances tenues à Tours sous la
présidence du
général de Galliffet, 1881 ; Berger-Levrault.) (Voir «
les Grandes
Heures de la cavalerie française, » gal de Cugnac, p. 17.
Revue
historique de l'armée, août 1957.) Option qui fut lourde
de
conséquences. Au total, un personnage historique
énigmatique. Conservateur avec les cuirassiers, progressiste avec
Baucher. Un maître parmi les maîtres, mais qui ne fit pas de disciples
(M. de La Lance:
op.
cit., t. II, p. 107, note 1). Autant de
contradictions qui établissent le mystère L'Hotte. Pour résoudre
cette énigme, au moins quant à sa pensée équestre, il faut pratiquer la
lecture littérale, au pied de la lettre, de ses publications
posthumes (selon sa volonté !). Dans
Questions équestres (
op. cit., pp.
169-170), contrairement à l'idée répandue en France de l'unité de
l'équitation, le général L'Hotte la divise. Pour lui, il y a quatre
équitations: La haute équitation. L'équitation de campagne,
L'équitation de course et L'équitation militaire.Dans
Un
officier de cavalerie
(Plon 1905, chap. XVIII, p. 246), il écrit: «
Suivant que l'équitation de campagne ou savante (c.-à.-d. haute !) est
envisagée, la préférence doit donc être donnée aux principes de d'Aure
ou
à ceux de
Baucher. » D'Aure a été le maître de l'équitation de campagne, que l'on
appelle de nos jours « d'extérieur » ou « sportive ». Baucher a été le
maître de la Haute Équitation. L'équitation militaire a eu pour maître
d'Auvergne (voir note 8) et pour continuateur, au XXe siècle,
Beauchesne. Elle passe, au XIXe siècle, par L'Hotte qui l'a enseignée
et décrite comme une équitation « d'usage ». Nous ne connaissons pas de
maître à l'équitation de course, que L'Hotte signale pour mémoire...,
semble-t-il. Ainsi, L'Hotte se situe
exactement à la
croisée des quatre équitations, et de tous les courants de pensées. Il
s'efforce de bien les distinguer. La soi-disant synthèse est une
invention de ses hagiographes ! Toutes ces
équitations
existent encore de nos jours. Les responsables des programmes des
examens seraient bien inspirés de tenir compte de l'analyse de L'Hotte,
pour les adapter à chacune.
(11) On
notera que L'Hotte
ne confond pas l'équitation de campagne avec l'équitation militaire
comme le font ses commentateurs contemporains.
(12) La
querelle d'Aure-Baucher. - La querelle de
«
cent ans » : haras nationaux de l'agriculture et remontes militaires
de la guerre. - La querelle de l'artillerie et du génie à propos des pontonniers
(spécialistes de l'attelage) que voulait récupérer le génie.
(13)
Lt-colonel Blacque-Belair.
A propos du nouveau manuel d'équitation et
de dressage. Revue de cavalerie, 1912. La loi de 1905 fixait le service
militaire à deux ans !
(14) On notera les
mots : méthode, procédés... Le mot doctrine n'est pas employé.
(15)
Considérations sur l'équitation militaire allemande et
l'équitation militaire française. Observons d'abord que le système équestre mongol n'a pas eu besoin de
maîtres-écuyers, et que si le système arabe en eut quelques-uns, ils
ont simplement décrit les méthodes et procédés d'une équitation
parvenue à maturité par la pratique (sans écoles) afin qu'elle ne se
perde pas. On en voit l'heureuse influence de nos jours, au Maghreb, où
l'on assiste à un prodigieux retour à l'équitation traditionnelle. Par
contre, les écuyers allemands et français du XVIIe au XIXe
siècle, par des chemins différents, ont fait des efforts permavents
pour adapter la technique de l'équitation aux chevaux produits par
leurs élevages nationaux, et aux cavaliers fournis par le recrutement
de leurs armées !! En France, d'Auvergne
(note 8) est
particulièrement clair sur ce sujet. On peut ajouter à ces observations
ce fait troublant, qui témoigne, après d'Auvergne, de Bohan, de Gasté,
de la mauvaise qualité de la production française de « cheval de selle
de guerre de troupe ». à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. A
cette époque, en effet, on constate un foisonnement des enrênements. Or, ils portent pour la plupart le nom d'un
officier-instructeur de la cavalerie...
Chambon-Chervet-Colbert-Féline-La Beaume... Est-ce le hasard ! Non !
Ceci explique cela - On n'a jamais vu un enrênement en équitation
arabe ! Pourquoi? Parce que les chevaux sont bons. Ces
deux cavaleries (française et allemande) ont souffert de ne posséder ni
bons cavaliers de troupe, ni bons chevaux de guerre (en quantité
suffisante). Ce qui explique leurs contre-performances au début de la
Première Guerre mondiale (La Marne !). Seules les cavaleries
occidentales, héritières directes des systèmes équestres orientaux,
peuvent être créditées de victoires : celle des Cosaques issue du
système mongol/tatar, et celle d'Afrique du Nord produit du système
arabo-maghrébin : 1916. La cavalerie cosaque du
général russe
Broussiloff fait « prisonnière toute une armée autrichienne » (P.
Diffloth,
Races chevalines, Paris, Baillère et Fils, 1923) - 1918. La cavalerie des chasseurs d'Afrique et des Spahis marocains du
général français
Franchet d'Esperey fait capituler la XIe armée
allemande sur le front d'Orient. (
Jouinot-Gambetta-Uskub.
Berger-Levrault, Paris 1920.)
(16)
D'Aure ou Daure ? La
première orthographe est celle employée par le général L'Hotte. La
seconde est celle de l'état civil sous le premier Empire. Dans le
registre matricule des élèves incorporés au Prytanée impérial de St-Cyr
(La Flèche) : 1807-1814, on peut lire Matricule 497 - 3 Bon - 4e Cie
DAURE-CARTIER. Antoine, Philippe, Henri, Léon. Ce jeune homme est
parent à M. Dante, commissaire-ordonnateur. L'An dix-huit cent
sept, quatorze septembre, le jeune Daure-Cartier
Antoine, Philippe, Henri, Léon, né à Toulouse le 3 juin 1799, de
Antoine et de Rose-Claire Barthelemy-Gouraud. Nommé élève du
gouvernement au Prytanée par décret impérial du 10
septembre 1807. Y a été admis en cette qualité. M. son père est
mort lieutenant de la
gendarmerie du département de la Haute-Garonne. M. Pons (avocat),
son beau-père, demeure à Paris, rue Coqueron n° 8. Il
se charge de la correspondance. Il a
remis l'enfant entre les mains de M. le général commandant et a signé.
A
St-Cyr les jours, mois et an que dessus. -
Dictionnaire Hachette. AURE = vallée des Hautes-Pyrénées drainée par
La Neste d'Aure qui conflue avec la Garonne.
(17)
A propos de la
remonte.
Il est étonnant de noter qu'un sociologue moderne, étudiant
l'équitation dans le contexte économique, politique et social du XVIIIe
siècle, parvient (sans le connaître, car il ne le cite pas !) à la même
analyse que d'Auvergne. Ce qui confirme que ce dernier a été le
seul
maître à élargir sa réflexion aux dimensions du système équestre
national. En effet, Jean Lagoutte (
op. cit., p. 109) évoque : « les
difficultés de la remonte et du recrutement », et conclut : « Faute
d'une remonte homogène et facile, l'armée ne peut assurer l'homogénéité
de (la) doctrine équestre. » C'est à cette époque que l'équitation
française s'est divisée en plusieurs équitations, comme L'Hotte en fera
le constat (voir note 10). De sorte que : il n'y a pas une équitation
française mais plusieurs ! « L'unicité de la doctrine est bien morte »
(
ibid). La sociologie confirme l'étude critique des traités
d'équitation.
(18) Cette question devrait
faire l'objet
d'une recherche. L'ouvrage pourrait s'intituler:
De la remonte de la
cavalerie française, du colonel d'Auvergne au général Wattel. Le général Wattel (1878-1957) fut le plus grand écuyer français de ce
siècle, écuyer en chef de l'école de cavalerie de Saumur ; il fut le
dernier général inspecteur du service de la remonte du ministère de la
Guerre (créé, en 1831, par le maréchal Soult, ministre).
(19) Brack (gal F. de).
Avant-postes de cavalerie légère. 1e édition :
Paris 1831. Dans la postface de cet ouvrage célèbre, de Brack revient sur les
questions: de la remonte, du harnachement, du système équestre cosaque.
Il écrit : « Les chevaux de charrette ne doivent pas être admis dans nos
rangs... » Il faut des chevaux « élevés dans les lieux les plus arides
et les plus accidentés de France... ». Sur ces deux points, il ne fut
pas entendu. La cavalerie française métropolitaine sera toujours
remontée des rebuts de la charrette. Il écrit aussi qu'il faut «
simplifier la selle ». Il dit son admiration pour le système des
Cosaques, contre lesquels il a combattu : « Je vous ai cité les
Cosaques, et vous les ai présentés comme des modèles parfaits. » C'est
pourquoi il exprime - en 1831 - un espoir « que le gouvernement...
enverra aussi des officiers choisis, reconnaître chez les peuples
cavaliers toutes les améliorations que nous pouvons nous approprier...
». Ce vœu sera exaucé par l'histoire, puisque, pour conquérir le
Maghreb, l'armée française organisera sa meilleure cavalerie sur le
modèle du peuple cavalier arabomaghrébin. Elle l'utilisera partout avec
succès jusqu'à la fin de cette arme.
NOTES DU CHAPITRE X
(1) Le sujet traité dans ce chapitre a
fait l'objet, pour l'essentiel,
d'une communication au symposium de l'Organisation arabe pour le
développement agricole (OADA), qui a eu lieu à Tiaret (Algérie) les 2-3-4 septembre 1988.
(2)
Lieutenant général Thiébault. Manuel général du service des états-majors (rédigé en 1813).
Chapitre « Du commandant de la cavalerie et de cette arme en général »
(cité par Flavien d'Aldeguier. Des principes de la cavalerie,
Paris
1843). Page 472 : essayant de mesurer la
capacité
opérationnelle de la cavalerie (française), le gal Thiébault écrit : «
... Sur cent hommes pris au hasard, il n'y en a, en général, que
vingt-cinq (-) qui, maîtres de leurs chevaux (-) chargent
franchement... » Page 478 : le gal
Thiébault met le
doigt sur l'insuffisance des cavaliers français qui rend la cavalerie
fragile. « Nous débuterons (-) par une observation que l'expérience
justifie ; c'est que le feu et le fer de l'ennemi ne détruisent pas
(plus) la cavalerie à la guerre (-) c'est le manque de soins qui
occasionne (-) les plus grandes pertes !! » Page 479: «
... Le manque de ferrage est ce qui détruit le plus rapidement les
chevaux... » Flavien d'Aldeguier (même page) cite l'exemple suivant : «
Faute de ferrage, deux mille dragons et chasseurs, partis de Bayonne le
1er novembre 1807, arrivèrent le 1er décembre suivant à Lisbonne,
réduits à six cents hommes (sic) en état de service. » Ce dernier
fait historique est la meilleure conclusion aux exposés que
nous avons faits : Chap. IV note 2 et chap. VI note 1: A propos de
la ferrure.
(3) Sauf,
me dira-t-on, pour la cavalerie de Frédéric le Grand ! Ce fut
certainement sous tous les rapports, et selon tous les critères du «
système équestre » : hommes, chevaux, harnachements, équitation, la
meilleure cavalerie d'Europe occidentale (Frédéric achetait ses chevaux
de cavalerie en Ukraine comme en témoigne Warnery (op. cit.) et ses
hussards utilisaient le mors arabe à anneau-gourmette comme nous
l'apprend Weck (op. cit.)). Mais il faut ajouter le correctif suivant :
super opérationnelle oui ! Mais sur théâtre européen et dans le cadre
des guerres dynastiques ! Frédéric s'est bien gardé de sortir de ce
théâtre d'opérations.
(4) Anne Grimshaw, op. cit.,
p. 97,
signale : « ... les pertes épouvantables en Afrique du Sud de 340 000
animaux » (chevaux et mulets), durant ce que nous appelons, en France,
« la guerre des Boers », de 1899 à 1902, soit moins de quatre ans.
Quatrevingt-dix ans après Napoléon, la cavalerie britannique a atteint
un niveau de pertes, comparable - dans le temps et l'espace -
à celle
de la cavalerie de la grande armée. Exemples historiques incontestables
et incontournables de deux systèmes d'armes occidentaux non
opérationnels parce que fondés sur deux systèmes équestres mauvais :
soit par les hommes, soit par les chevaux, soit par les harnachements
et les techniques (blessures de dos et de pieds), soit par une
équitation de mauvaise qualité (thème de la fin du xixe siècle).
(5) Cheval et tradition en Algérie, Caracole 1988.
(6) F Braudel, La Grammaires des civilisations, Arthaud-Flammarion 1987.
(7) R. Grousset, l'Empire des steppes, Pavot 1939 ; thèse reprise par
Stuard Lebb.
(8) Attention. Nous réduisons la zone intermédiaire à ce que fut
autrefois le Khwarezm et le Khorassan. Ne pas confondre avec la «
région intermédiaire » de Dimitri Kitsikis dans son excellent ouvrage
sur l'Empire ottoman. PUF 1985.
(9) P.
Diffloth.
Zootechnie, races chevalines. Encyclopédie agricole, Paris 1923, qui en
fait la remarque. Mais il faut la ramener aux temps postérieurs à
l'Antiquité, après la création du cheval arabe.
(10) D.
Bogros, les Chevaux des Arabes, op. cit.
(11) Ibid, pp. 32 et suivantes.
(12) R. Dussaud, les Arabes en Syrie avant l'Islam, 1907.
(13) Cité par
Wentworth (Lady) The Authentic Arabian Horse 1962.
(14) Notitia dignitatum utruisque imperii, rédigée de 425 à 453 sous
Théodose le Jeune.
(15) E. Renan, Mahomet
et les origines de l'islamisme, Paris 1852.
(16) Dans Al Kitab al akoual, manuscrit de la B.N. de Paris, daté de
1327, et cité par Perron (op. cit.), on rapporte que le Kesra Barwiz
(Perse sassanide) (590-628) avait un cheval du nom de Chebriz... « A
chaque fer, il avait huit clous. » La technique du fer à cheval fut
transmise aux Arabes dans le royaume de Hira, (c.-à-d. en Syrie-Irak) à
cette époque. Les Européens, qui n'ont fait de recherches qu'en Europe,
ont posé en principe que le fer n'est apparu qu'au IXe siècle à
Byzance. Mais ils ont négligé toutes les sources arabes.
(17) C'est pourquoi il n'est pas sérieux de parler d'étriers avant
l'invention de l'arçon. C'est ainsi qu'une « selle de feutre » ne peut
être équipée d'étriers. Donc, ce n'est pas une selle, c'est un
ephippion. (Xénophon, De l'art équestre, Delebecque, Paris 1950.)
(18) Il est bien entendu que nous savons, comme tout le monde, que le
nomade « en paix » ne ferrait pas ses chevaux, et montait sans selle.
Mais nous parlons des Arabes de la cavalerie de l'Islam conquérant. Le
lecteur observera avec intérêt les planches numérotées de XXI à XXVIII.
(19)
Abu Bekr ibn Bedr, al Naceri, op. cit.
(20) Voir
planche XXIII du XIIIe siècle. Voir Descoins. l'Équitation
arabe, Paris, 1924, p. 141.
(2l) Ibn Hodeil l'Andalusy, la Parure des cavaliers, op. cit., p. 147.
(22) Voir Pluvinel, l'Instruction du roy, Paris 1625, planche « Le mors
génette ». Voir Weck, la Cavalerie à travers les âges, Lausanne 1980. Planche p.
171 : « Le mors arabo-turc des Hussards de Frédéric le Grand ! »
(23)
Génetaires : cavaliers militaires espagnols qui montaient et
combattaient selon le système arabe : chevaux, armement, harnachement,
équitation... mutatis mutandis.
(24) Voir
E.-J. Roux,
le Cheval Barbe. Destrier de
la conquête musulmane, sa descendance et
son expansion en Amérique, Maisonneuve, Paris 1987. Au sujet
de la selle, on note : 1) - que les selles dites mexicaines et
westerns sont de filiation
maghrébine pour ce qui est de l'essentiel: l'arçon ; 2) - l'autre
selle orientale de type hongrois marquera à peu prés
toutes les selles d'armes occidentales jusqu'au Canada ; 3) - une
exception célèbre : la fameuse Mc Clellan de l'US-Cavalery qui
est totalement maghrébine !
4) - arçon unique au monde : en cuir ! Celui des gauchos (voir Tavard,
op. cit.).
(25) Voir : - L'Empire des steppes de R.
Grousset. - Histoire des Mongols de Rachid ed Din, XIVe siècle. - Le Roman de Baïbars (tradition du Caire, de Damas et d'Alep),
éditions Sindbad 1988. - Dictionnaire d'art et d'histoire militaire, PUF, Paris 1988, aux XIIe
et XIIIe siècles, l'art de la guerre et la cavalerie chez les Arabes
furent à leur apogée.
(26) G. Le Bon :
médecin,
ethnographe, psychologue français. L'Equitation actuelle, 5e édition,
Paris 1922. « ... Pour connaître les principes d'équitation adoptés
dans un pays, il faut étudier nécessairement son équitation militaire. »
(27) Blomac et Bogros, l'Arabe, premier cheval de sang, Paris, Grépin
Leblond 1978.
(28) Les documents iconographiques que nous présentons démontrent que
l'appui sur l'étrier ne fut employé systématiquement qu'à partir du Xe
ou XIe siècle, et ne fut représenté qu'à partir du XIIe siècle.
(29) Il est intéressant de noter : 1) que ce sont les Arabes qui, les premiers, ont défini « le tenir de
la tête dans les mains », ce qui est « la mise en main » (en tirant sur
les textes, certains Européanistes diront que c'est Xénophon. Bien
sûr !) ; 2) qu'au XVIIIe siècle, les Français définirent « le tenir des hanches dans les
jambes » ; 3) et que le maître des maîtres. La Guérinière, a conclu en écrivant : «
Un cheval est dans la main quand il est dans les talons. » Ce qui est
implicite en équitation arabe, par leur position, les jambes et
les
talons tiennent les hanches en permanence. (Voir Marey-Monge, fondateur
des Spahis, 1852, lettre, les Chevaux du Sahara, Daumas, p, 10.)
(30) Cheval et tradition en Algérie, op. cit. ; Rôle et histoire du cheval Barbe au Maroc. par le Pr A. Sedrati, colloque international d'Alger, Juin 1982 ; Revue Maghreb vétérinaire, numéro de février 1988. Le Pr Sedrati fait
la même remarque que nous, à propos de la « perversion du folklore
exploité pour le tourisme ».
(31) E.-J. Roux, op. cit.
(32) L.
Gianoli, op. cit.
(33) Ch. Tavard, op. cit.
(34) J. Le Goff, l'Apogée
de la chrétienté. Paris 1982.
(35) Lefebvre des Noëttes, op. cit.
(36)
F. Braudel, la Méditerranée. Paris 1977.
(37) Plaisirs
équestres, spécial bibliographie, octobre 1972.
(38) Cheval et
tradition en Algérie, Alger 1988
(39)
Hadith : récit relatif à la vie du prophète de l'Islam, à ses paroles, à
ses actes. Le hadith
d'Ali rapporte que, lorsque Dieu créa le cheval, il lui dit : «
Je te nomme et te crée Arabe, ...... Tu es destiné à la poursuite et
à la fuite...»
(40) Dernier commentaire. A propos de la haute équitation. Si le
lecteur nous a suivi jusqu'au terme de notre recherche, il aura compris
que l'auteur rejette le mot « doctrine » et préfère, avec L'Hotte,
parler de « principes » pour ce qui concerne la haute équitation. La
raison en est que ce mot a pris en ce siècle, en équitation, une
connotation d'exclusion de ceux qui pratiqueraient une autre doctrine.
Or, l'histoire et l'expérience nous prouvent qu'il en va autrement.
Plus on pratique l'équitation et plus on compare les systèmes
équestres, plus on s'aperçoit que l'on marche, là aussi, vers l'unité.
Les différences apparentes sont venues des chevaux employés, des
esthétiques, des cultures et des époques. Car il y a eu progrès, parce
qu'il n'y avait pas de doctrine pour pétrifier la pensée. Si l'on
observe sur la longue durée, on constate que les différences
s'estompent et disparaissent. Le général Decarpentry l'a dit, en 1946,
et en a témoigné, en 1947, (voir note 2, du chap. VIII). Notre écuyère
championne olympique 88 et du monde 89, Mme Otto-Crépin, l'a prouvé.
D'ailleurs - c'est une question de bon sens - s'il en était autrement
la compétition olympique de dressage serait aberrante. Or; c'est la
plus belle des épreuves.